Saint-Laurent

Tabernacle ! Les Montréalais sont en amour avec LaurinCimin, un chum de Belgique.

L aurent va bien. Très bien même depuis que Diana, son épouse, et les deux petits trésors, Nina (5 ans) et Achille (15 mois) l’ont rejoint à Montréal le 1er mars. C’est que la famille, pour lui, c’est sacré. Elle fut d’ailleurs le fil conducteur de notre entretien. Personne n’ignore plus qu’une des priorités, sinon LA priorité de Laurent, était d’offrir le meilleur traitement possible à Nina, atteinte d’autisme. Et en matière de TED (Trouble Envahissant du Développement), le Canada et le Québec en particulier frôlent l’excellence avec de nombreux programmes provinciaux et territoriaux et des soins véritablement personnalisés par le biais notamment de neuropsychologues, d’ergothérapeutes et d’orthophonistes dédiés.  » Le Canada, c’est le top du top « , explique Laurent.  » Ils ont dix ans d’avance. Et puis, l’environnement francophone était une condition sine qua non.  »

Les pièces du puzzle se sont donc bien imbriquées. Mais, au fait, désirait-il absolument quitter le Standard où il était titulaire indiscutable depuis 2010 ?  » Jouer à l’étranger n’a jamais été un de mes objectifs « , confie-t-il.  » Et l’idée d’un transfert n’est pas venue de moi, mais d’un agent, JeanRousseau. Je n’avais pas de raison sportive ou affective pour quitter le Standard où j’entretenais d’excellents contacts avec mes coéquipiers, le staff et les supporters. J’étais, je pense, appelé à devenir le capitaine de l’équipe. Je ne suis donc pas parti par dépit, mais bien par défi et pour les raisons familiales bien connues. J’avais vaguement parlé de la Major League Soccer américaine avec YohannThuram, notre gardien, mais sans que cela n’aille plus loin.

Je me suis dit : pourquoi pas après tout ? Le train ne passe qu’une fois… À ce stade de ma carrière et à bientôt 30 ans, un séjour à l’étranger était possible sans que cela ne perturbe non plus l’éducation des enfants. C’est ainsi que les contacts se sont établis avec NickDeSantis, le vice-président des relations internationales de l’Impact de Montréal et AdamNick, le directeur technique. Ils m’ont certifié que le club allait tout mettre en oeuvre pour offrir à Nina les meilleures conditions. Leurs discours et leur approche m’ont séduit et la perspective d’une bonne intégration familiale a tôt fait de me décider à franchir le pas et… l’Atlantique.  »

Enfin, pas tout de suite, car pour ne pas éveiller l’attention, déclencher les rumeurs et risquer de tout mettre sens dessus-dessous – nous sommes alors au début du stage du Standard en Espagne – Laurent choisit de ne pas effectuer une visite de reconnaissance. Une décision très altruiste en vérité, tout à son image et à son honneur…

Débuts de rêve

Laurent a mis le cap sur l’Amérique du Nord au lendemain du Clasico de rêve, ponctué d’un superbe but (voir encadré). Il n’aurait pu rêver de plus beaux adieux même si, regrettons-le, ils ont été ternis par certains trublions qui ont incompréhensiblement et maladroitement choisi de conspuer un joueur adverse plutôt que de fêter un des leurs. Le chapitre Standard s’est donc fermé là-dessus.  » Mon bilan de 5 ans avec les Rouches est positif, tant sur le plan humain que sur le plan sportif. J’ai toujours dit ce que je pensais. Parfois ça passait, parfois ça cassait, mais je pense que c’est comme cela qu’il convient de procéder. Je suis fier de dire que mon état d’esprit a toujours été positif et constructif. Au niveau footballistique, chacun des entraîneurs, de DominiqueD’Onofrio à IvanVukomanovic, a contribué à mon développement.  »

Un autre chapitre, excitant et prometteur, s’est ouvert depuis lors.  » J’ai été superbement accueilli par mon nouveau club « , observe Laurent.  » La gentillesse des Québécois n’est pas une légende. Il y a chez eux un naturel chaleureux. On m’a trouvé une maison à l’écart de la ville, mais pas trop loin toutefois du centre d’entraînement. J’ai besoin de cet isolement, de ce calme. Mon équilibre et ma sérénité sont à ce prix.  »

Pour un néophyte de l’expatriation, Laurent s’en sort avec tous les honneurs. Chacune des personnes rencontrées reconnaît sa facilité et sa rapidité d’adaptation.  » Bien sûr que le contexte francophone y est pour beaucoup « , confesse l’intéressé.  » Mais d’un point de vue sportif, cela n’est pas d’application. L’entraîneur, FrankKlopas, ne parle pas la langue et sur le terrain, c’est l’anglais qui prévaut et cela ne me pose aucun problème pour diriger et donner des consignes.  » L’Impact, c’est un véritable melting pot. Un effectif de 31 joueurs de 14 nationalités avec une forte prédominance nord-américaine (10 Américains et 6 Canadiens). Et un total de 10 francophones.

Tout comme ses adieux au Standard, les débuts de Laurent sous ses nouvelles couleurs ont épousé un scénario de rêve. Après avoir été décrocher un très beau nul (2-2) au C.F. Pachuca dans la grande banlieue de Mexico City, le 24 février, Montréal a signé un 1-1 à domicile au retour, le 3 mars. Une soirée historique qui a pourtant failli tourner au vinaigre pour notre défenseur international.

À dix minutes du terme, il a effectivement provoqué un penalty, converti par l’équipe mexicaine. Heureusement pour lui, le jeune attaquant américain CameronPorter (21 ans) est parvenu à rétablir l’égalité à la dernière minute devant 38.104 spectateurs en folie assemblés dans le magnifique stade olympique.

Pas de comédie

Montréal reste ainsi le seul représentant de la Major League Soccer au stade des demi-finales de la Champions League de la CONCACAF ( Confederation of North, Central American and Caribbean Association Football). L’Impact rencontrera le club costaricien d’Alajuelense. La franchise a écoulé 10.000 billets dès le premier jour de la mise en vente. Des billets, soit dit en passant, très démocratiques (80 $ CAN, soit 58 € pour un pack de 4 sésames). En attendant, le club, avec Lolo dans ses rangs, a subi une première défaite devant le club de Washington, D.C. United, 1-0.

Il est toujours délicat, voire dangereux, de tirer des enseignements après trois matches officiels. Mais l’exercice n’en est pas moins éclairant. Les premières impressions trompent rarement. Et Laurent n’est pas le dernier à vouloir les partager.  » Je suis déjà en mesure de dire que le niveau n’a rien à envier au championnat de Belgique. La vitesse d’exécution me semble d’ailleurs supérieure. En Jupiler Pro League, on a le temps, par exemple, de souffler lors des rentrées en touche. Ici, on se rue sur la balle et elle est immédiatement remise en jeu. Le jeu est engagé et viril, mais il me paraît moins vicieux que chez nous. Peu de coups bas, de tirages de maillots, de pertes de temps bidon. Et peu ou prou de comédie ! Quand un joueur reste à terre ici, c’est du sérieux, pas du mélodrame !

Cela fluidifie le jeu et le rend plus plaisant pour le public. Quant à l’arbitrage, j’ai perçu pas mal de favoritisme pour le home team au Mexique. Mon penalty à la maison contre Pachuca était léger. On se mêle les pinceaux avec l’attaquant. Le genre de phase où on peut siffler ou non. Contre D.C. United par contre, j’ai trouvé que le jeune arbitre avait signé un bon match. Techniquement, les joueurs sont bons. Tactiquement, on doit encore travailler. On doit aussi améliorer la circulation du ballon. Mais nous sommes au tout début du championnat et une douzaine de joueurs sont nouveaux. Il y a encore pas mal d’automatismes à assimiler. Mais je suis confiant, on va signer une bonne saison.  »

Contre Washington, dans l’immense RFK Stadium de triste mémoire (Belgique-Arabie Saoudite de la Coupe du Monde 94), Laurent a impressionné par sa faculté d’adaptation, son aisance et son autorité. À le voir et l’entendre positionner ses coéquipiers et diriger sa défense, on croirait qu’il fait partie des meubles depuis de longues saisons. Avec lui à la manoeuvre, les Américains EvanBush (gardien) et DonnyToia et, à droite, les deux  » tours jumelles  » BakarySoumare (Mali) et HassounCamara (France), ça ne nous étonnerait pas que la défense de l’Impact soit une des moins perméables de la MLS.?

PAR BERNARD GEENEN À WASHINGTON – PHOTOS : BERNARD GEENEN

 » Ici, je vois peu de coups bas, de tirages de maillot ou de pertes de temps bidon.  »

 » Je n’ai pas quitté le Standard par dépit mais par défi.  »

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