Self made man

Rudy Moury (49 ans) était aux années 90 ce que Marouane Fellaini est aux années 2010. Et comme Fellaini, Moury était peut-être reconnaissable à ses boucles mais il valait bien plus que sa chevelure. Onze ans au plus haut niveau, 201 matches de D1, répartis entre Charleroi (principalement), Ekeren (une saison) et La Louvière. Le rencontrer est un plaisir. Convivial, avenant et franc, Moury a gardé les pieds sur terre.

 » Je ne suis pas jaloux des joueurs d’aujourd’hui, ni nostalgique. Pour moi, mes années de footballeur n’ont constitué que du bonheur. Je me souviens encore avoir dormi avec ma première paire de chaussures, avoir regardé Robby Rensenbrink et Arie Haan en finale de Coupe d’Europe avec les yeux d’un gosse et quelques années plus tard, je disputais la finale de la Coupe de Belgique avec le même Arie Haan sur le banc d’en face ! Rendez-vous compte : j’ai joué à Anderlecht ou Bruges face à des joueurs comme Jan Ceulemans, qui avait disputé le Mondial 86 ! Un rêve.  »

Moury a donc fait partie de la grande équipe de Charleroi. Celle drivée par Georges Heylens ou Robert Waseige. Celle qui se retrouva donc en finale de Coupe en 1993 et en Coupe d’Europe en 1994.  » On a gardé l’image d’un Carolo qui allait jusqu’au bout avec un mental d’acier. Mais je n’aime pas qu’on me résume en disant que j’étais le marathonien du Mambourg, le mec bon seulement à cavaler sur son flanc. Je savais jouer au foot et donner de bons centres à Dante Brogno. Je suis resté 10 ans en D1 ; j’ai travaillé avec Heylens, Leekens, Waseige, Peruzovic. On ne peut pas tromper ces gens-là ! Même si c’est vrai que j’aimais tacler et que je ne comptais pas mes efforts.  »

En 1997, Moury quitte Charleroi pour le Germinal Ekeren.  » Une heure après avoir signé, je le regrettais déjà. Je suis parti de Charleroi en coup de vent. J’aurais voulu y finir ma carrière mais j’ai demandé une augmentation de 500 euros que Gaston Colson m’a refusée. J’ai alors décidé de partir car je suis quelqu’un d’impulsif. A Ekeren, j’ai joué la 3e place mais on ne me faisait pas confiance. Je me suis demandé ce que j’étais venu faire là-bas. J’étais trop attaché à Charleroi.  »

Retour à La Louvière où après une saison en D2, il redécouvrait la D1 à 35 ans. Après sa carrière, Moury a coupé les ponts avec le football, préférant ouvrir sa taverne à Gosselies. Six ans plus tard, il devenait préparateur de commandes pour la société Bidvest, où il travaille depuis sept ans.  » C’est un métier dur. Je travaille huit heures et je soulève manuellement 10 tonnes par jour. Je n’ai jamais été au chômage de ma vie et c’est ce dont je suis le plus fier. Même si certains politiciens m’avaient promis un job, je n’ai pas voulu gratter à gauche et à droite. J’ai toujours préféré y arriver par moi-même.  »

En dehors de son travail, Moury cultive la passion du vélo. Dimanche dernier, il a assisté aux championnats de Belgique et fait tous les championnats du monde depuis 2001.  » Cette année-là, j’ai assisté à Paris-Roubaix et j’ai ressenti une vraie émotion en lisant la douleur sur le visage des champions. Depuis lors, je suis Tom Boonen dès que je peux et j’ai même fait le Paris-Roubaix pour cyclotouristes en 2012. J’ai mis 4 h 55.  »

La semaine prochaine, il sera bien au bord des routes, à Pont-à-Celles où passe le Tour de France. Et un jour, lorsqu’il n’aura plus à s’occuper de ses chiens vieillissants mais adorés, il prendra la route pour suivre le Tour de France sur une ou deux semaines.

PAR STÉPHANE VANDE VELDE

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire