Réussir en bâtissant

Pour le défenseur central du futur champion, l’intégration de nombreux nouveaux au système brugeois est un succès.

Philippe Clement (29 ans), le défenseur central du Club, l’affirme: « Nos résultats pourraient difficilement être meilleurs.Sans notre échec européen, qui conserve un goût amer, nous aurions vécu une saison extraordinaire. Nous essayons de rester concentrés sur le championnat. Avec une telle avance, il faut veiller à ne pas s’endormirsur ses lauriers. Mais on ne commence jamais de match en pensant: il faut marquer quatre buts. Croyez-moi: jamais encore nous n’avons regardé le calendrier pour voir quand nous serions champions. J’espère pour nos supporters que ce sera à domicile ».

Ce sont les joueurs de la saison passée qui ont disputé la majeure partie des matches. Pourquoi réussissez-vous maintenant?

Philippe Clement: D’abord, nous évoluons ensemble depuis un an de plus. Nous savons où les autres courent et comment ils veulent recevoir le ballon. L’entrejeu est aussi plus équilibré. Nastja Ceh a subi une véritable métamorphose. Il fait ses preuves. La saison dernière, à sa position, nous avons tâtonné. Comme au sein de la défense, à cause de blessures et d’autres circonstances. Nous marquons plus facilement aussi. Tout cela est dû à la sérénité et à l’assurance que le groupe a acquises, grâce à l’expérience de la Ligue des Champions. Nous choisissons mieux nos moments. Nous avons également disputé beaucoup de matches amicaux.

Tous les joueurs sont-ils partisans d’un programmesi chargé?

On ne fait jamais l’unanimité. L’entraîneur estime important que nous disputions beaucoup de matches. Les joutes européennes sont plus dures car elles impliquent de longs déplacements alors que les matches amicaux ont lieu à proximité, mais ces derniers apportent toujours quelque chose.

Le football est donc affaire d’entraînement et de continuité.

J’ai joué en Angleterre. Chaque semaine, il y avait un ou deux nouveaux. Le Bruges actuel est la meilleure preuve de ce qu’on peut réussir en bâtissant une équipe. Changer, c’est tâtonner car chaque joueur est différent, même si le système demeure identique. On peut modifier l’occupation de terrain. L’essentiel, c’est la méthode de travail et l’adaptation des joueurs aux différentes tactiques. Cette année, nous avons parfois changé de système sans qu’on remarque d’hiatus dans notre jeu. On ne critique plus notre créativité ni notre vitesse. Tout dépend évidemment des résultats: il y a trois semaines, tout était mauvais à Anderlecht et on dirait que tout est devenu blanc ou noir. Nous perdons à St-Trond en décembre et voilà qu’on parle d’un mois sombre. J’ai l’impression que nous ne sommes plus jugés objectivement. Il devient crucial de savoir soi-même si on joue bien ou non.

Les entraîneurs se plaignent justement de l’incapacité des joueurs à s’auto-critiquer.

Ils sont là pour ça! Mais ça reste entre nous.

Sollied a-t-il évolué en trois ans?

Je ne pense pas qu’on puisse instaurer un système du jour au lendemain. Le groupe a évolué, l’entraîneur a apporté des retouches sur base des erreurs commises. Son approche est restée la même. En semaine, il insiste sur d’autres aspects ou répète des détails que nous avons oubliés.

Certains systèmes vous ont-ils causé plus de problèmes?

La première année surtout, nous avons peiné quand nos trois médians étaient pris par trois adversaires. Nous avons travaillé certains mouvements afin de libérer un homme dans ce genre de situation, avec succès cette année. C’est tout l’art de Sollied: créer des brèches aux bons endroits. Je n’entrerai pas dans les détails, ce serait stupide. Je pense que seuls ceux qui nous suivent chaque semaine parviennent à les découvrir.

Entraîneur et joueurs se sont-ils adaptés les uns aux autres?

Comme toujours quand les résultats suivent. Pour le moment, tout le monde est content que l’entraîneur reste. Qu’y a-t-il de plus chouette que la victoire? Mais regardez Leverkusen: encensé il y a un an, Toppmöller a été limogé.

Aimeriez-vous rejouer dans l’entrejeu?

Je n’en suis qu’à ma deuxième saison dans l’axe de la défense. J’ai encore beaucoup à apprendre. Sollied m’a aligné à différentes positions, même au médian offensif! J’ai pu marquer plusieurs buts mais je pense que je suis davantage un défenseur qu’un médian. Si j’ai récemment inscrit des buts, c’est grâce à l’entraîneur. Avant, je regardais qui était démarqué au lieu de tenter ma chance. Peut-être parce qu’à Genk, nous avions Branko Strupar qui se fâchait quand il n’avait pas le ballon (il rit)! Sollied m’a convaincu que je pouvais marquer plusieurs buts par saison. Maintenant, quand je reçois le ballon, je dispose de l’assurance voulue. D’abord défenseur

Restez-vous davantage en avant sur les phases arrêtées?

Non car la défense reste ma tâche prioritaire. Dès que nous perdons le ballon, je dois redescendre. Je monte moins si nous menons.

Pourquoi le Club a-t-il transféré Spilar?

Je ne sais pas s’il est venu pour jouer à ma place. Compte tenu de la Ligue des Champions, il nous fallait un défenseur supplémentaire, surtout que nous avions eu des problèmes dans ce compartiment la saison précédente. Je m’accommode de la concurrence.

Bruges a une équipe-type. Comment les réservistes le vivent-ils?

On ne se sent pas bien quand on est sur le banc. Il faut se défaire de ce sentiment à l’entraînement et durant les quelques minutes de jeu qui vous sont gréées. Evidemment, la bombe éclate plus vite quand on perd.

Les joueurs ont-ils beaucoup parlé de l’élection de Michel D’Hooghe comme président?

Pas du tout. Nous n’avons pas beaucoup de contacts avec l’étage directorial, mais je pense que tout le monde est content. Michel D’Hooghe connaît le football et il a énormément de contacts. Il est calme et intelligent. Il ne s’épanche pas en déclarations sensationnelles.

Etes-vous sur vos gardes?

Plus qu’avant. Juste après un match, c’est plus difficile car mon taux d’adrénaline n’est pas encore retombé, mais avec les années, on apprend à tourner sa langue dans sa bouche avant de parler.

La saison prochaine, vous êtes directement qualifié en Ligue des Champions. Quelles leçons tirez-vous de la dernière campagne?

Chaque erreur est sanctionnée mais nous le savions. Nous avons entamé la saison avec beaucoup de questions. Il s’est avéré que nous pouvions dominer certains matches. Peut-être pas comme en championnat mais ce ne serait pas réaliste non plus. Quoi qu’il en soit, nous sommes capables de faire le jeu, de nous adapter et de jouer le résultat s’il le faut. Nos matches contre Galatasaray doivent nous insuffler confiance pour l’avenir. Nous aurions pu faire mieux contre Barcelone aussi. Nous avons découvert ce que c’est de courir quand l’adversaire fait aussi bien circuler le ballon. Nous essayons de l’imiter en championnat et ça nous permet de forcer la différence. L’année dernière, nous voulions trop marquer le plus vite possible. Nous manquions de patience.

Peter T’Kint

« On ne regarde pas le calendrier pour voir quand on sera champion »

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