© GETTY

Rogério Ceni

Ils n’étaient pas toujours les plus grands, mais on les adulait quand même. Parce qu’ils avaient ce petit quelque chose en plus : de l’humour, un avis bien tranché, voire un côté tragique. Place aux figures cultes du foot. Sous la loupe, cette fois : Rogério Ceni.

27 mars 2011, fin d’après-midi à l’Arena Barueri. L’atmosphère est tendue, comme toujours pendant le Classico Majestoso, le derby entre le Sao Paulo Futebol Clube et le Sport Club Corinthians Paulista. Le Torcida Independente, le fanatique club de supporters de l’équipe locale, rêve depuis plus de quatre ans d’une victoire contre le voisin.

Au repos, le score est de 1-0. La délivrance approche. Surtout quand Fernandinho, le vif ailier de Sao Paulo, est fauché devant le rectangle. Coup franc. Dans la tribune de presse, un commentateur TV se déchaîne.  » Rogério Ceni peut inscrire son centième but pour Sao Paulo.  » Rogério Ceni, un gardien de but.

Il traverse le terrain. L’homme a un début de calvitie, un short noir beaucoup trop long, son maillot est frappé du numéro un.  » Ro-gé-rio, Ro-gé-rio, Ro-gé-rio…  » Subitement, quand le ballon est placé au point indiqué, c’est le silence complet. Il observe le gardien adverse et brosse le ballon de l’intérieur du pied droit dans la lucarne. L’Arena Barueri se déchaîne. Goleiro artilheiro, le gardien-buteur, est une fois encore le héros du match.

Il a déjà 38 ans mais il va encore défendre ses filets pendant quatre saisons. Tantôt en sortant des ballons de tous les coins, tantôt en prenant ses collègues à contre-pied. Rogério est un monument du club, avec 1.237 matches, un record absolu, et 131 buts : 69 du point de penalty, 61 sur coup franc et un au terme d’une combinaison. Son rival le plus proche, le Paraguayen José Luis Chilavert, a inscrit 67 buts.

Ceni a gagné tout ce qui pouvait l’être. Il a été champion du monde avec le Brésil en 2002, sans avoir joué une seule minute, puisqu’il était le troisième gardien, après Marcos (Palmeiras) et Dida (Corinthians). Il a enlevé la Copa Libertadores à deux reprises, trois titres et la Coupe du Mondes des clubs 2005. À l’issue de la finale contre Liverpool, il a été élu meilleur joueur du tournoi. Cette année-là, il a même été le meilleur buteur de son club avec 21 goals, cinq de plus que Marcio Amoroso, qui allait être transféré à l’AC Milan.

Il est resté fidèle à Sao Paulo pendant 23 saisons, toutes au plus haut niveau. Pourtant, ce voyage incroyable a failli ne jamais commencer car, cinq mois avant la date prévue pour sa naissance, le médecin avait conseillé un avortement. Les parents avaient toutefois refusé d’interrompre cette grossesse à haut risque. Rogério a grandi à Sinop, au centre du Brésil. Il a joué dans le but, comme son père Eurides, et en défense du club local.

En 1989, alors qu’il avait seize ans, son club lui a proposé de rejoindre l’équipe première en tant que troisième gardien, pendant quatre mois. Son père lui a opposé un veto.  » Je travaillais déjà à la banque du Brésil. Mon père ne voulait pas que j’abandonne ce travail pour une existence incertaine de footballeur.  »

Peu après, il a été limogé et il s’est provisoirement rabattu sur le football. Les deux premiers gardiens se sont blessés et il a saisi sa chance. Il est devenu titulaire. Dès son premier match, Ceni a arrêté un coup de réparation et a conduit son club, pour la première fois de son histoire, au Campeonato Mato-Grossense, le championnat de l’état.

Une connaissance lui a permis de passer un test à Sao Paulo. Il y est resté et le club lui a attribué une petite chambre à l’Estadio do Morumbi, l’arène qui peut accueillir 72.000 spectateurs.  » Je me levais tous les matins à cinq heures pour pouvoir me rendre au complexe d’entraînement avec l’équipe de nettoyage et de catering.  »

Il n’était que le deuxième choix en U20, jusqu’à ce que le numéro un décède dans un accident de la circulation. La saison suivante, il a pu s’entraîner avec l’équipe A. Il a inscrit son premier but en 1997, sur coup franc, en pleine lucarne. 130 autres allaient suivre …

Bio

NE LE 22 janvier 1973 (46, Brésil)

CLUBS Sinop, São Paulo

CAPS 16

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire