REVANCHE EN LIMBOURG

Comment les deux clubs ont-ils évolué depuis leur match de barrage pour l’Europe de mai dernier ?

C’était le 29 mai dernier. Le soleil venait de produire ses premiers effets caniculaires. Le Standard se rendait au Limbourg nanti d’un avantage acquis lors du match aller à Sclessin (3-1). Pourtant, les troupes de René Vandereycken allaient surprendre en faisant basculer le Standard de son socle européen. En neuf minutes, la rencontre avait déjà pris sa tournure cauchemardesque pour les uns, féerique pour les autres. Genk ajoutait un troisième but en deuxième période et s’emparait du dernier ticket continental grâce à ce succès net et sans bavure (3-0).

Moins de cinq mois plus tard, les deux clubs se retrouvent. Et cette fois-ci, le contexte a changé. Le Standard occupe la tête et Genk a peiné à trouver son rythme de croisière, au point de glisser à la septième place et de connaître une élimination peu glorieuse en Coupe de l’UEFA des £uvres des Bulgares de Litex Lovech. Mais est-ce pour autant que le match sera disproportionné ?

Pour les Liégeois, la victoire contre Bruges a prouvé que le noyau tenait la route. Il convient maintenant de se mesurer à un candidat sérieux en déplacement pour jauger leurs capacités à s’exporter. Une victoire écarterait définitivement Genk de la lutte pour le titre (voire de la deuxième place). Une défaite ne serait pas catastrophique mais démontrerait les limites du groupe.

Tout le monde en convient dans le Limbourg : il ne faut pas comparer le match de samedi à celui du test match. Pourtant, la donne n’est pas tellement différente. A l’époque, Genk n’avait plus beaucoup de chances de décrocher la timbale européenne. Il était condamné à l’exploit. Samedi, les hommes d’ Hugo Broos sont une nouvelle fois poussés dans leurs derniers retranchements.  » On se retrouve dans la même atmosphère que l’année passée « , explique Kevin Vandenbergh.  » On ne doit penser qu’à une chose : la victoire. On ne peut plus spéculer « . En cas de victoire, Genk reviendrait à cinq points des Rouches et se relancerait.  » Si on gagne, on est parti. Car avec un 13 sur 15, la confiance reviendrait d’elle-même. Sans compter qu’il s’agirait d’une victoire sur les leaders du championnat « , ajoute-t-il.

La confiance

STANDARD8/10

Elle est certainement davantage présente dans les rangs du Standard. Leur début de championnat parfait, entaché seulement d’une défaite à domicile face à Beveren, a requinqué un noyau fortement déçu de la tournure du dernier exercice.

 » On est dans la continuité du magnifique deuxième tour de la saison passée « , analyse Dominique D’Onofrio.  » On n’avait raté qu’une seule rencontre : le déplacement à Ostende. Ce qui nous avait contraints de disputer les barrages. Quand on voit aujourd’hui le classement de Genk, cela me conforte dans l’idée que nous méritions plus qu’eux la qualification européenne. Nous avions réalisé de meilleures prestations mais nous n’avions pas réussi à mettre la cerise sur le gâteau « .

Pourtant, les Liégeois ont su rebondir en réussissant, contrairement aux autres années, leur entame de compétition. C’est donc le moral gonflé à bloc qu’ils rallieront le Fenixstadium.  » On a su se dire qu’il s’agissait d’un nouveau championnat et qu’il fallait se fixer de nouveaux objectifs « , explique Philippe Léonard.  » Le groupe a acquis une certaine maturité et on doit pouvoir gérer ce type de rencontre au sommet. On l’a bien fait contre Bruges. A nous de répéter cela « .

La saison passée, que ce soit contre Bilbao, Anderlecht, Ostende ou Genk, le Standard s’était fait remarquer en échouant lors de chaque match capital. Contre Bruges, après un début de calendrier évident, les Standardmen étaient attendus au tournant mais ils ont su se montrer dignes de leur statut de leader.

GENK 5/10

Le début de championnat fut chaotique avec un viatique de quatre points en cinq rencontres mais le neuf sur neuf réalisé en une semaine avait, pensait-on, remis le club sur la voie du succès. L’élimination en Coupe de l’UEFA a coupé l’élan.

 » Les trois victoires d’affilée avaient permis de revenir dans le coup mais l’échec en UEFA fait énormément mal. D’autant plus que l’adversaire n’était pas insurmontable « , lâche Ariel Jacobs.

 » On pensait qu’on était parti après cette bonne passe « , ajoute Vandenbergh.  » Mais le match face aux Bulgares ne doit pas tout remettre en question. On reste sur un bilan de 10 sur 12. Ce qui est positif pour la confiance « .

Le match nul au Germinal Beerschot, réalisé trois jours après la débâcle européenne, n’est pas en soi un mauvais résultat puisque le Standard avait également lâché quelques points face aux Anversois. Il n’en reste pas moins que ce fut deux unités perdues contre le 17e du classement. Le comportement du Germinal Beerschot (renouveau ou difficultés confirmées ?) ces prochaines semaines permettra de dire si ce fut un bon point pris par Genk.

L’ambiance

STANDARD 6/10

Les Liégeois ont réussi à faire le plein de points au mois d’août, à un moment où toute une série de joueurs avait l’esprit ailleurs, vers un transfert lucratif. Finalement, seuls Sambegou Bangoura et Ivica Dragutinovic ont reçu leur bon de sortie. Les autres doivent attendre le prochain mercato. L’enchaînement des victoires et la fin de la période des transferts ont apaisé le vestiaire, uni désormais en vue d’un même objectif. Pourtant, certaines tensions, pour enfouies qu’elles demeurent, n’en sont pas pour autant oubliées.  » On ne s’entend pas tous mais on est professionnel et pour le bien de l’équipe, on sait rester uni « , explique un joueur.

 » Pour le moment, tout va bien au Standard « , ajoute Léonard.

Pourtant, à Sclessin, on sait que la crise n’est jamais très loin de l’euphorie. Une défaite à Genk pourrait fragiliser le vestiaire. D’autant que la suite du calendrier leur propose deux derbies wallon (réception de Charleroi et déplacement à Mouscron)  » Le mois d’octobre sera particulièrement ardu mais on y verra alors plus clair après Anderlecht fin novembre « , assure Léonard.  » De toute façon, on ne pourra tirer qu’un premier bilan, fin décembre, après avoir rencontré chaque équipe « .

GENK5/10

Là aussi, elle n’est pas au beau fixe. Mais c’est principalement dû aux résultats.

 » Avec Koen Daerden, j’essaie de tirer le groupe et de réveiller certains joueurs. Car, il nous manque clairement des leaders, des personnalités capables de bouger l’équipe quand cela va mal « , analyse le capitaine Jan Moons.  » L’ambiance n’est pas très bonne dans les vestiaires. J’étais très fâché après le match contre Litex Lovech. Et déçu. J’ai poussé une gueulante et je suis parti en claquant la porte. Dans cette optique-là, ce n’était pas mal du tout de partir en équipe nationale. Cela permet au noyau de casser la routine et aux internationaux de s’aérer l’esprit de façon à revenir demain, au club avec le moral regonflé à bloc « .

Pourtant, l’atmosphère n’est pas encore trop pesante. Cette équipe a montré qu’elle formait un bloc dans les moments difficiles. Il n’y a pas de conflits d’ego. Et le courant passe bien entre les membres de la direction. Ariel Jacobs et le président Jos Vaessen, même s’ils n’ont pas toujours été d’accord, tirent sur la même corde. Cela peut s’expliquer par le changement de comportement du président qui ne lance plus de propos acides dictés par l’émotion juste après les rencontres. Il se contente désormais de donner de longues interviews réfléchies.

L’entraîneur

STANDARD8/10

L’écart entre le Standard et Genk peut également s’expliquer par la stabilité. Après un retournement de situation, Dominique D’Onofrio a décidé de poursuivre l’aventure avec le club liégeois. Il connaît le noyau et sait en tirer la quintessence en se reposant sur les nombreuses qualités de ses joueurs. Son travail principal consiste alors à créer un climat positif autour du groupe. Ce qui permettra naturellement au talent individuel, en confiance, de s’exprimer.

 » Si cette continuité est certainement un plus pour le Standard, elle ne constitue pas un moins pour nous « , explique Jacobs.  » Il faut une période d’adaptation mais on ne peut pas utiliser cela comme excuse. Nous sommes quand même déjà au mois d’octobre « .

GENK5/10

Il aurait été difficile pour n’importe quel entraîneur de succéder à Vandereycken. Dans la séparation entre le roi René et le club, c’est la direction qui est montrée du doigt. Pourquoi limoger quelqu’un qui a réussi à atteindre l’objectif difficile qu’on lui avait fixé ? Placé sur la sellette durant toute l’année, Vandereycken avait répondu de maîtresse manière. Genk a sans doute évolué en surrégime. Il était inévitable que son successeur n’arrive pas à maintenir la cadence. Le travail d’Hugo Broos ne doit pas être remis en question. Il a apporté un nouveau système (4-4-2) et de nouvelles consignes (un jeu plus offensif).

 » Désormais on joue plus haut « , analyse Vandenbergh,  » Vandereycken nous disait d’être patient et que gagner 1-0 à la 85e minute suffisait. Broos nous demande d’être à fond dès le début de la rencontre et d’effectuer un pressing continu. Il veut que l’on se montre attractif « .

Il est confronté à de nombreuses blessures l’obligeant, chaque semaine, à changer son fusil d’épaule. Pourtant, les piètres résultats ne lui laissent qu’une marge de man£uvre réduite. Alors qu’il semblait avoir retrouvé du crédit, l’élimination européenne a porté un nouveau coup à son image.

 » On l’a toujours laissé travailler dans la sérénité « , commente Jacobs,  » mais vous savez comment cela va. Tout entraîneur est jugé sur les résultats et pas sur son travail de fond « .

Le noyau

STANDARD9/10

On a loué la stabilité inhabituelle des Principautaires mais ils ont quand même perdu un pion essentiel dans chaque ligne : Dragutinovic en défense, Milan Rapaic au milieu et Bangoura en attaque. Cela pourrait leur jouer des tours plus loin dans la saison mais pour le moment, les éléments appelés à les suppléer ont répondu présent. Mémé Tchité (21 ans) s’est imposé comme un des meilleurs attaquants du Royaume. Il trône d’ailleurs en tête du classement des buteurs (avec neuf buts). Quant au Français Mathieu Beda (24 ans), il a montré de bonnes dispositions dans l’axe de la défense.

 » On ne parle pas assez des pertes importantes du noyau « , réagit D’Onofrio,  » mais c’est sans doute parce que l’on a conservé l’ossature, que ceux qui ont remplacé les partants ont su saisir leur chance, et que le groupe possède un magnifique état d’esprit « .

Un seul hic : le flanc gauche. Pendant de nombreuses semaines, Michel Garbini a pataugé comme médian. Son but contre Zulte Waregem et son assist ont occulté la pauvreté de ses prestations. Et quand il fut appelé à descendre au poste d’arrière gauche, ce ne fut guère plus brillant comme en témoignent les deux buts concédés au Germinal Beerschot. Pourtant, le Brésilien dispose d’un très bon pied gauche et d’une belle frappe. Depuis un mois, Dominique D’Onofrio a décidé de miser sur Almani Moreira sur la gauche. Il ne s’agit pas d’un ailier de formation mais le Portugais apporte davantage que son prédécesseur. Cette carence à gauche a obligé les autres joueurs à se tourner vers le côté droit. Ce phénomène avait déjà été remarqué la saison passée. Il n’a fait que s’accentuer.

 » J’essaie d’équilibrer cette équipe mais cela n’est pas toujours facile « , concède l’entraîneur rouge et blanc.

 » J’aimerais apporter un peu plus à cette équipe. A nous de prouver que l’on peut passer par la gauche « , ajoute Léonard.

GENK6/10

Les nombreux pions importants blessés ( Orlando Engelaar, Gert Claessens, Thomas Chatelle, Koen Daerden, Hans Cornelis) ont quelque peu dicté la conduite à adopter. La défense a été modifiée continuellement. Alors que Broos comptait sur Tomislav Mikulic à gauche, il a été obligé de le replacer au centre suite à la blessure de Claessens et à la méforme d’ Eric Matoukou. A droite, le départ de Brian Priske et la blessure de Cornelis laissent un vide.  » Chaque semaine, l’entraîneur a dû changer ses batteries « , dit Jan Moons.  » et l’absence de Claessens nous prive de quelqu’un qui savait mettre toute la ligne arrière en confiance « .

Dans l’entrejeu, Sunday Oliseh doit encore trouver ses marques. Les manquements défensifs l’obligent à jouer trop bas. Tout cela combiné à la blessure d’Engelaar aboutit à un vide créatif au centre. C’est finalement à Daerden qu’échoit cette tâche. Il a montré qu’il savait porter l’équipe à bouts de bras. Quant aux attaquants, ils sont tributaires de la qualité (et de la quantité) des services. Or, comme ceux-ci se font rares, on les voit peu. Bob Peeters manque encore un peu de rythme et Nenad Stojanovic doit encore s’améliorer dans les duels.

Tous ces contretemps ont permis par contre à Broos de miser sur les jeunes. Steven Defour, 17 ans, est considéré comme un des meilleurs éléments de sa génération et a montré de bonnes dispositions comme meneur de jeu. Kenneth Van Goethem (en défense ou comme médian défensif) et Marvin Ogunjimi (attaque) ont également été lancés dans la bagarre.

STÉPHANE VANDE VELDE

 » On doit jouer comme contre bruges  » (Philippe LÉonard)

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