Sans verve, des REPROCHES

Bruno Govers

L’Albanais fait le point sur des Mauves bousculés sur le terrain européen et par les médias.

Anderlecht, qui rêvait de passer l’hiver européen au chaud cette saison, doit hélas d’ores et déjà déchanter. Après trois journées à peine en Ligue des Champions, le club bruxellois est dernier de sa poule avec un piètre bilan de zéro sur neuf. A ce train, un rattrapage en Coupe de l’UEFA, qui s’était déjà dérobé aux Mauves il y a un an, alors qu’ils comptaient quatre unités au même stade de l’épreuve, semble lui aussi pour le moins compromis. Pourtant, Besnik Hasi, l’un des meilleurs Sportingmen depuis le début de cette campagne, refuse de verser dans un pessimisme abscons.

Besnik Hasi : Je dis et je maintiens que globalement nous sommes mieux armés qu’à la même époque en 2003. Malheureusement, jusqu’ici, nous n’avons pas encore été en mesure d’exprimer tout ce potentiel. Les nouveaux venus sont toujours dans une phase d’adaptation et d’autres courent manifestement après leurs meilleures sensations. Sans compter que sur la scène européenne, l’opposition est nettement plus corsée. Lyon et le Celtic, ce n’est pas le même calibre que Valence et l’Inter. Quant au Werder Brême, il ne détone sûrement pas par rapport au Bayern Munich. A l’image de ce qui s’était passé voici douze mois face aux Bavarois, j’estime d’ailleurs que nous aurions mérité un point contre les Allemands cette fois aussi. Mais contrairement à l’année dernière, nous ne bénéficions plus, dans le contexte actuel, d’un garçon en état de grâce, comme Ivica Mornar, ou d’un Aruna Dindane, qui faisait lui aussi la différence sur sa classe. Le jour où chacun aura retrouvé toute sa verve, c’est sûr qu’il faudra à nouveau composer avec nous. Comparativement à nos deux premières sorties européennes, je suis d’avis qu’une amélioration était perceptible dans nos rangs mercredi passé. Au plan du jeu, nous avons sans conteste dessiné plusieurs mouvements de très bonne facture. Et nous nous sommes montrés beaucoup plus intransigeants également dans le trafic aérien. Sur ce point, l’adversaire ne nous a jamais pris en défaut. C’est la preuve qu’on progresse pas à pas.

Face au Werder Brême, l’entraîneur a également dérogé au 4-4-2 au profit d’un 3-5-2 qui permet une cohabitation entre Walter Baseggio et Pär Zetterberg à vos côtés. Si ce système est d’application en Coupe d’Europe, beaucoup se demandent pourquoi il n’est pas davantage utilisé sur la scène belge. Pas vous ?

Par moments déjà, dans le passé, le coach avait eu recours à ce schéma et il avait indéniablement porté ses fruits, aussi bien contre le Celtic, à domicile, qu’à l’occasion de notre déplacement à La Louvière, par exemple. Personnellement, je trouve que c’est bel et bien dans cette configuration que l’équipe dispense son meilleur football. Mais je peux comprendre les réticences d’Hugo Broos à l’utiliser à tout bout de champ. Il y a un an, son initiative avait été couronnée de succès face aux Ecossais mais devant le Werder, elle s’est finalement retournée contre nous. Il est vrai qu’il suffit chaque fois de très peu pour faire pencher les plateaux de la balance d’un côté plutôt que de l’autre. Un duel gagné sur l’aile peut être synonyme de succès ou bien de catastrophe. L’année passée, Christian Wilhelmsson avait affolé le flanc gauche du Celtic avant de servir un caviar à Aruna Dindane, qui plia le match en notre faveur. Mais pour le même prix, notre Suédois aurait pu se faire déposséder du ballon et, sur le contre, mettre en péril ses couleurs. Une scène à peu près analogue s’est d’ailleurs déroulée contre le Werder Brême. Quand Glen De Boeck et moi avons vu plonger Vincent Kompany sur la phase qui a engendré le premier but, notre première réaction fut de l’exhorter à ne pas monter. En définitive, il a bien fait de poursuivre son action mais je frémis toujours à l’idée de ce qui se serait passé s’il avait perdu le ballon sur cette phase. Dans ce cas, il y aurait sans doute eu danger dans notre camp. En Coupe d’Europe, toute perte de balle est souvent mortelle.

La faute à la presse

En championnat aussi. Depuis le début de la saison, on ne compte plus les cadeaux que vous avez faits à l’adversaire. Non seulement à la suite de pertes de balle intempestives mais également sur des phases arrêtées. Sans parler des manquements coupables des gardiens. Comment faut-il expliquer cette cascade d’approximations alors qu’il y a un an, Anderlecht faisait figure de long fleuve tranquille ?

L’année passée, notre bonne entrée en matière européenne avait eu un prolongement sur nos prestations en championnat puisque nous avions obtenu le maximum des points en déplacement tout au long du premier tour, tout en ne concédant dans le même temps qu’un partage face au Club Bruges et une défaite contre le Standard. A présent, c’est en quelque sorte le contraire qui se produit : nos performances peu convaincantes sur la scène nationale ont des répercussions en Europe également. Je ne pense vraiment pas qu’il faille pointer un doigt accusateur envers l’entraîneur, car sa méthode est restée la même d’une saison à l’autre. Mais ce qui a changé, en revanche, c’est l’attitude de l’entourage vis-à-vis de nous. Depuis la reprise, j’ai la très nette impression qu’on nous cherche. La presse, entre autres. Depuis trois mois, tout est constamment source de conflit. Je remarque que nous avions deux tout bons gardiens, la saison passée, et qu’à présent ces mêmes garçons sont rongés par le doute. Je ne peux me départir de l’idée que les médias sont, en grande partie, responsable de ce malaise. Je ne vous vise pas, mais je constate que les options, ici, sont remises sempiternellement en question. Quand Tristan Peersman est au goal, on demande pourquoi Daniel Zitka ne joue pas ; lorsque Pär Zetterberg est dans l’équipe, on s’étonne que Walter Baseggio ne soit pas là, etc, etc… Désolé, mais à l’évidence on ne fait pas le même foin à Bruges quand Nastja Ceh est sur le terrain, en lieu et place d’Alin Stoica. Pourquoi fait-on toujours une montagne de ce qui se passe ici, alors que des choix épineux existent ailleurs aussi ? Je me pose la question.

Vous deviez tout de même être content aussi quand les journalistes se demandaient pourquoi Yves Vanderhaeghe avait les faveurs sur vous et vice-versa. Une situation qui ne vous a cependant nullement empêchés de répondre tous deux à l’attente en temps opportun ?

Vous avez tout à fait raison mais Yves et moi avions sans doute la carapace nécessaire. Il n’en va toutefois pas ainsi pour nos gardiens ainsi que pour les jeunes. J’estime qu’ils méritent plus d’indulgence. Surtout les débutants. Franchement, je ne comprends pas l’attitude générale dans ce pays. En tant que footballeur et observateur étranger, je trouve que la Belgique devrait être fière de son équipe nationale, qui a quand même réussi des résultats au-delà des espérances ces vingt dernières années. Dans le même registre, je ne comprends pas, non plus, pourquoi certains s’acharnent sur un garçon comme Vincent Kompany. Au lieu de mettre en exergue son extraordinaire talent, certains préfèrent s’arrêter à des considérations futiles chez lui, comme l’oubli d’une cravate ou encore celui du sac de sport adéquat. C’est risible. S’il sortait tous les jours jusqu’aux petites heures ou s’il s’affichait en état d’ébriété à l’entraînement, je pourrais encore comprendre qu’on le montre du doigt. Mais pas pour les motifs évoqués. Vince est un garçon beaucoup plus sensible qu’il n’y paraît et, pour bien le connaître, je sais que toutes ces histoires lui font de la peine. A choisir, je préférerais que la presse se jette à bras raccourcis sur moi plutôt que sur lui. A près de 33 ans, je suis blindé. Plus rien ne me décontenance. Mais lorsqu’on est encore teenager, comme lui, c’est différent. Certains devraient s’en rendre compte.

Revanche à Bordeaux

Si je vous dis Anderlecht-Stabaek, il y a deux ans, qu’est-ce qui vous vient à l’esprit ?

Une défaite 0-1 et mon remplacement peu après l’heure de jeu, sous les huées du public, par Gilles De Bilde. Et pour couronner le tout, une sortie mouvementée du stade avec quelques trublions qui m’invitaient à retourner dans mon pays (il grimace). Ce soir-là, c’est exact, je n’en menais pas large. J’étais même dans le 36e dessous. A un moment donné, j’ai même broyé du noir, entendu que j’avais perdu tour à tour ma place au profit d’Yves Vanderhaeghe, puis de Junior. Mais le coup de grâce était encore à venir sous la forme de la titularisation de Marcin Zewlakow, au poste de demi défensif, pour le compte du déplacement européen aux Girondins Bordeaux. Mon sang, à cette occasion, n’a fait qu’un tour et, quand je suis monté sur le terrain, à quelques minutes de la fin du match, j’avais la bave aux lèvres. La suite, ce fut une passe judicieuse de Mark Hendrikx pour moi, suivi de mon seul but européen pour Anderlecht. Dix jours plus tard, à l’occasion du match entre Anderlecht et Beveren, j’étais appelé à remplacer Walter Baseggio à quelques minutes du terme. En guise d’accueil, mon nom fut subitement scandé sur l’air des lampions. Depuis ce jour-là, je n’ai plus jamais été pris à partie par le public. Mieux même : certains m’ont présenté leurs excuses, sous prétexte qu’ils s’étaient montrés ignobles envers moi. Ce regain de considération, c’est ma plus belle victoire personnelle à Anderlecht.

Aujourd’hui, il vous reste à convaincre les dirigeants du bien-fondé d’une prolongation de contrat. Où en êtes-vous ?

Nulle part pour le moment. Au même titre que Jan Van Steenberghe et Mark Deman, qui sont dans le même cas de figure. Avec toutes les affaires qui ont émaillé le début de saison, je conçois que la direction ait eu d’autres priorités. Mais il va de soi que j’aimerais être fixé le plus rapidement possible sur mon avenir. Je sais que la concurrence est rude à mon poste, notamment avec un élément d’avenir tel que Junior, mais je suis confiant. Pour se tirer d’affaire à cette place, il faut une certaine expérience. Et celle-là, la jeune classe anderlechtoise ne la possède pas encore. Tous les espoirs me sont donc permis.

Bruno Govers

 » Nos jeunes méritent DAVANTAGE D’INDULGENCE  »

 » A Bruges, ON NE FAIT PAS LE MÊME FOIN quand Ceh joue à la place de Stoica « 

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire