© ÉMILIEN HOFMAN

RUNE LANGE

Symbole du Club Bruges conquérant de Trond Sollied, Rune Lange a enquillé les buts et les titres lors de son passage dans la Venise du Nord (2001-2006). Revenu en Norvège, il fait désormais dans la dernière passe au sein d’une banque.

Les yeux rivés sur l’entrée du port d’Oslo, Tordenskjold adopte un air sinistre. Pourtant, sous ses airs sanguinaires, cet ancien vice-amiral est un héros national. Tordenskjold a remporté la bataille de Dynekilen et s’est également emparé de la ville de Marstrand et du fort de Carlsten, anciennes places fortes du voisin scandinave, ce qui a poussé les Norvégiens à offrir une statue à ce boucanier du XVIIIe siècle. Bien qu’originaire de la ville portuaire de Tromso, ce n’est pourtant pas dans l’eau que Rune Lange a étalé son efficience, mais sur les terrains de foot.  » J’ai toujours marqué beaucoup de buts « , confirme, boucles rasées, le grand Norvégien.  » Je ne suis pas un talent brut, j’ai dû bosser énormément pour réussir certaines performances. J’ai passé des heures à ponctuer des actions de but. Finir, c’était le mot d’ordre.  » Au total, Lange peut se targuer d’avoir atteint son objectif : en 254 matchs officiels, il a planté 124 roses.

À l’armée avec Aarst

 » J’ai toujours eu conscience qu’en match, je n’aurais peut-être qu’une seule opportunité. J’étais donc ultra concentré. Du coup, je n’avais pas besoin de plusieurs occasions pour me mettre en jambes.  » À 18 ans, c’est ce qui permet au Norvégien de recevoir un premier contrat à Tromsdalen UIL, en D2. À l’époque, le jeune homme fait également son service militaire aux côtés d’un certain Ole-Martin Aarst.  » On a passé du bon temps là-bas, c’était une vraie expérience de rester 24h/24 avec les mêmes personnes. Maintenant, je dois dire que Ole-Martin avait plus de libertés que moi vu qu’il jouait en D1 norvégienne.  » Malgré un horaire dicté par l’armée, Rune enchaîne les performances en club au point d’attirer le regard de scouts étrangers dont celui de Manu Ferrera, alors à Anderlecht.  » Je connaissais l’intérêt des Bruxellois, mais je ne me considérais pas prêt. J’ai donc rejoint Tromso et l’intérêt bruxellois a disparu.  » Brugeois dans l’âme, Rune Lange ?

Le coup de foudre pour la Venise du Nord intervient en tout cas dès sa première visite de courtoisie, en 2001, alors qu’il est sous contrat à Trabzonspor :  » En Turquie, vu la ferveur, peu importe où j’allais, il y avait toujours du monde autour de moi. Alors qu’à Bruges, j’ai directement remarqué que je pourrais me rendre au restaurant ou au pub tranquillement.  » Dès l’officialisation de son transfert actée, le buteur ne s’en prive donc pas.  » Il y avait une toute belle atmosphère dans le vestiaire brugeois : on allait souvent manger ensemble ou en sortie après les matchs… Mais là on quittait Bruges pour aller à Anvers ou Gand, où ça bouge plus (sourire).  »

Dernière grande génération ?

Dans le même temps, sous la houlette de Trond Sollied, le Club Bruges écrase littéralement la concurrence belge et remporte huit trophées en deux saisons.  » C’est peut-être la dernière grande génération qu’a connue le Club « , estime Rune.  » On développait vraiment un très beau football.  » Incontestable avec les Gazelles où il marque un but tous les deux matchs, celui qui se démarque notamment par un excellent jeu de tête n’entre pourtant pas en ligne de compte en équipe nationale norvégienne.  » Je n’ai disputé qu’un amical contre le Pays de Galles.  » À l’époque, la Norvège évolue avec un seul attaquant alors qu’elle n’a probablement jamais eu autant de possibilités offensives, entre John Carew, Ole-Gunnar Solskjaer, Ole-Marin Aarst, Tore-Andre Flo, Steffen Iversen et Rune Lange.  » Je pense que mon profil ne correspondait pas « , nuance néanmoins ce dernier.  » Il fallait un attaquant capable de faire beaucoup de choses sur le front de l’attaque. Par contre, si j’étais arrivé dix ans plus tard, j’aurais été titulaire.  »

Terrains lourds, épargne et Kilimandjaro

Régulièrement présent dans le top 5 du classement des buteurs de D1 belge, Rune Lange le quitte définitivement en 2005-2006 quand ses pépins physiques prennent le dessus.  » En hiver, mon corps épais n’a pas été aidé par les terrains particulièrement lourds.  » Lors de sa dernière saison, le buteur ne participe qu’à quatre bouts de rencontres avant de voir son contrat arriver à échéance.  » Les dirigeants m’ont alors proposé d’attendre mon retour sur les terrains en août. Au cas où je retrouvais la forme, ils étaient d’accord de me prolonger.  » Mais Lange refuse de prendre le risque de se retrouver sans club en septembre. De retour en Norvège, il enchaîne pourtant d’autres blessures qui le forcent rapidement à penser à sa reconversion.  » J’ai finalement commencé en 2009 en tant que conseiller épargne-pension. J’ai beaucoup de contacts avec mes clients, ce qui est un des vrais avantages de ce boulot.  »

Définitivement installé à Oslo avec sa femme brugeoise –  » Elle a appris le Norvégien et est médecin dans la capitale  » – Lange profite d’un environnement professionnel dénué de toute pression et qui lui tient particulièrement à coeur.  » Il faut vraiment être à l’écoute pour voir quels types de risques les clients veulent prendre avec leur pension : je ne veux pas qu’ils placent leur argent s’ils ne sont pas convaincus. En fonction de leur âge et de leur background, j’essaie de leur donner le meilleur conseil.  » Malgré l’une ou l’autre pige effectuée en tant que scout pour le Club Bruges, Lange est désormais éloigné du monde du foot, mais continue de se maintenir en forme. Son prochain objectif ? L’ascension du Kilimandjaro. Loin des mers, histoire de ne pas gêner Tordenskjold.

PAR ÉMILIEN HOFMAN À OSLO – PHOTO ÉMILIEN HOFMAN

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