Rêve en mauve

Le brillant stoppeur molenbeekois est prêt à relever un nouveau défi. Un monologue.

Mon rêve est évidemment d’aboutir un jour en Italie qui reste, qu’on le veuille ou non, le championnat le plus relevé au monde. Mais avant d’en arriver là, je suis parfaitement conscient, à 19 ans à peine, que l’une ou l’autre étapes intermédiaires s’impose. La Bundesliga serait un premier pas non négligeable. Mais si j’ai vraiment la possibilité de faire parler mon coeur, c’est à Anderlecht que j’aimerais aboutir dans un futur prochain. En dépit du fait que j’y ai perdu, en Jean Dockx, mon plus ardent partisan, le Sporting aura quand même été le premier à revenir aux nouvelles récemment. J’ai bien l’impression d’avoir confondu tous les sceptiques. A commencer, probablement, par l’entraîneur des Mauves, Aimé Anthuenis, qui ne voyait pas en moi une valeur sûre il y a quelques mois à peine ».

Moumouni Dagano, le plus déroutant

« J’ai toutes les raisons d’être satisfait des prestations du RWDM et de mes propres performances. Je n’ai jamais douté de mes capacités à m’illustrer au plus haut niveau, même si mes débuts auront été laborieux cette saison. En réalité, j’ai voulu trop en faire à ce moment. Avec Patrick Thairet, c’était la même rengaine chaque semaine: nous perdions toujours par le plus petit écart. Conscient de nos lacunes offensives, j’ai eu tort, à plus d’une reprise, de vouloir appuyer la manoeuvre en négligeant ma mission spécifique et prioritaire. L’arrivée d’ Emilio Ferrera aura vraiment été un tournant pour moi. Le nouveau coach m’a fait clairement comprendre que ma place était derrière, comme stoppeur et non comme courroie de transmission. Je me suis d’autant plus facilement rangé à ses vues que, dans l’intervalle, des joueurs comme Marius Mitu ou Mike Origi avaient été transférés. Dès l’instant où j’ai pu me concentrer sur ma fonction en marquage, j’ai le sentiment d’avoir répondu pleinement à l’attente.

Un seul match me laisse un très mauvais souvenir: chez nous contre le Racing Genk. Ce jour-là, j’en ai réellement vu de toutes les couleurs face à Wesley Sonck et, surtout, Moumouni Dagano. Tout avait plutôt mal débuté pour moi: les Limbourgeois avaient pu ouvrir la marque grâce à un ballon qui avait malencontreusement ricoché sur ma jambe. J’avais à coeur de me racheter. Mais les attaquants limbourgeois ne m’en auront malheureusement pas donné la possibilité. Avec eux, Laurent Fassotte et moi étions sans cesse assis entre deux chaises, tant les permutations et les décrochages du duo de pointe étaient nombreux. J’ai franchement souffert comme jamais auparavant face au Burkinabé. Il est, de loin, le joueur le plus déroutant de la D1. Après lui, je citerai mon compatriote et ami Paul Kpaka du GBA.

Honnêtement, je ne comprends pas que les dirigeants du RWDM n’aient pas levé, auprès de Feyenoord, l’option d’achat sur lui, au même titre que pour moi. Ils n’étaient soi-disant pas persuadés de ses qualités de finisseur. Sans doute en sont-ils édifiés à présent. Je maintiens qu’avec lui dans nos rangs, au côté d’ Alexandre Kolotilko, jamais le RWDM n’aurait dû lutter pour son maintien cette saison ».

Etre le meilleur

« Je veux être le meilleur. Cette année, je serais heureux de figurer parmi les cinq nominés au Soulier d’Ebène. La concurrence sera extrêmement rude avec des garçons comme Moumouni Dagano, Aruna Dindane, Paul Kpaka, Patrick Zoundi et j’en passe. Un jour, j’entends être reconnu comme le meilleur Africain de Belgique. Avant de devenir le meilleur tout court… Peut-être certains me trouveront-ils un peu trop présomptueux en avançant tout cela. Mais j’ai pleinement foi en mes possibilités. Et je me fais fort de parvenir au sommet. J’aspire à prendre une éclatante revanche. Je n’oublie pas qu’il y a deux ans, Feyenoord ne voulait pas de moi. Aux dires de son responsable sportif Rob Baan, j’étais irrémédiablement bloqué par Ulrich van Gobbel et le RWDM, en D2 à ce moment, était, à ses yeux, le maximum pour moi. Je me souviens avoir pris congé de lui en lui disant: -Vous baverez quand vous me verrez jouer en Italie un jour.

Quelle que soit l’orientation de ma carrière, dans quelques mois, l’année 2002 est d’ores et déjà réussie car j’ai eu le plaisir immense de retrouver mon frère Kevin, mon cadet de cinq ans, que je pensais disparu à tout jamais. Contrairement à ma mère, qui avait fui la guerre civile en Sierra Leone en se réfugiant en Guinée, Kevin n’avait pas eu cette chance. Ma famille et moi avions cru comprendre qu’à un moment donné, il était tombé entre les mains des rebelles du Front Révolutionnaire Uni et qu’il avait été froidement abattu, à l’instar de milliers d’autres personnes.

Grande fut ma surprise, récemment, quand au beau milieu d’une séance d’entraînement, le réceptionniste du club m’avisa que mon frère se trouvait gare du Nord à Bruxelles. J’ai cru à une blague de mauvais goût et j’ai demandé à l’employé du club que la personne au téléphone lui donne son surnom, que j’étais le seul à connaître. Je l’appelais toujours Pablo. Quand j’ai appris que c’était lui, j’ai quitté mes coéquipiers pour me précipiter le voir. Ces retrouvailles auront été le plus beau jour de ma vie. Imaginez donc qu’il me croyait toujours à Feyenoord et qu’il avait donc pris l’avion à destination d’Amsterdam, puis le train vers Rotterdam afin de me retrouver. Là-bas, on lui avait dit que le RWDM était devenu mon nouveau port d’attache et la suite, vous la devinez…

Kevin habite avec moi et joue en classes d’âge au RWDM à présent. Le but est de réunir toute la famille cette année encore car il croyait que notre maman, notre soeur Haja et le petit dernier, Sydney, avaient été tués. Il va sans dire que ce jour-là, je l’attends avec nettement plus d’impatience encore que ma prochaine destination ».

Bruno Govers, ,

« Pour moi, l’année est d’ores et déjà réussie puisque j’ai retrouvé mon frère »

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