‘SERVUS, EUER BASTI’

Après le départ de Bastian Schweinsteiger pour Manchester United, le Bayern a rapidement retrouvé sa routine. Il a rarement pris congé d’une icône avec tranquillité.

En apprenant que Bastian Schweinsteiger avait rejoint Manchester United, Manuel Neuer, le gardien du Bayern, lui a envoyé un sms. Le médian n’y a pas répondu. Neuer a pensé qu’il se trouvait déjà en avion, ajoutant en riant que le pilote ne voulait sans doute pas faire demi-tour.

Ce 11 juillet a été une journée étrange. Un adieu en l’absence de celui qui partait, sans que le club puisse le remercier pour les nombreux services rendus, pour 18 ans d’amour de son club, pour 342 matches de championnat et 500 matches officiels en équipe première, pendant treize saisons. Ce jour-là, le Bayern présentait son équipe aux 70.000 supporters présents dans le stade. Pas de trace de Bastian Schweinsteiger. Nul ne comprenait. Ce n’est que le lendemain qu’il a remercié les supporters via Facebook :  » Servus, Euer Basti.  » (Salut, votre Basti, en bavarois, ndlr). Il ne faut y chercher aucune stratégie de communication. Ça illustre la simplicité de Schweinsteiger, une étoile qui fait ce qu’elle estime être le mieux, même si c’est parfois inattendu.

Le CEO Karl-Heinz Rummenigge s’est adressé à la presse pendant que Bastian Schweinsteiger et son amie, la joueuse serbe de tennis Ana Ivanovic, arrivaient à l’aéroport de Manchester. Il a souligné que Schweinsteiger avait été un joueur extrêmement important pour le Bayern et a insisté : le départ s’est déroulé dans la plus parfaite amitié. Surtout, il a traité de fable la rumeur selon laquelle Pep Guardiola ne comptait plus sur Schweinsteiger. Or, cette rumeur était devenue insistante avant même le transfert du médian, dans les coulisses du Bayern. L’ancien manager du club, Christian Nerlinger persiste et signe :  » Schweinsteiger est parti parce qu’il avait le sentiment que Guardiola ne le soutenait plus à 100 %.  » Ce que le Catalan réfute, expliquant que Schweini lui avait parlé d’un éventuel transfert et qu’il lui avait offert une réponse courte et professionnelle :  » C’est à toi de décider où tu peux être heureux.  »

FRAGILE OU PLUS EN FORME QUE JAMAIS ?

Le Bayern a donc tourné un chapitre important. Celui d’un footballeur qui a grandi non loin de la frontière autrichienne, dans le village d’Oberau, et qui à douze ans, était considéré comme le meilleur skieur allemand de sa génération. Mais Bastian Schweinsteiger a choisi le football. Il a été champion d’Allemagne huit fois, a enlevé sept Coupes d’Allemagne, une Ligue des Champions et a enfilé à 111 reprises le maillot de l’équipe nationale, avec laquelle il a été champion du monde en 2014. Il cherchait un nouveau défi.

Ce transfert surprend le monde mais ne s’est pas fait par hasard. Bien que le Bayern ait accentué l’importance de son médian ces dernières semaines, il faut reconnaître que la saison dernière, il a glissé au second rang. Il avait peu de chances de retrouver un rôle majeur et avait depuis longtemps pris sa décision : il allait chercher un autre employeur. Il était à la recherche d’un véritable challenge. Dans un grand championnat, pas en Amérique, pas quelque part au Moyen-Orient. Quand Manchester United s’est manifesté, il n’a pas hésité longtemps.

Le club anglais a versé 18 millions d’euros pour l’énergique médian. Schweinsteiger gagnerait 14 millions par an, soit 40 % de plus qu’au Bayern, dont il était le mieux payé, avec Franck Ribéry et Philipp Lahm : environ dix millions par an. Si Manchester United est sacré champion, il percevra encore un million de plus. Un seul chiffre restait méconnu : son numéro de maillot. Au Bayern, il portait le 31, qui est celui de Marouane Fellaini à United.

Selon les observateurs, sa décision est courageuse et intelligente. Schweinsteiger disposait encore d’un an de contrat au Bayern mais qui sait où il aurait échoué, si son étoile avait continué à pâlir ? Car Schweinsteiger, qui fête ses 31 ans samedi prochain, est fragile. Son football engagé exige un lourd tribut, son corps est usé. Ses genoux et ses muscles se rappellent régulièrement à son souvenir et il a nettement moins joué la saison passée que les années précédentes. C’est ce qui a incité Franz Beckenbauer, la légende du Bayern, qui ventile son opinion à tous vents sans jamais en payer les conséquences, à émettre quelques réserves : dans le rude et lourd championnat anglais, Schweini va devoir en faire plus encore, il va devoir être au summum de sa forme et ne pas passer son temps à jouer au tennis.

A Manchester, Bastian Schweinsteiger a d’emblée affirmé ne pas se faire de soucis : il a certes été blessé jusqu’en octobre après le Mondial mais il est maintenant plus en forme que jamais. Louis van Gaal, qui l’a entraîné au Bayern, a ajouté ne pas douter un instant que Schweinsteiger soit l’homme apte à contrôler le jeu de son équipe, par sa vista, son jeu de position et ses passes millimétrées. Sur ce, Basti a vraiment entamé le nouveau volet de sa carrière, en accompagnant son nouveau club en Amérique, pour quatre matches. Il ne revient que le 31 juillet mais il n’a pas rompu le cordon ombilical le liant au Bayern : il s’est inscrit sur les comptes Twitter de ses coéquipiers. Avec efficacité : d’abord les gardiens, puis les défenseurs, les médians et les attaquants.

SPARADRAP ARRACHÉ

Le Bayern a clos l’ère Bastian Schweinsteiger. En Coupe Telekom, ses deux premiers matches sans le médian, il a été battu deux fois, à la grande colère des supporters, mais Guardiola, imperturbable, a affirmé être satisfait de l’intégration de plusieurs joueurs. Initialement, il n’a pas parlé d’un remplaçant à Schweinsteiger.  » Un joueur de sa classe est tout simplement irremplaçable « , a déclaré le directeur sportif Matthias Sammer. En plus, le Bayern dispose de suffisamment de possibilités en ses rangs, comme l’Espagnol Xabi Alonso.

Il a changé d’avis entre-temps. La semaine dernière, le Bayern a embauché le Chilien Arturo Vidal, de la Juventus. Un battant dans l’entrejeu, un footballeur réputé agressif, violent, qui s’impose aussi par la parole. Vidal connaît la Bundesliga pour avoir joué pour le Bayer Leverkusen. Il aurait coûté 35 millions et aurait signé pour cinq ans.

Le Bayern a besoin de talent, ses deux stars, Arjen Robben et Franck Ribéry, n’étant toujours pas rétablies. Ils n’accompagnent d’ailleurs pas le Bayern dans son voyage, même si Robben devrait être rapidement délivré de ses problèmes musculaires. Ribéry, par contre, est sur la touche depuis le mois de mars, à cause de problèmes à la cheville droite. Il va certainement rater le début du championnat.

Ça tracasse le champion bien davantage que le départ abrupt de Bastian Schweinsteiger, qui a agi selon ses habitudes, préférant une douleur courte. Il a rompu tout aussi brutalement avec le magnifique mannequin Sarah Brandner, dont il partageait la vie depuis sept ans, pour se jeter dans les bras d’Ana Ivanovic. Nul dans son entourage n’était au courant. C’est d’ailleurs étrange dans le chef d’un footballeur loué pour son ouverture et sa franchise.

PAR JACQUES SYS ? PHOTOS BELGAIMAGE

Bastian Schweinsteiger risquait de devenir un joueur de second rang au Bayern.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire