SIQ se relance

Bruno Govers

Les Zèbres permettent au défenseur namurois de rester en D1 à 35 ans.

T hierry Siquet :  » L’année passée déjà, les dirigeants louviérois s’étaient plu à me tenir en haleine jusqu’au bout concernant la reconduction de mon contrat. A l’époque, il m’avait fallu patienter jusqu’à la finale de la Coupe de Belgique pour obtenir une prolongation d’une saison. Aussi ne m’étais-je pas trop fait de souci, cette fois encore, au terme de la défunte campagne. Je croyais que la délivrance allait sonner tôt ou tard pour une durée de 12 mois. J’avais d’autant plus mes apaisements que, tout au long du championnat 2003-04, j’avais fait preuve d’une constance à toute épreuve. Avec un total de 28 matches, j’avais également été l’un des joueurs les plus sollicités par Ariel Jacobs. Et, à intervalles réguliers, le coach s’était toujours répandu en propos laudatifs à mon égard. Dès lors, pendant mes vacances en Crète, en juin, j’avoue avoir quelque peu sursauté en apprenant de la part de son successeur, Albert Cartier, qu’il ne compterait pas sur mes services. J’aurais pu comprendre qu’il me dise qu’à près de 36 ans, je n’étais plus un élément d’avenir et qu’il préférait accorder la préséance à un jeunot mais davantage que mon âge, il aura essentiellement été question de l’état de mon genou droit qui ne présageait, soi-disant, rien de bon. C’est vrai que cette articulation a été fort mise à l’épreuve en près de deux décennies de professionnalisme. Elle ne m’a toutefois jamais empêché de tenir ma place ces derniers mois. A une exception près : contre St-Trond, à trois journées du terme. Par mesure de prudence, je fis l’impasse aussi sur la rencontre suivante avant de rebondir lors du match de clôture à Anderlecht. Le verdict eût-il été semblable si les mêmes petits tracas, dus à l’arthrose, s’étaient produits non pas à la fin mais en début de championnat ? Je me le demande. Comme je me pose la question de savoir ce qu’il serait advenu de moi si Jacobs était resté au Tivoli « .

Test d’embauche

 » Pour la toute première fois depuis mon entrée dans le football professionnel, en 1986, je me retrouvais confronté avec un futur complètement flou. J’étais tellement sûr de rempiler chez les Loups que je n’avais pas pris la peine de sonder les possibilités ailleurs. L’incertitude liée à mon sort ne fut cependant pas très longue. En deux temps trois mouvements, plusieurs clubs se montrèrent intéressés : Tubize, Liège et Verviers. D’un côté, j’y voyais la preuve que je comptais toujours pour certains. D’un autre, je mesurais soudain que la D1 s’éloignait sans doute pour de bon. Compte tenu de mes 35 ans, il fallait bien que je m’en fasse une raison. A priori, je n’avais pas réellement de préférence entre la D2 ou la D3. Mon choix était plutôt dicté par les possibilités de reconversion, entendu que je n’allais plus vivre du seul football à l’un de ces étages. Des trois clubs précités, un fut extrêmement concret puisqu’une place de délégué commercial s’y profilait en plus à mon attention. De retour de Crète, j’ai d’ailleurs passé un test d’embauche en ce sens. Mais au moment de la finalisation de ce dossier, il y eut une excellente surprise de dernière minute, sous la forme d’un coup de fil du Sporting Charleroi. Le manager, Mogi Bayat, m’avisa que les Zèbres étaient à la recherche d’un arrière expérimenté et que je répondais au profil. On était le lundi 5 juillet et le lendemain, tout était réglé. Après des tas de tracasseries administratives, je pouvais refaire d’autres papiers. Mais j’étais très heureux. Car poursuivre ma route en D1 était inscrit sur mon tableau de marche. Si j’avais dû effectuer un pas en arrière, je m’y serais résolu même si, dans ma tête, je n’y étais pas préparé. Maintenant, on ne m’y reprendra plus. Un sursis pareil, je ne l’obtiendrai pas chaque année. Dès lors, je vais mieux préparer l’après football, afin de ne plus être pris au dépourvu. Tout en donnant tout ce que j’ai dans le ventre pour le Sporting, évidemment « .

Rêve de Mambourg

 » Même si je ne porterai probablement jamais les couleurs de Mouscron et de Mons, j’ai le sentiment d’avoir bouclé la boucle au sein du football wallon. Au départ, j’ai eu la chance, pendant une demi-douzaine d’années, de défendre les intérêts de son club le plus emblématique, le Standard. Et voilà qu’en fin de parcours, j’ai l’honneur de porter le maillot d’un autre ténor francophone. C’est fabuleux. N’y voyez aucun opportunisme de ma part. Il y a un an à peine, lors d’une interview dans vos colonnes, j’avais déjà signalé que mon rêve, après six années au Cercle Bruges et deux à Ekeren, aurait été de militer au Mambourg. Par la force des choses, j’avais abouti au Tivoli, où j’ai passé en définitive cinq saisons merveilleuses. Mais cet attrait pour les Zèbres est toujours resté. Peut-être parce que les similitudes ne manquent pas entre le Standard et Charleroi : même enceinte majestueuse, même public enflammé, même histoire séculaire. Un jour, je pourrai dire à mes petits-enfants que j’ai porté le maillot de deux clubs centenaires en Wallonie. Et même quatre si je compte, en Flandre, le Cercle et Ekeren, devenu le Germinal Beerschot depuis. Je ne sais pas si cet honneur sera réservé à beaucoup d’autres joueurs. Aussi, j’en conçois une satisfaction certaine, mêlée de fierté. Le hasard veut que le grand derby hennuyer entre Charleroi et La Louvière figure au programme de la première journée de la compétition 2004-05. Il va sans dire que cette confrontation est inscrite en lettres grasses dans mon petit calepin. Ce rendez-vous-là, je ne voudrais le louper pour rien au monde. Le dernier m’avait laissé un goût saumâtre. En principe, j’aurais dû m’y imposer avec les Loups, puisque nous menions encore 1-2 à un fifrelin du terme. Mais Thibaut Detal égalisa in extremis d’une superbe reprise de volée. Cette fois, je tiens à une victoire des Zèbres, même si ce serait automatiquement synonyme de déception pour mes très nombreux amis louviérois. Et ce, à tous niveaux. Même le président Filippo Gaone m’a souhaité bon vent à Charleroi, c’est quand même tout dire « .

Deux Brogno

 » Chez les supporters, personne ne m’en veut non plus, manifestement, de porter la casaque du voisin et rival. Les mentalités n’y sont pas aussi exacerbées qu’à Bruges, où il était pour ainsi dire inconcevable de passer du Cercle au Club, ou qu’à Anvers, où le Beerschot et l’Antwerp n’ont jamais fait bon ménage. Ici, le climat est différent. Tout d’abord parce qu’il y a déjà eu des tentatives de rapprochement entre La Louvière et Charleroi. Et, d’autre part, parce que pas mal de joueurs ont transité par ces deux clubs. Et parfois non des moindres comme l’ancien international Charly Jacobs. Au Sporting, je ne me retrouve pas en territoire inconnu, en tout cas. Je connais très bien Frank Defays, qui habite la banlieue namuroise comme moi et, après toutes ces années passées au sommet du football belge, je retrouve automatiquement certaines têtes. Dante Brogno fut le premier à m’accueillir à bras ouverts. Pourtant, Dieu sait si j’ai eu maille à partir avec lui, par le passé, sur le terrain. Régulièrement, on se balançait des noms d’oiseaux à la tête (il rit). Il ne supportait pas toujours que je mette le pied et n’hésitait jamais à clamer son indignation. Pour ma part, je lui rendais toujours la monnaie de sa pièce en le traitant de comédien. Mais tout cela, c’est de l’histoire ancienne. Non seulement, je suis débarrassé définitivement de Dante en tant que joueur mais aussi de son frère, Toni, qui a eu la très bonne idée de rallier le Mambourg en provenance de Westerlo. De la sorte, il ne risque pas, non plus, d’y avoir de l’électricité dans l’air entre nous. Car le cadet, c’était pas toujours de la tarte non plus (il rit). A choisir, je préfère l’avoir avec moi que contre moi « .

Comme Ekeren

 » C’est marrant comme la perception peut être différente : à La Louvière, j’étais considéré comme trop vieux et à Charleroi, je suis prisé pour mon expérience. Tout ce qu’on attend de moi, c’est que je serve de guide aux jeunes, sur le terrain et en dehors. Et, sans vouloir me pousser du col, je crois être en mesure de répondre à cette double attente. Le Sporting actuel me fait penser, dans une certaine mesure, au Germinal où j’ai milité. Arrivé là-bas à 28 ans bien sonnés, j’étais le troisième plus jeune joueur de l’équipe avec Jan Moons et Tom Vandervee. Au début, je me posais des questions quant au bien-fondé de tant d’anciens, comme Mike Verstraeten, Gunther Hofmans, Cvijan Milosevic, Manu Karagiannis et j’en passe. Jusqu’au jour où j’ai compris qu’avec des gars de cette trempe, on pouvait résolument aller à la guerre. Qualitativement, Ekeren n’était pas mieux fourni que d’autres entités de l’élite. Mais grâce à l’expérience accumulée par ses joueurs, il ne se retrouvait jamais en eaux troubles, contrairement à d’autres qui tablaient sur des footballeurs moins routiniers. Quand, comme le Sporting ces dernières années, on a quelquefois flirté avec le maintien, il faut pouvoir compter sur des éléments qui en ont vu d’autres et qui sont capables de garder la tête froide en toutes circonstances. Je suis incontestablement de ce nombre. Grâce à mon vécu, je pense pouvoir affirmer que je suis en mesure de gérer aussi bien les dix premières que les dix dernières minutes d’une partie, quand la peur d’un faux-pas taraude parfois les esprits. Et n’était-ce pas là, justement, l’un des gros problèmes de Charleroi, la saison passée ? Si l’équipe avait toujours su garder le bénéfice de l’acquit qu’elle s’était forgé après 80 minutes, jamais elle n’aurait dû lutter jusqu’au bout pour sa survie. Si je peux l’aider dans cette uniformité et si je peux conférer aux jeunes mon jusqu’au-boutisme et mon métier, je serais un footballeur particulièrement heureux en bout de saison « .

Bruno Govers

 » A La Louvière, j’étais TROP VIEUX. A Charleroi, ON AIME mon expérience  »

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