Racing team

Et si le Top 6 n’était finalement pas une hérésie pour les Limbourgeois ?

Ostende, son Casino, le Soulier d’Or, les stars, les paillettes… Charleroi, trois jours plus tard, son Mambourg désert, ses nobodies : le Sporting reçoit Genk dans une ambiance de mortuaire, ce sont les deux seuls clubs dont aucun joueur n’a pris le moindre point au Soulier d’Or. Deux équipes malades dont les nouveaux coaches, Tommy Craig et Frankie Vercauteren, n’ont encore rien apporté de concret.

En fin de soirée, ça continue à pleurer à Charleroi et ça commence enfin à rigoler un peu à Genk. Première victoire de l’ère Vercauteren, premier succès de l’équipe depuis plus de deux mois.

Le parcours de Genk, avec son budget frôlant les 20 millions d’euros, est une vraie misère. Même s’ils ne viennent pas tous de pays du top (Belgique, Israël, Burundi, Hongrie, Cameroun, Tchéquie), il y a quand même une petite dizaine d’internationaux dans le noyau. Hein Vanhaezebrouck et son sacro-saint 3-4-3 s’y sont cassé les dents. Vercauteren a été appelé en décembre pour sauver la sauce. Après trois défaites et deux nuls (en comptant l’élimination en Coupe de Belgique contre Roulers), la victoire à Charleroi permet au coach de penser à nouveau à l’objectif qu’il avait avoué au moment de sa désignation : la qualification pour les playoffs I.

Le point sur le nouveau Racing.

L’homme Vercauteren semble avoir changé

Quand on observe aujourd’hui Vercauteren, on a du mal à reconnaître celui qui a entraîné Anderlecht et les Diables Rouges. Celui qui portait toujours le masque, s’isolait et ne riait jamais. Il n’est plus sur la défensive, que ce soit aux conférences de presse ou lors des interviews. Au bord du terrain aussi, il est différent. Maintenant, quand un de ses joueurs sort en cours de match, il s’avance vers lui et le félicite : ce qu’il n’avait pas l’habitude de faire quand il était sous pression. Et il tape sur les fesses des réservistes qui se préparent à monter au jeu !

Le coach a aussi évolué

Sur le banc aussi, on voit un autre Vercauteren. Il ne passe plus son temps à griffonner des pages entières de notes sur un petit calepin, comme enfermé dans son petit monde. Et il a arrêté d’être hyper maniaque. A Anderlecht, il s’entourait d’une équipe à n’en plus finir : un psychologue, un diététicien, un media trainer, un ceci et un cela. Ses séances de théorie étaient interminables, ce qui fatiguait les joueurs. Il exigeait que ses hommes connaissent tout sur tout le monde dans l’équipe d’en face. Il n’en demande pas tant aux joueurs de Genk. Il a aussi laissé tomber ses séances de team-building qui ont parfois fait rire. Lors du stage de début janvier à la Côte, il n’a imposé que du vélo et de la course à pied. Back to basics.

Son état d’esprit lors de son retour en D1

Quand il a été présenté comme nouvel entraîneur de Genk, Vercauteren n’a pas donné l’impression d’être toujours marqué par la fin difficile de ses aventures à Anderlecht et chez les Diables. Le discours était celui d’un homme qui avait retrouvé toute son envie :  » Il y a énormément de potentiel dans ce club. L’ambition est toujours de terminer dans les six premiers. Ce ne sera pas facile mais c’est réalisable. Même si on connaît sans doute déjà cinq qualifiés et qu’il y aura donc beaucoup de déçus. « 

Il a avoué qu’il était temps pour lui de retrouver du boulot après une période où il n’avait plus pratiqué que des activités qui l’amusaient (golf, tennis, cyclisme) et pendant laquelle il n’avait pas toujours été facile à vivre pour ses proches. Et il a été à deux doigts de tenter une aventure dans un autre pays :  » Au début, je me suis surtout focalisé sur l’étranger. J’ai reçu plusieurs offres : d’Arabie Saoudite, de Chine, de Roumanie, de Tunisie. J’ai aussi discuté avec Lokeren. En Belgique, il est possible de faire du bon boulot dans des clubs qui ne font pas partie du Top 5. « 

Travailler au bout du monde, ce sera peut-être pour plus tard :  » Dans quelques années, mes enfants seront indépendants. Lors de la Kirin Cup par exemple, j’ai vu qu’on travaillait bien au Japon.  » Et une note d’humour pour terminer :  » Chaque entraîneur rêve de travailler au Real mais je reste réaliste. « 

Genk veut Sollied puis prend Vercauteren : étonnant

Après le C4 de Vanhaezebrouck, Genk a négocié avec Trond Sollied mais il n’y a pas eu d’accord. A ce moment-là seulement, la direction s’est rabattue sur Vercauteren. C’est surprenant de s’intéresser à deux entraîneurs aussi différents, dont le seul point commun est l’expérience. Avec le Norvégien, les joueurs sont censés se discipliner eux-mêmes, il y a peu de consignes en dehors du terrain, le système (4-3-3) ne varie jamais et les points forts et faibles de l’adversaire sont à peine abordés lors des théories. C’est tout le contraire avec Vercauteren qui tient ses hommes en permanence, fait varier les occupations de terrain et détaille systématiquement les qualités et défauts de l’équipe d’en face. A Charleroi, il a innové en lançant un 4-4-2 :  » Je n’ai pas un système prioritaire. Pour ce match, j’estimais que c’était avec ce 4-4-2 que nous avions le plus de chances de faire mal à Charleroi. Rien ne dit que nous jouerons encore de la même façon lors du prochain match. J’aime surprendre, je ne veux pas que l’adversaire sache à l’avance comment nous allons jouer. Je continue aussi à m’adapter à l’équipe d’en face. Pas en priorité pour casser son jeu mais pour mettre plus de possibilités de notre côté.  »

Des stars au placard

Où est le Fabien Camus de Charleroi ? Le Français était titulaire samedi mais il a confirmé ce qu’on voit de lui depuis le début de la saison : il n’est nulle part. Il n’accélère plus, ne dribble plus, ne distribue plus, ne frappe plus au but. Vercauteren comptait peut-être sur le contexte particulier de son retour au Pays Noir, espérait sans doute que ce match pouvait le relancer. Mais ce fut un nouveau flop.

Camus s’est déjà fait titiller par Vercauteren. Lors du match au Germinal Beerschot, fin décembre, il était monté au jeu après une demi-heure et avait été sorti après moins d’une heure. Un affront mais d’autres joueurs sont dans le même cas. Par exemple Elyaniv Barda. L’attaquant israélien n’est plus que l’ombre de lui-même. Avant cette saison, il n’était pas loin d’une moyenne d’un but tous les deux matches. Il était même passé in extremis à côté de la couronne du meilleur buteur du championnat en 2007-2008. Mais cette fois, il n’a encore marqué qu’une seule fois. Barda, c’est le capital dans le noyau de Genk. C’est l’un des joueurs les mieux payés de la Pro League (on cite près d’un million par an) et il est sous contrat jusqu’en 2013. Mais Vercauteren n’hésite pas à le laisser sur le banc. A Charleroi, il a joué cinq minutes. Pour lui, la sale histoire se prolonge donc.

Il n’avait déjà plus la confiance de Vanhaezebrouck. Et il ne comprenait pas les conceptions de ce coach :  » Dans son 3-4-3, je ne trouvais jamais mes marques. Je jouais une fois à gauche, une fois à droite, jamais en pointe, la position qui me convient le mieux. Pendant le premier tour, j’ai même envisagé de m’en aller très vite. Parce qu’un international ne peut pas se permettre de rester longtemps sur le banc. Chaque fois que je retournais en Israël, je marquais. Mais quand je revenais à Genk, plus rien n’allait. Et surtout, qu’on ne m’accuse pas de me reposer sur mon bon contrat : pour gagner beaucoup d’argent ici, je dois jouer et l’équipe doit prendre des points. Si ce n’est pas le cas, mon contrat n’est pas exceptionnel. « 

Barda pense que le vent va rapidement tourner :  » Vercauteren ne pratique pas le même système que Vanhaezebrouck et beaucoup d’autres choses sont différentes avec lui. Nous nous entraînons différemment, en jouant beaucoup de petits matches à un rythme très élevé. Il a fait revenir la sérénité dans le groupe. Avec Vanhaezebrouck, je voyais des joueurs très tendus, qui ne jouaient plus de façon libérée. « 

Barda doit encore convaincre Vercauteren qu’il mérite de revenir dans l’équipe. Pareils pour Balazs Toth, le rugueux médian hongrois. International, comme Barda. Il a disputé près de 30 matches la saison dernière mais lui aussi était sur le banc samedi dernier.

Un autre pilier qui a du souci à se faire : Davino Verhulst, titulaire indiscutable en début de saison mais auteur d’un premier tour calamiteux. Ce gardien n’arrive pas à la cheville de deux autres que Genk a (de façon incompréhensible) laissé partir presque en même temps : Logan Bailly et Sinan Bolat. Depuis quelques matches, Verhulst est sur le banc et c’est le Hongrois Laszlo Köteles qui joue. Verhulst fut le héros malheureux de l’élimination en Coupe par Roulers, Vercauteren affirme qu’il l’a retiré de l’équipe pour le protéger suite à toutes les critiques lues et entendues après ce soir-là, et Köteles semble entre-temps s’être installé pour un bon moment dans le but.

Ogunjimi, le seul attaquant qui marque

Marvin Ogunjimi, auteur d’un but à Charleroi, est le seul attaquant de Genk qui fait une bonne saison. Il en est à six goals (plus un en Coupe de Belgique). Le deuxième meilleur réalisateur est un médian : Daniel Tözser. Les autres buteurs réguliers ne sont pas des attaquants : Thomas Buffel, Torben Joneleit, Joao Carlos. Barda n’est donc pas le seul avant en pleine crise de forme ou qui connaît des soucis de santé. Stein Huysegems et Istvan Bakx n’ont pratiquement pas joué depuis le début de la saison, Moussa Koita a été souvent sur le terrain mais ne marque pas.

Alors, tout un club mise à fond sur son dernier transfert : l’international ghanéen Samuel Yeboah, neveu de l’illustre Tony Yeboah. Il vient d’arriver de l’Hapoel Tel-Aviv, dans le championnat israélien. Il a déjà été meilleur buteur des championnats du Ghana et d’Israël. Il ne connaît pas encore le championnat de Belgique et souffre de l’épaule mais, face à la faillite actuelle, Vercauteren l’a titularisé à Charleroi. Yeboah n’a pas fait un mauvais match, même s’il a raté une occasion cinq étoiles. Vercauteren est content de lui :  » Il nous apporte de la profondeur dans le jeu, une chose qui nous manquait. Il sait aussi conserver un ballon et il permet ainsi au reste de l’équipe de respirer dans des moments difficiles. Il peut nous donner beaucoup de choses. Son intégration se serait sans doute un peu accélérée s’il avait marqué dès son premier match.  »

Yeboah ne sera peut-être pas le seul renfort du mercato d’hiver. En fin de semaine dernière, Vercauteren est encore allé scouter un joueur à l’étranger et d’autres voyages sont à son programme avant la fin du mois.

par pierre danvoye- photos: belga

« Barda et Toth sur le banc, Camus en sursis : pas de pitié pour les grands noms. Vercauteren a arrêté d’être hyper maniaque. »

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire