Rotation et autres mystères du foot belge

John Baete

Plus que jamais, on devrait être convaincu que le principe de la rotation – on peut aussi parler de turnover si on est fan de la Premier League – n’est pas du tout adapté à notre football. Les coaches qui en parlent nous donnent souvent l’impression de masquer avec de la poudre de perlimpinpin les actes douloureux de leur fonction : envoyer l’un ou l’autre joueur sur le banc.

La rotation est censée ne pas affaiblir son équipe en remplaçant les éléments dont le rendement laisse à désirer pour cause de fatigue ou de blessure. En théorie, on peut même espérer prévenir les blessures en remplaçant préventivement l’un ou l’autre joueurs. Idéalement, grâce à une bonne rotation de son effectif, une équipe pourra maintenir plus longtemps son meilleur niveau moyen. Comme l’athlète ou le nageur qui gère parfaitement son effort pour obtenir son meilleur chrono. La rotation, c’est du dosage. Sauf qu’en football, il ne suffit pas d’avoir un noyau pléthorique pour pouvoir tirer bénéfice de la rotation.

Les performances découlent toujours directement des joueurs et/ou du système. Les plus fortes équipes possèdent les deux composantes, mais la grosse majorité des coaches doit jongler avec les qualités individuelles et les automatismes du collectif.

Or, aligner le meilleur onze et organiser un système dans les détails est souvent contradictoire. Une équipe peut être totalement dépendante de ses joueurs de qualité, comme le fut au tournant du siècle un Anderlecht qui mourut ensuite à petit feu après les départs conjoints de Jan Koller et Tomasz Radzinski. A l’époque, le système d’ Aimé Anthuenis consistait à leur donner le ballon au plus vite… A Bruges, par contre, l’équipe souffre toujours du départ de Trond Sollied qui avait mis en place un système où tous les joueurs du noyau devaient s’intégrer en remplissant un rôle bien précis sur le terrain.

Aujourd’hui, Frankie Vercauteren essaye de pallier le manque de talent de ses joueurs par la rotation mais il n’y parvient pas par manque d’organisation. En plus, ceux qui ont été écartés font la gueule et un GrégoryPujol appelé à monter au jeu dès l’entame suite à la blessure d’un collègue pendant l’échauffement explique qu’il n’a pas pu prester parce qu’il n’était pas prêt ! A Bruges, Jan Ceulemans n’a jamais pu assurer la continuité du système Sollied et des joueurs brillants dans un canevas bien huilé – comme Gaëtan Englebert, semblent beaucoup moins performants. Avec Sollied, Bruges amenait 20 fois par match le danger devant le but adverse. Actuellement, cette statistique doit être divisée par quatre ou cinq.

Tout est beaucoup plus facile, évidemment, quand on a des joueurs déterminants comme Sergio Conceição et potentiellement Milan Rapaic. Il y a d’ailleurs beaucoup plus de coaches comme Anthuenis (et Dominique D’Onofrio…) que comme Sollied. Frank Rijkaard tombe dans la première catégorie avec ses Ronaldinho et Eto’o et Jose Mourinho dans la seconde.

Alors, en Belgique, quand on ne possède pas de joueurs capables de faire la différence, on ne doit pas penser que la rotation va tout résoudre. A moins d’être un coach très scientifique, ce qui n’est pas donné à tout le monde.

Sur cette lancée, on peut se demander si – privée de gratifications internationales -, la Belgique ne pourrait pas imaginer remporter l’un ou l’autre prix du fair-play. Bart Goor se plaint dans les pages qui suivent qu’Anderlecht a tout juste commis une dizaine de fautes chez lui contre Chelsea. Comment gagner quand on ne met pas le pied ? Albert Cartier – et il n’est pas le seul – trouverait ça hallucinant. Evidemment, en étant très optimiste, on peut penser que c’est grâce à l’arbitrage belge qu’on est si correct chez nous…

Une autre idée pour remporter un prix : n’est-on pas fair-play vis-à-vis des adversaires quand on laisse aussi longtemps en place en équipe nationale un entraîneur qui ne gagne pas ?

john baete

ON EST VRAIMENT TROP SPORTIF ET PAS ASSEZ BIEN PRÉPARÉ

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