» Savoir perdre  » : Guardiola va relire !

Le Real a pu évoluer à domicile durant 30′ de plus que le Bayern et n’en a pas profité, pas plus qu’ensuite, de la séance de tirs au but prestée elle aussi devant ses supporters ! Aucune excuse donc, tant pis pour José Mourinho et bravo Bayern : lequel disputera la finale… à Munich, ce qui le rendra un peu plus Goliath, en me rendant vaguement supporter de Chelsea, un peu plus David pour la cause ! Car ce sera Chelsea vu que le Barça, bien qu’ayant évolué à domicile à 11 contre 10 durant près d’une heure, n’en a pas profité non plus : tant pis pour Pep Guardiola et bravo les Blues !

J’ai d’abord entendu que ce qu’a fait John Terry était inadmissible : mouais…comme sont inadmissibles les multitudes de vicelardises de la planète Foot, réprimées par l’arbitre quand il voit ou veut bien voir ! Perso, plus que l’inadmissible, je retiens le côté étonnamment imbécile : y’a six arbitres à l’affût, des caméras en nombre pour repérer/confirmer ton coup fourré foireux, mais toi, Terry, capitaine trentenaire dégoulinant d’expérience, tu te laisses aller à pareil caprice ! Comme quoi en foot, même les stars peuvent alterner le très biesse et le très bon…

J’ai aussi entendu que Victor Valdés était décidément le point faible du Barça. Pas décidément, jugeons mollo : avec Carles Puyol et Andrés Iniesta, ce gars est le seul Blaugrana à avoir remporté trois finales de Champions League… et il sauve régulièrement de chauds ballons parvenus pour une fois jusqu’à lui, à des moments de match où la domination du Barça n’est pas encore assise au marquoir ! Ok, Valdés vient de louper coup sur coup Clasico et demi-finale européenne. C’eût même pu être pire, car il a eu du bol en karatékant son pote Gégé Piqué ! Le mec de Shakira gisait si sonné que le ref en a oublié sifflet et carton : Valdés avait pourtant fait coup double comme au bowling, pulvérisant en même temps Didier Drogba en plein rectangle ! Mais bon, ceci admis, remettons l’église au milieu du village et Valdés au milieu de son but : c’est un fort bon gardien, le foirage du Barça n’est pas pour sa pomme unique, faut pas tout à coup le cataloguer de sous-merde par comparaison avec Iker Casillas

Chez nous, enfin, nombre de footeux grosso modo neutres se sont ensuite déclarés dégoûtés par ce non-football des Londoniens qui a pu les mener en finale, au détriment de ce Barça qui joue si bien. Pas d’accord ! A dix sur le terrain du onze le plus technique au monde, y’a pas 36 tactiques mais un unique espoir : celui de tenir le coup en surpeuplant ton rectangle, toute autre option serait prétentieuse et vaine ! Ce qui est comique, c’est que ces mêmes esthètes déçus soient en d’autres circonstances supporters inconditionnels : qu’ils exploseraient de bonheur si leurs Rouches, leurs Mauves ou leurs Diables damaient de la même manière le pion au Barça ou à l’Espagne,…et que la résistance héroïque des leurs supplanterait alors toute considération sur la beauté du jeu !

Ainsi, je vous conseille un chouette roman de David Trueba (*), écrivain espagnol et pote intime de Guardiola : ça relie le foot en particulier à la vie en général, notamment via les aventures d’un jeune fooballeur argentin débarqué à Madrid. Ainsi peut-on y lire qu’ « un attaquant doit inventer l’espace et courir pour l’occuper  » : c’est ce que n’ont pas réussi Lio Messi et les autres face à Chelsea, il faut donc savoir perdre car  » le foot c’est pour les humbles, c’est le seul métier où tu peux mal jouer toute une partie et la gagner, et jouer bien et la perdre « . Sûr que Guardiola va relire le bouquin de son copain…comme devraient le lire tous les coaches, petits et grands, ayant foiré leurs objectifs de la saison !

Car savoir perdre, c’est gagner quelque part… Je vous quitte sur une belle pensée du philosophe Emil Cioran, lequel ne songeait sûrement pas aux coaches en la pondant :  » Toute victoire est plus ou moins un mensonge. Elle ne touche qu’en surface, alors qu’une défaite, si minime soit-elle, nous atteint dans ce qu’il y a de plus profond en nous, où elle veillera à ne pas se laisser oublier, de sorte que nous pouvons, quoi qu’il arrive, compter sur sa compagnie.  » Dieu, que c’est beau, je relis ça chaque fois que je suis battu ! Mais sans l’afficher dans le vestiaire, j’en connais qui seraient capables d’y prendre goût…

(*) Savoir perdre, 2008, éd. Flammarion

La victoire est-elle un mensonge ?

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