Retour surprise

Après la Turquie, l’Angleterre et l’Ecosse, il joue en Provinciale!

En juin dernier, Michel Ngonge (36 ans) a décidé de mettre un terme à sa carrière et de rentrer en Belgique. Il avait envie de reprendre des études et, en tout cas dans un premier temps, ne pas rester dans le milieu du football. Et voilà qu’en octobre, il accepte de rejoindre Dieleghem Jette. Quitter la Premier League écossaise, après avoir tâté de la Premier League anglaise, pour évoluer en première ProvincialeBrabant, il faut croire que la décision de dire stop au foot n’était pas évidente à assumer.

« Pas du tout », rétorque immédiatement Michel Ngonge. « C’est vrai que cela paraît difficile à admettre mais je ne ressentais plus du tout le besoin de jouer au football. Franchement, c’était encore plus facile que je ne le pensais. Non, je ne me morfonds pas. Je ne suis pas dépressif. J’ai une femme, des enfants, j’ai repris des études, je travaille: autant dire que mes journées sont bien remplies. Si j’ai accepté de jouer à Dieleghem, c’est parce que je suis Jettois d’adoption et que je connaissais plusieurs joueurs avec lesquels j’avais déjà joué en classes d’âge: Lombaerts, Abdelali, Adriaens et Detienne. Avec ce dernier, j’ai débuté à Etterbeek alors que j’avais sept ans. Et puis, il y a aussi René Kruys, le manager. C’est carrément un ami. C’est lui qui m’a interpellé et ce n’est qu’à la quatrième reprise que j’ai accepté pour une saison seulement. Depuis j’ai découvert, l’entraîneur Alain Cneudt, un ancien du RWDM. Sa façon d’aborder le football, m’incite à faire en sorte que le club monte en Promotion ».

Lors de l’arrivée de Michel Ngonge, l’équipe occupait la septième place et, avant la trêve, elle était troisième à deux points des deux premiers. Ces données peuvent faire croire que la montée n’est pas un objectif impossible à atteindre. Et, une fois celui-ci acquis, les dirigeants pourraient bien revenir à la charge, Michel Ngonge se retrouvant dans l’obligation de s’investir encore un peu plus.

« Je n’ai pas demandé à aller là-bas. On ne peut même pas dire que c’est une question d’argent puisqu’ils ne me payent pas rubis sur l’ongle. Depuis que l’on a appris que j’avais recommencé à jouer, j’ai reçu trois offres concrètes de clubs de divisions supérieures. Je peux partir en janvier. Si je suis revenu à Bruxelles, ce n’est pas pour jouer au football, mais pour me lancer dans la vie professionnelle. Comme agent immobilier, j’ai un métier basé sur les relations et, à travers mon équipe, je parviens à me replonger dans Bruxelles. Peu importe le niveau du club, ce qui compte c’est de se retrouver au milieu des gens. La situation est claire et ce n’est même pas la peine de me poser la question: dans ma tête je suis agent immobilier et j’accorde la priorité à mon boulot. A la rentrée, j’ai repris des cours et dans trois ans j’aurais mon diplôme. J’y tiens car je ressens un peu comme un manque le fait de ne pas avoir ce papier. J’ai arrêté mes études de journalisme à l’ULB en première licence pour tout miser sur le football et, il n’y a rien à faire, je dois y arriver au bout de ces trois ans de cours car j’ai été élevé dans une famille où on a effectué des études. Bref, je ne me demande pas ce que je vais faire si Dieleghem monte, je veux d’abord obtenir cette base solide au niveau de l’instruction. »

Réputation de sorteur

Jusqu’à présent, Michel Ngonge n’a fait que jouer au football. Un métier pour assistés qui ne se rendent pas compte des réalités de la vie dans la mesure où les clubs se débrouillent pour que les joueurs en fassent le moins possible pour donner le maximum sur le terrain. Désormais, entre les cours, les visites des immeubles le plus souvent lorsque les candidats acquéreurs ont fini leur boulot, les entraînements et les matches, Michel Ngonge n’a plus qu’un jour pour rester en famille. En Angleterre, il rentrait à une heure, dormait jusqu’au moment d’aller chercher les enfants à l’école aux environs de quatre heures. Lorsqu’il est allé de l’autre côté de la Manche, il avait 31 ans. Deux saisons auparavant, il avait mis le cap sur la Turquie. N’était-ce pas trop tard?

« Non, car c’est seulement à cet âge-là, que je pense que j’ai atteint ma maturité. Je n’ai pas eu quelqu’un derrière moi, un parent ou un manager, pour m’empêcher de faire des bêtises. Ce n’est pas un regret mais cela constitue un handicap même si mes conneries n’ont jamais été dangereuses. Sur un plan purement sportif, je me serais mieux soigné et j’aurais amélioré mon pied gauche ».

Il n’empêche qu’en Belgique, Michel Ngonge a toujours été poursuivi par son image de sorteur. « Ici, quand vous avez une étiquette sur le dos il est impossible de vous en défaire. C’est vrai que le samedi j’aimais aller en boîte, mais je n’ai jamais été accro à l’alcool. Si j’avais été élevé en Angleterre, j’aurais peut-être fait une meilleure carrière. Là-bas, on ne fait pas une histoire quand un joueur se teint les cheveux en blond et qu’il porte une boucle d’oreille. On ne reproche pas aux footballeurs de sortir. D’ailleurs pendant que j’étais à Londres, je me suis souvent retrouvé en compagnie de Thierry Henry, Patrick Vieira et d’autres joueurs de niveau mondial qui étaient de sortie et certains d’entre eux fumaient une cigarette. En Belgique, on ne fait pas toujours la part des choses. J’ai ainsi vu des joueurs s’amener à l’entraînement saouls mais ils n’ont jamais été poursuivis par une réputation de sorteurs ».

« Alles geven! »

Quelle impression a ressenti Michel Ngonge quand il a retrouvé la compétition belge même à un niveau inférieur? « N’ayant jamais joué en Provinciales, je ne peux pas faire de comparaison. J’ai vu qu’il y a pas mal d’ex-joueurs de D2 ou D3 qui viennent pour arrondir leurs fins de mois. D’autres apportent leur expérience, leur sens du placement mais une chose est certaine même quand on vient d’un niveau supérieur, il faut être en bonne condition. Il y a beaucoup de jeunes qui tablent sur leur vitesse d’exécution et, pour la majorité des équipes que l’on rencontre, il n’y a qu’un seul mot d’ordre du début à la fin du match: alles geven! Quant au foot belge en général, j’avoue que je ne l’ai pas bien suivi parce qu’il n’y a pas beaucoup d’équipes qui donnent du spectacle. Je suis allé voir des matches de D1 et c’est vrai que l’on ne voit pas grand-chose. A part Bruges, il n’y a pas vraiment d’équipe qui assure le spectacle. Je crois que c’est également dû à une mauvaise formation. Chez les jeunes, le jeu doit primer sur le résultat. C’est le cas en Angleterre où la pression et le résultat ne viennent que plus tard. C’est le cas aux Pays-Bas également. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si dans les centres anglais on trouve nettement plus de jeunes Hollandais que de Belges. Cette situation ne s’explique que par la différence de qualité de la formation », conclut Michel Ngonge, conscient qu’il ne va pas apporter la solution et qu’il n’a pas de conseil à donner.

Nicolas Ribaudo

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