Rugby et Provence

Après la pluie, le beau temps. Ce dicton vous va!

Frédéric Tilmant (32 ans): Ma carrière résume ma vie: j’ai travaillé sans relâche à l’entraînement. Ma mère a élevé trois enfants seule. Elle a dû s’accrocher. Elle était dure. Elle nous a fait comprendre que dans la vie, il ne suffit pas de claquer des doigts pour avoir ce qu’on veut. Le travail ne me fait pas peur. Pendant huit ans, j’ai combiné le football à un travail de chauffeur-livreur chez Monsieur Gaone. J’espère retrouver cette place après. En fait, je ne sais pas encore ce que je ferai, mais s’il le faut, je travaillerai comme manoeuvre. Quand je jouais en D3, j’étais occupé de 8 h à 21 h. Nous n’avions aucune vie familiale.

Puis vous avez rejoint Gueugnon…

Là, chaque week-end, il y avait de longues mises au vert mais Nancy et moi nous voyions davantage en semaine. Nous y avons conservé des amis. Notamment un couple dont la femme est infirmière et le mari rugbyman. Comme mon frère a créé un club ici, le Rugby Club Coyotte Aldegondois, ma reconversion est toute trouvée! Sérieusement, faire du rugby me permettrait de me défouler. J’aime jouer à l’arraché. Après tout, en D2, on me surnommait Tilmots… Sur le terrain, ma femme me reconnaît parfois à ma démarche.

Quels sont vos loisirs?

Je cours régulièrement. En janvier, certains me trouvaient trop court pour la D1. J’ai décidé de courir. En fait, contrairement à Nancy, moi, je peux répondre sur le terrain. Nous ne sommes pas de ceux qui achètent les CD dès leur sortie mais nous aimons la musique: Nancy écoute Zazie, moi, je préfère Eros Ramazzotti, Michael Jackson… J’aime les films de suspense, les histoires vraies. En général, nous nous concertons avec des amis pour aller voir un film dont l’annonce nous a plu. Nous en profitons pour aller manger un bout. Mais nous pouvons tout aussi bien commander des pizzas et passer la soirée à la maison avec une vidéo. Mes actrices préférées? Avant, Sophie Marceau. Meg Ryan l’a détrônée. J’aime bien Demi Moore aussi. L’essentiel, pour moi, ce sont les amis. Nous jouons au Pictionnary, par exemple. La Playstation m’intéresse moins depuis que nous avons Internet. Sinon, je ne fume pas, je n’aime pas boire ni fréquenter les discothèques. Je suis attaché aux valeurs familiales.

Vous n’attachez pas d’importance à votre apparence?

Non. Parfois, mes coéquipiers rigolent de moi. Buelinckx, qui est coiffeur de formation, me coupe les cheveux. Les vêtements, je n’en ai rien à cirer. Nancy les achète pour moi. Enfin, elle s’en achète trois fois plus (il rit). Je vivrais de la même façon si je gagnais 50 millions au Lotto.

Etes-vous un père sévère?

Plutôt. Nancy est nerveuse, speedée. Moi, j’ai besoin de calme. Je n’aime pas que les enfants fassent du bruit dans les escaliers. Le matin, il n’est pas question qu’ils regardent la télévision avant d’être prêts. Nancy, elle, leur prépare leurs tartines et ils mangent devant la télé. Du coup, Valentine (huit ans) râle quand elle apprend que sa mère va travailler le matin et que c’est moi qui m’occupe d’elle et de Corentin (quatre ans).

Ramenez-vous vos soucis à la maison?

Moins qu’avant! Je regarde moins souvent les matches aussi. Avant, je visionnais mes prestations pour déceler mes fautes. Le foot m’a endurci. le président m’a soutenu dans les moments difficiles. J’ai tout gardé pour moi et j’en suis récompensé. Nancy est plus contente de mon succès que moi. Elle regarde le forum de la RAAL pour connaître l’opinion des supporters.

Vous avez rénové votre maison vous-même?

Disons que j’ai donné un coup de main, quand le football me le permettait. Nous avons acheté cette maison juste après notre mariage, il y a neuf ans. Nous avons aménagé l’intérieur. Il a fallu démolir à peu près tout, refaire l’électricité. Nous devons encore rénover la façade et la toiture. La maison sera finie en même temps que ma carrière…

Comment avez-vous fait la connaissance de Frédéric?

Nancy Vanderbeque (30 ans): Nous fréquentions la même bande de copains, le foot de Leval, le village où nous avons grandi et où nous habitons maintenant. Le déclic s’est produit en 1989.

Vous êtes aide-soignante. Ce n’est pas un métier de tout repos…

Je voulais être accoucheuse mais j’ai interrompu mes études: j’avais changé d’école pour me rapprocher de Frédéric et le nouvel établissement m’a découragée. Je pouvais devenir puéricultrice ou aide-soignante. Toutefois, un projet récent permet de reprendre des études d’infirmière tout en percevant un salaire. Ça me tente. Je travaille à mi-temps dans une maison de repos. Je fais de temps en temps la nuit mais généralement, je travaille de 7 à 11 heures ou de 17 à 21 heures. Mon travail est semblable à celui d’une infirmière, à l’exception des piqûres et des soins palliatifs. Je m’occupe des toilettes, des pansements, des petits déjeuners ou des soupers, en fonction de mon horaire.

Vous êtes en contact avec la mort et la déchance. Ce doit être éprouvant?

Pas là. Nous sommes en nombre suffisant. Le contact avec les personnes âgées est automatique. Nous formons une grande famille. L’année dernière, j’ai travaillé dans un centre fermé pour les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer. Ces gens perdent leurs points de repères. Il faut les guider comme des enfants. C’est moralement dur mais il y a quand même un contact. Nous avions 15 personnes. Nous connaissions leurs goûts. Je suis retournée les voir. Elles m’ont reconnue, sans pouvoir dire mon nom.

Qu’avez-vous retenu de vos deux ans à Gueugnon?

La mentalité des gens, très chaleureux. La deuxième année, nous étions avec les Bettagno. Mais ma région préférée, c’est la Provence. Ça se voit, non? Les gens sont de meilleure humeur quand il fait beau. J’aime les boutiques provençales, les couleurs chaudes, la cuisine, les plages.

C’est votre destination de vacances?

Cette année, ce sera la mer du Nord à cause de la scolarité de Valentine. Peut-être partirons-nous quand même une semaine en last-minute.

Frédéric assume-t-il sa part des tâches ménagères?

Non. Le mi-temps me permet de m’occuper davantage des enfants. Je suis une mère-poule. Frédéric a suffisamment de stress avec le football. Il vit dans sa bulle. Il n’est pas rare que je tonde la pelouse. Je gère tout. Il me fait confiance.

Cuisinez-vous de manière diététique?

Plutôt. Nous raffolons des pâtes. Il est superstitieux: aussi longtemps qu’il joue bien en mangeant un plat bien précis avant un match, il continue. Nous sommes passés du steak, au poulet puis au poisson. Maintenant, ce sont des pâtes au thon.

Vous reste-il des loisirs?

Oui. Mes parents habitent tout près et passent tous les jours. Toutefois, j’ai du mal à me séparer de mes enfants. J’aime rester à la maison, m’occuper d’eux. Mes parents travaillant tous les deux, j’ai été élevée par mes grands-parents. J’ai donc reçu une éducation assez traditionnelle. J’essaie de la transmettre aux enfants mais les temps ont changé: à huit ans, Valentine joue peu avec ses Barbies: elle préfère la radio, la danse… J’adore faire du lèche-vitrines, plus pour le plaisir des yeux que pour acheter. Stéphanie, la femme d’Eric Scalia, et moi partons régulièrement ensemble, à Bruxelles ou à Mons. Parfois, nous laissons les enfants dans l’espace-accueil du Cora. Nous nous retrouvons aussi au football, quand j’en ai le loisir, puisque je travaille un week-end sur deux.

Vous n’adorez pas le football?

Comme Stéphanie, j’y vais pour me marrer. Je préférais la D3. La D1 est un univers très différent. Je téléphone toujours à Frédéric après le match, si je n’y assiste pas. C’est un univers dur. Les gens sont parfois méchants. Chacun a son opinion, bien sûr, mais parfois, je ne peux m’empêcher de répondre, quand j’entends une réflexion en rue. D’ailleurs, c’est pour ça que Frédéric ne fait pas les courses avec moi: mes réactions le mettent parfois mal à l’aise. Il m’arrive de lui dire qu’il devrait réagir. Il préfère répondre sur le terrain.

Corentin sera-t-il footballeur?

Je ne pense pas. Les ballons ne l’intéressent pas. Par contre, il joue du tambour: il s’entraîne pour devenir gille, comme son grand-père.

Pascale Piérard, ,

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