Sans OPPRESSION

En un peu plus de deux ans, le gardien du Sporting est devenu un pilier. Il s’explique à la croisée des chemins.

Cela fait quelques semaines que le fléchissement de Charleroi en championnat se fait sentir. Sans crier gare, le réservoir se vide. Pourtant, il restait le bidon caché. Celui qui demeure dans le coffre et que l’on sort pour prolonger le voyage : la Coupe de Belgique. Mais depuis la semaine passée, ce jerrycan-là aussi est à sec. Le rêve d’un trophée s’est transformé en mirage. A voir la mine de certains joueurs au soir de l’élimination, la catastrophe était grande. Signe des temps, le Sporting ne se satisfait plus du maintien. Il vise haut et une élimination reste un échec. Symbole de ce Charleroi conquérant, Bertrand Laquait, arrivé au club il y a un peu plus de deux ans et devenu à 27 ans le meilleur gardien de notre compétition, ne veut pourtant pas baisser les bras, et pointe déjà le prochain objectif : terminer dans les cinq premiers.

N’a-t-on pas l’impression que la saison des Zèbres s’est achevée la semaine passée au Lierse ?

Non. Cette élimination nous fait très mal mais il faut se ressaisir. On reste en course en championnat et on voudra montrer que l’on n’est pas encore battu. Il nous reste cinq matches à domicile. Gagnons-les et là, il faudra encore compter avec nous ! On est redevenu le petit Charleroi. A nous d’en profiter pour finir dans le top-5.

Mais on peut affirmer que le Sporting marque le pas…

Evidemment que l’on marque le pas. Il suffit de regarder les résultats. Quand vous perdez deux matches et que vous faites un nul la même semaine, ce n’est pas terrible. D’un autre côté, toutes les équipes connaissent un creux sur une saison. On l’attendait en janvier ou février. Finalement, il est venu en mars. La coupure hivernale nous a fait beaucoup de tort. On s’entraînait sans savoir où on allait. Si on avait joué le match retour de Coupe à la date prévue, on se serait maintenu dans le rythme. Dans nos têtes, on a également beaucoup donné.

Comment enrayer cette spirale ?

Baisser les bras, maintenant, c’est la facilité. On a acquis un certain niveau. A nous de montrer qu’on le possède encore. Il faut se raccrocher à des choses simples quand on vit des moments difficiles. Il faut revenir à certaines bases. Il faut simplifier notre jeu. Surtout au niveau mental. Il faut redevenir des guerriers, des compétiteurs tout en restant humble. Il y avait une période où on pouvait centrer du pied droit quand on était gaucher. Cette période est révolue.

Vous parlez d’acquis mais beaucoup de gens parlent de chance en analysant votre premier tour. Vos résultats récents leur donnent raison…

C’est cela qui m’emm… car on ne veut pas que ces gens aient raison. La chance, tu la forges une fois. Quand elle se répète, on ne peut plus parler de cela. Simplement, au premier tour, on se montrait réaliste à la fois défensivement et offensivement. Mais voilà, le réalisme offensif, on ne l’a plus. Les ballons filent désormais sur le poteau et défensivement, on recommence à faire des petites erreurs. De plus, on est redevenu une équipe normale à l’extérieur alors qu’avant, les adversaires se demandaient comment elles allaient s’en sortir face à nous.

Le groupe n’a-t-il pas vu trop grand en jouant sur deux tableaux (Coupe et championnat) six mois après avoir évité la relégation ?

Peut-être que nous n’étions pas assez mûrs pour avoir autant d’objectifs. Nous avons connu deux semaines fatidiques depuis la reprise. Une en janvier et nous en sommes sortis avec les honneurs en accrochant La Louvière et le Standard et en éliminant cette même équipe en Coupe. Par contre, nous sommes passés à côté de la deuxième en s’inclinant devant Anderlecht et en étant sortis par le Lierse. Mais si je dois revenir en arrière, je ne change rien. Le supporter présent contre Mons lors de la dernière rencontre de la saison passée aurait signé à deux mains pour un tel championnat. Nous n’avons été surclassés qu’à Anderlecht. Et pour moi, seule l’élimination en Coupe reste une déception.

Situation nouvelle en Coupe

Une question de maturité ?

Oui, même si, à force de prendre des uppercuts, on va apprendre beaucoup. En Coupe, on a dû gérer une situation à laquelle on n’était pas habitué. On devait marquer un but ou ne pas en prendre un rapidement. Nous ne disposions pas de l’expérience nécessaire pour saisir ce double enjeu. On doit apprendre aussi à être plus méchant, à avoir plus d’engagement pour dicter notre loi à l’adversaire. Surtout quand tout le monde n’est pas à son niveau maximal comme au premier tour.

Justement, le Sporting joue encore trop selon l’adversaire, non ?

Pourtant, on essaie de prendre le jeu à notre compte comme, en deuxième période, contre St-Trond. On grappille un peu de volume de jeu. On tente d’avoir le monopole du ballon et de gagner la bataille de l’entrejeu. Mais cela prend du temps pour assimiler ce système.

L’année passée, vous aviez avoué, en fin de saison, avoir connu un petit creux en hiver. Est-ce encore le cas ?

Pendant six ou sept mois, j’ai eu l’occasion de me mettre en évidence, ce qui n’est plus trop le cas car l’adversaire ne s’octroie plus beaucoup de possibilités. On ne peut, de toute façon, pas passer toute une saison à réaliser des exploits chaque week-end.

Pourtant, on sent qu’il s’agit d’une année de reconnaissance. Les médias français commencent à venir aux nouvelles.

Cela me fait plaisir. Je m’entraîne chaque jour pour être le meilleur. Et le plus difficile n’est pas d’atteindre un certain niveau mais de s’y maintenir. Ceci dit, la reconnaissance, je l’avais déjà en France au début de ma carrière avant que Nancy ne descende en D2. J’avais été élu 3e meilleur gardien de la D1. L’erreur que j’ai commise a été de rester dans le club qui m’avait formé.

Vous partirez de Charleroi au bon moment ?

C’est certain. J’essaie de réfléchir à être au bon endroit au bon moment.

Et où se situera le bon endroit l’année prochaine ?

Je ne sais pas encore. Depuis que je suis ici, je me plais bien. Je prends un plaisir immense à venir, chaque jour. Mais je vais avoir 28 ans et je dois envisager la meilleure opportunité pour progresser. Je tiens aussi à savoir quelles seront les intentions et les ambitions de Charleroi la saison prochaine.

L’avenir est conditionné par l’Europe

Mais est-ce que vous pourriez encore rester à Charleroi ?

Pourquoi pas. J’ai été accueilli à bras ouverts. Je me suis senti immédiatement carolo. Le club a un président ambitieux mais j’ai mes objectifs et j’espère simplement ne pas me planter. Les dirigeants m’ont fait une prolongation de contrat en janvier sur laquelle nous ne sommes pas du tout d’accord. Mais les portes ne sont pas fermées pour autant.

On vous cite à Anderlecht, voire en France où le marché des gardiens semble bouché sauf dans les équipes de bas de classement.

J’aimerais continuer l’aventure en Belgique. (Il réfléchit) Mais c’est tentant de revenir en France par la grande porte. Ce qui est certain, c’est que je n’irai pas dans un club de milieu ou de bas de classement. Mon objectif prioritaire demeure la Coupe d’Europe. Ma décision s’effectuera selon cette donnée. Pourquoi pas avec Charleroi ? J’ai montré jusqu’à présent dans mes choix de carrière que j’aimais bien les projets de construction. Je serai le plus heureux du monde si je pouvais offrir une participation européenne aux Carolos.

Après deux ans et demi, on sent que vous vous êtes vraiment identifié à ce club…

Je me lançais dans l’inconnu quand je suis arrivé. J’ai fait en sorte de réussir en allant vers les autres mais je me suis vite rendu compte que les autres venaient également vers moi. Cela me changeait de Nancy où la mentalité est beaucoup plus sournoise. Le pur Lorrain ne fait pas de cadeau. Soit tu es nul, soit tu es bon. Si après cinq bons matches, tu te loupes, tu tombes parmi les nuls. Ici, j’ai senti que l’on me laissait le temps de prendre mes marques. Et même dans les bonnes prestations, on ne s’enflammait pas. Il n’y a pas ce climat d’oppression.

On pourrait imaginer, plus tard, un retour à Nancy par nostalgie ?

Certainement pas. Je ne pourrais pas me battre et me défoncer pour les gens en place. J’ai été jeté comme un malpropre alors que j’attendais que l’on me tende la main. J’ai été opéré le 4 avril et pendant le restant de la saison, je n’ai pas remis les pieds au club. Personne ne prenait des nouvelles.

Et cette situation ne pourrait-elle pas se réaliser à Charleroi ?

Non, je ne crois pas. Le club l’a déjà prouvé dans le passé avec Aziz Rabbah dont le contrat avait été prolongé alors qu’il était blessé.

Stéphane Vande Velde

 » Charleroi m’a fait une prolongation de contrat en janvier mais nous ne sommes PAS DU TOUT D’ACCORD « 

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire