SORPRESA !

Alors que le roman de la Ligue des Champions offre déjà ses dernières pages, des néophytes venus d’Espagne se sont dès à présent attribué tout un chapitre : Villarreal. L’histoire leur réservera à jamais le titre de révélation. Ils ont su s’inviter à la table des grands et ce n’est pas dû au hasard. Villarreal fait penser à Valence par sa tactique, technique, géographie, etc. Ce club vient de la Costa Blanca et, plus précisément, dans la grande banlieue de Valence. Au-delà de la surprise ( sorpresa, en espagnol), cette affirmation européenne s’explique par toute une philosophie.

1. Concept général

a) peu d’erreurs défensives

Villarreal a parfaitement huilé son organisation défensive. Tout est bien pensé et toutes les gammes sont visiblement travaillées et répétées avec soin. Rien n’est laissé au hasard et cela permet de limiter drastiquement le risque d’erreurs. Villarreal encaisse généralement très peu de buts, que ce soit via des phases de jeu ou sur des balles arrêtées. Cette équipe limite parfaitement les moyens offensifs de ses adversaires. C’est déjà un gros acquis. Quand une équipe limite toujours la casse, cela lui confère une grosse assurance pour la suite des événements.

b) deux attaquants rapides

Les Espagnols ont pris le soin de se doter de deux attaquants très véloces : José Mari et Diego Furlan. La reconversion est instantanée. Si certaines équipes doivent passer par des stations intermédiaires dans la ligne médiane (beaucoup de passes), ce n’est pas le cas de Villarreal. Elle n’a pas besoin de beaucoup de joueurs afin de se présenter en zone de vérité. Cela signifie dès lors que l’équipe est rarement hors position. Son organisation globale reste stable, toutes les zones sont sans cesse parfaitement occupées.

c) phases arrêtées

Elle y accorde une énorme importance. Tout se joue souvent sur des détails et les balles arrêtées sont de plus en plus décisives. Villarreal a parfaitement intégré cette évidence. Dès lors, les coups de coin, les coups francs dans l’axe, décalés, ou sur les côtés du rectangle adverse sont travaillés avec un soin jaloux. En général, c’est Juan RomanRiquelme qui se place derrière le ballon afin d’être l’exécuteur des hautes £uvres. Il y a une grande variation dans cette spécialité : balles rentrantes ou sortantes, tirs puissants, recherche du trafic aérien, souci de trouver un équipier démarqué, etc. Cette richesse sur les phases arrêtées avait notamment décontenancé l’Inter. Or, on sait que les Italiens sont très forts en matière de scouting et prévoient tout. L’inventivité de Villarreal les a surpris.

2. Système de jeu

a) un 4-4-2 comme Valence

Villarreal est adepte du 4-4-2 qui ressemble à celui de Valence avec une petite adaptation au niveau de la ligne médiane. Valence alignait deux éléments dans l’axe afin d’orchestrer la récupération. Villarreal y en poste trois à vocation d’abord défensive : MarcosSenna, AlessioTacchinardi et Juan PabloSorin. Ils ont pour mission de passer l’aspirateur dans cette zone. En somme, ils sont au service de Riquelme qui, lui, est chargé de dispatcher le jeu offensif.

b) un repli défensif très bas

L’équipe de ManuelPellegrini imite aussi le Valence d’ Hector Cuper en organisant son repli défensif très bas sur l’échiquier. La ligne médiane recule profondément mais elle est capable de s’adapter aux circonstances. Ainsi, à Londres, sur la pelouse d’Arsenal, on a découvert un pressing plus haut. Villarreal module ses conceptions et, tout en respectant l’organisation d’ensemble, cela peut surprendre l’adversaire.

3. Individualités

Même si l’organisation est soignée jusque dans les moindres détails, Villarreal, tout comme Valence dans le temps, brille par quelques individualités de très haut niveau européen. Forlan et José Mari constituent évidemment des atouts très importants dans la stratégie des Espagnols. Avec des attaquants de ce gabarit, le danger est permanent : l’adversaire ne peut pas les quitter du regard. Quand ils sont sur orbite, leur efficacité est redoutable. Mais la pièce maîtresse de Villarreal n’est autre que Riquelme. C’est le chef d’orchestre, un numéro 10 dans la définition la plus traditionnelle de cette fonction. Dans ce rôle, Valence disposait évidemment de Pablo Aimar. Beaucoup d’amateurs cherchent à comprendre pourquoi Riquelme réussit à Villarreal alors que son séjour à Barcelone se solda par un échec. Dans son club actuel, tout est basé sur lui. Ce n’était pas du tout le cas au Barça, qui a toujours beaucoup de grosses cartes individuelles. Si l’Argentin jouait encore au Camp Nou, il bloquerait Ronaldinho qui a besoin de reculer ou de se décaler. Riquelme lui marcherait sur les pieds. Le Barça a développé un système pour le Brésilien, pas pour son prédécesseur. Or, Riquelme a besoin d’une équipe qui vit pour lui. Villarreal a parfaitement compris cette évidence.

4. Entraîneurs

Tout comme Valence au temps de ses grands succès, Villarreal a confié son groupe à un entraîneur de l’école sud-américaine. Cuper est Argentin et il offert la culture footballistique de son pays à Valence qui a disputé deux finales de la Ligue des Champions. Pellegrini est Chilien mais il a beaucoup travaillé en Argentine où on voit généralement du 4-4-2, du repli défensif très bas de la ligne médiane, d’une défense strictement organisée, de la limitation du risque d’erreurs, des phases arrêtées bien étudiées, etc. Villarreal n’occupe pas le haut du panier pour le moment en Liga et c’est tout à fait normal : son noyau est limité et ne permet forcément pas de lutter avec la même ambition sur tous les tableaux. Quand Barcelone, Milan ou Arsenal ont un blessé, un suspendu ou un joueur en méforme, il leur suffit de puiser dans leur énorme noyau. On ne voit pas la différence. Moins riche, Villarreal n’a pas cette chance et tourne avec un effectif nettement plus réduit que les géants. Cela ne fait qu’augmenter les mérites d’une équipe qui est bien la sorpresa de cette LC.

PROPOS RECUEILLIS PAR PIERRE BILIC

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