Saveur d’éternité

Maria Callas chante l’ Ave Maria au bord d’un ring où Mohammed Ali plane autour de son adversaire avant de le piquer tout en douceur. Spectacle ultime de classe et d’élégance. La performance de l’Ajax du côté de Turin ressemblait à ça. La perfection est de ce monde. Le ballon devient une forme de politesse qui dit dans toutes les langues :  » Merci d’être venu mais le football c’est nous.  » Une forme d’arrogance qui se fait élégance.

Élégance en rouge et blanc fait forcément penser à Johan Cruijff. L’homme, le joueur, l’entraîneur. Le bâtisseur qui a taillé dans le marbre de  » cas rares  » un jeu cousu de fil d’or. En 2010 il a lancé ce projet. En 2019, il doit, de là-haut, pleurer des larmes d’eau bénite. Son Ajax, grâce au jeu, à son jeu, arrive à se mettre largement au-dessus de tout. De tous.

Même du Real Madrid et de la Juventus. Des équipes conditionnées pour gagner. Habituées à maîtriser tous les éléments, toutes les tempêtes liées aux sommets les plus hauts, les plus irrespirables. De ceux que seuls quelques clubs connaissent. Des clubs qui savent comment vaincre, même face à plus forts qu’eux, un soir de 90 minutes.

Remember Real- Bayern de la saison dernière. Des clubs habitués aux petits, voire grands coups de mains, coups de tampon ou coups de sifflets. Ceci quand les choses ne tournent pas comme l’ordre du prestige, de l’argent et des cercles d’influence pouvaient le laisser croire. Même Cristiano n’a rien pu faire. Il ne jouera pas les demi-finales pour la 9e fois consécutive. Le jeu plus fort que tout.

Si on revient sur terre, on constate que la dynamique et la compétitivité maintiennent l’esprit de conquête. Dans son championnat qui ressemble à un cortège de carnaval, l’Ajax bataille ferme avec le PSV cette saison. Pendant ce temps, la Juve s’emmerde en Serie A. Trop fort depuis trop longtemps. Cristiano se repose le week-end puis implose face à un collectif qui en refait un joueur qui dépend des autres. Irréprochable pourtant le Ronaldo. Intouchables, les Ajacides.

Inestimable l’arbitre. Rarement un homme en jaune ne s’est autant mis au service du jeu. Monsieur Turpin a été parfait. Il s’est mis hors contexte pour mieux respecter l’éthique. Cet homme a sifflé la fin de la récréation. De celle où ce sont les plus grands et les plus musclés qui font la loi. Sa grâce a servi la grâce ajacide.

En parlant de grâce, ce terme est il suffisamment puissant pour définir le Man City-Tottenham du lendemain ? Un match où l’on a commencé à jouer au football  » normal  » après 20 minutes et cinq buts. Parce qu’avant, c’était du hors-piste à toutes les altitudes. Un foot hors contrôle qui a offert des sensations rares. Magiques. Que le VAR nous a rendu, un peu plus tard dans le match, tragiques.

Le VAR a rendu justice au règlement. C’est son rôle. On ne va pas revenir là-dessus. Ce genou qui effleure le ballon et met Agüero hors-jeu d’une rotule. L’oeil humain ne peut le voir. Le foot est joué par des humains… Et maintenant, il est jugé par la technologie. Sans elle, City serait qualifié. Mais, encore une fois, Guardiola s’en va. En aller-retour, c’est trop souvent  » retour à casa  » pour Pep.

Plus de finale de Ligue des Champions depuis 2011. Ni avec le Bayern, ni avec City. Tout cela en ayant obtenu les joueurs qu’il avait choisis pour la modique somme de… 812 millions d’euros. C’est pour cela que les coupes seront toujours indispensables au football. En un ou deux matchs, le fossé entre les grands et les petits, entre le pognon et la débrouille est comblé par la foi, la volonté, la générosité. En coupe, pas de rachat possible. T’as pas 35 autres matchs pour corriger. Man City distance largement Tottenham en championnat mais les Spurs sont en demi-finale.

Guardiola a du mal avec cette gestion. À l’aller, il met une équipe en fonction du prochain match de Premier League. C’est là qu’il perd la qualif. Pochettino a gagné la qualif en faisant entrer Llorente à la place de Sissoko. Audacieux et victorieux. Pep est grand mais c’est Mauricio qui ressort grandi de ce match à la saveur d’éternité.

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