SEF VERGOOSSEN

A deux reprises, Al Jazeera lui avait déjà demandé de devenir son entraîneur. A la troisième, Sef Vergoossen s’est dit :  » Pourquoi n’irais-je pas voir ? » Et l’ancien entraîneur du RC Genk a signé un contrat d’une saison aux Emirats Arabes Unis.

Et ?…

Sef Vergoossen : La structure est fantastique. Un médecin, trois physiothérapeutes, un spécialiste de la revalidation, un préparateur physique, un entraîneur des gardiens, trois adjoints, tous à temps plein. Le staff médical a un cabinet séparé. Les bains, les saunas, les jacuzzis, les baignoires pour massages et autres peuvent accueillir non pas deux personnes mais dix. Il n’y a d’ailleurs pas qu’un seul bain mais trois de chaque sorte. Les terrains et le stade sont aussi de grande qualité. Ce club est capable de progresser pour atteindre le bas de la D1 belge. Certains joueurs sont professionnels, d’autres ont une autre carrière. Il faut en tenir compte, comme des heures de prière.

Comment vit-on le football là-bas ?

La TV en diffuse quatre fois plus qu’aux Pays-Bas ou en Belgique. Al Jazeera Sports et Dubaï Sports retransmettent tout ce qui peut passer en direct. Nous avons une assistance moyenne de quatre à cinq mille personnes, plus quand ça va bien. Abou Dabi compte un petit million d’âmes, soit 80 % de la population totale, mais 75 % des habitants sont des étrangers présents pour affaires, qui ne s’intéressent pas directement au football. Le club accomplit de gros efforts pour rattraper son retard au niveau du football. C’est plus lent qu’au Japon à cause du petit nombre d’habitants.

La communication avec la presse, les supporters et les gens du club est un aspect important de votre méthode de travail. Dans quelle mesure parvenez-vous à communiquer là-bas ?

C’est moins facile mais après l’arabe, l’anglais est la langue véhiculaire, ici. A peu près tout le monde la parle. Un de mes adjoints est égyptien et parle anglais et arabe. Quand il le faut, je passe par lui. Le groupe est très travailleur mais il faut tout répéter : quand j’explique quelque chose, une semaine plus tard, je dois recommencer car ils n’ont pas eu de formation de base dès leur tendre enfance. Leur football s’appuie sur la volonté et le physique car ils sont costauds. On peut aligner deux étrangers et la plupart des clubs les choisissent en pointe. Le travail défensif est donc plus médiocre et il est fort possible qu’on mène 0-3 mais que dix minutes plus tard, le score soit de 3-4 ! Même si la population locale délègue tout le travail aux étrangers û les gens d’ici ont assez d’argent et en auront encore plus demain û, les joueurs ne sont pas fainéants, ce qui est peut-être paradoxal dans cette culture. Après trois journées de championnat, nous sommes premiers ex-aequo avec sept points.

Dans quelle mesure Al Jazeera correspond-il au cliché du monde arabe, selon lequel un entraîneur est renvoyé après deux défaites ?

Apparemment, ici, on n’a encore jamais renvoyé prématurément un entraîneur. C’est peut-être dû au statut du club, qui veut rejoindre l’élite. Un manager australien intérimaire est venu pour réaliser une analyse en profondeur du club. Il est sur la même longueur d’onde que mon assistant, Dwight Lodeweges, le directeur technique, Rob Baan, et moi-même. C’est un choc pour les gens d’ici car ils doivent effectuer plus de changements qu’ils n’en ont l’habitude. C’est un choc pour eux de placer des jeunes dans une académie parce qu’ils ont encore besoin de trois ou quatre ans pour être prêts. En général, ils paient beaucoup les étrangers et moins la population locale. C’est quelque chose qu’il faut modifier mais le club est en plein développement et c’était l’essentiel à mes yeux : je voulais avoir le sentiment qu’on appréciait mes idées. Je ne regrette pas mon choix.

par Raoul De Groote et Mathias Stockmans

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