QUI L’EûT CRU ?

Le parcours des Hurlus sur le chemin de l’apothéose. Témoignages des acteurs.

Voilà donc Mouscron en finale pour la deuxième fois de son histoire, au terme de ce que son capitaine SteveDugardein avait lui-même qualifié de  » saison de m…  » : démission de RolandLouf, limogeage de GeertBroeckaert puis de PaulPut… Lorsqu’on analyse le parcours des Hurlus, on se demande pourquoi les clubs (et le public) négligent autant cette épreuve qui constitue, réellement, le chemin le plus court vers l’Europe. Pour disputer l’apothéose et, peut-être, se lancer dans une nouvelle aventure européenne, l’Excelsior n’a eu besoin que de six matches : un contre un club de D3 (Torhout), un contre un club de D2 (Mons), deux contre une équipe de bas de classement de D1 (Beveren) et deux contre une équipe de milieu de classement de D1 (Charleroi). Le raisonnement eût d’ailleurs été le même pour le Sporting si celui-ci s’était qualifié : il s’était, jusque là, farci le VG Ostende, Louvain, Saint-Trond et Mouscron.

12.11.05 : Mouscron-Torhout 2-1

L’aventure en Coupe de Belgique débuta par une confrontation face à un cercle flandrien de D3 dans un Canonnier quasiment désert. Mustapha Oussalah était, à l’époque, le flanc gauche attitré de l’Excel.

Mustapha Oussalah :  » On ne se doutait évidemment pas, en montant sur le terrain ce soir-là, que c’était le début d’une belle aventure. Les premiers matches de Coupe de Belgique, on les joue parce qu’ils figurent au programme, sans trop penser à la suite. C’est à partir des quarts de finale, voire des demi-finales, qu’on commence à se dire qu’on a peut-être un beau coup à jouer dans l’épreuve. Affronter Torhout dans un stade quasiment vide, ce n’est pas nécessairement motivant, mais pour moi, cela ne change rien : je joue tous les matches de la même manière, qu’on dénombre 10.000, 100 ou… un supporter dans la tribune. Pour moi, le parcours allait s’arrêter de manière abrupte le 21 janvier, sur la pelouse de Lokeren. Certains me disent que je pourrais être rétabli pour la finale, d’autres me répondent que ce sera trop tôt. J’essaie de ne pas me poser la question. J’en suis toujours aux exercices en piscine et en salle, sur des appareils spécialisés. Dans une ou deux semaines, si tout va bien, je pourrai recommencer à trottiner. Le 13 mai, quoi qu’il arrive, j’irai encourager mes partenaires. Pour la saison prochaine, on verra bien. Je suis simplement prêté pour une saison à l’Excel. En principe, je retournerai donc au Standard. Mais on n’en est pas encore là « .

21.12.05 : Mouscron-Mons 2-1 a.p.

Le derby hennuyer des huitièmes de finale avait encore des relents de D1 : quelques mois plus tôt, l’Excel avait assuré son maintien au stade Tondreau, précipitant du même coup la chute des Dragons à l’étage inférieur. Christophe Martin remplaçait Patrice Luzi entre les perches en Coupe.

Christophe Martin : » Ce match s’inscrivait, pour moi, dans la lignée d’un très bon mois de décembre. J’avais déjà été titulaire contre Bruges et le Lierse. Contre Mons, on est passé par le chas de l’aiguille. Je suis sorti vainqueur d’un face-à-face avec AlessandroCordaro et les Dragons ont loupé la conversion d’un penalty qui aurait pu nous amener à la loterie des tirs au but. Mais c’est cela aussi, la Coupe. Pour Mouscron, à l’époque, l’épreuve était surtout considérée comme un moyen de se changer les idées ; d’oublier, l’espace d’une soirée, le stress engendré par la lutte contre la relégation. Aujourd’hui, on voit où cela peut nous mener. Ce fut dur, pour moi, de me rasseoir sur le banc en janvier car j’estimais qu’on ne pouvait rien me reprocher pendant mon intérim. Aujourd’hui, je dois reconnaître que PatriceLuzi a pleinement justifié la confiance que le coach lui a témoignée. J’espère qu’il aidera l’équipe à remporter la finale. Chaque footballeur est un peu égoïste, mais lorsqu’on pratique un sport collectif, il faut pouvoir se mettre au service de l’équipe. Et si l’on gagne le 13 mai, je pourrai dire que j’aurai eu, moi aussi, ma part de mérites dans la conquête du trophée « .

25.01.06 : Mouscron-Beveren 0-0

Paul Put venait de déposer ses valises au Canonnier. David Grondin avait été intronisé flanc gauche, pour pallier le forfait d’Oussalah, gravement blessé quelques jours plus tôt à Lokeren.

David Grondin : » Je préfère la place d’arrière gauche, mais si l’entraîneur estime que je peux lui être utile en milieu de terrain, je m’y plie de bonne grâce. Ce soir-là, l’un de mes envois s’est écrasé sur le cadre du but. Ce fut l’une des rares occasions que s’était créé l’Excel dans un match très fermé, où l’on a évité de prendre trop de risques. Les consignes de Paul Put étaient claires : il fallait, d’abord, éviter d’encaisser, car comme en Coupe d’Europe, les buts inscrits à l’extérieur sont prépondérants en cas d’égalité sur l’ensemble des deux matches. Beaucoup d’observateurs avaient fait la fine bouche au terme de ce match aller, mais au bout du compte, la tactique utilisée s’est révélée payante. On était persuadé qu’on avait les moyens de marquer au Freethiel. En ce qui me concerne, ce rendez-vous me tenait à c£ur car j’avais porté le maillot de Beveren quelques années plus tôt. En outre, j’avais loupé le match de championnat contre mon ancien club à cause d’une suspension. A mon époque, les Ivoiriens n’étaient pas encore majoritaires à Beveren. Il y avait encore quelques Belges, quelques Français et quelques Anglais. C’était difficile d’obtenir une cohésion : les mentalités et les conceptions du football étaient trop différentes. Les Ivoiriens sont plus à l’aise lorsqu’ils se retrouvent entre eux. Je m’apprête à disputer ma deuxième finale. La première, c’était en Ecosse : avec Dunfermline, j’avais été battu par le Celtic Glasgow « .

08.02.06 : Beveren-Mouscron 0-2

L’Excel disposait d’un atout supplémentaire pour aborder le quart de finale retour : Marcin Zewlakow était revenu de Metz et rejouait pour la première fois avec les Hurlus sur un terrain qu’il connaît comme sa poche.

Marcin Zewlakow : » Je n’étais pas certain du tout de commencer le match. Quelques jours plus tôt, l’équipe s’était imposée 0-5 à Westerlo. On a coutume de dire qu’on ne change pas une équipe qui gagne et il eût été logique que Paul Put fasse confiance aux attaquants qui avaient forgé l’exploit en terre campinoise. Il a malgré tout choisi de me faire débuter et j’ai tout donné pour le remercier de sa confiance. Je suis sorti du terrain à un quart d’heure de la fin, lessivé, car j’avais peu joué avec Metz et ma condition physique n’était pas encore optimale, mais avec la satisfaction du devoir accompli. On a eu la chance de marquer assez tôt, et comme on dit en polonais : cela a mis un peu de vent dans les voiles. J’ai eu un pied dans les deux buts. Ce fut une satisfaction supplémentaire. Le fait d’enfiler le maillot mouscronnois sur le terrain où tout a commencé pour moi en Belgique était symbolique également : d’une certaine manière, je revenais chez moi « .

21.03.06 : Charleroi-Mouscron 0-1

Les Hurlus ne partaient pas favoris dans ce nouveau derby hennuyer. Geoffray Toyes, qui devait se contenter d’un rôle de réserviste depuis plusieurs semaines, remplaçait Olivier Besengez au pied levé.

Geoffray Toyes : » Je m’étais préparé pour ce match avec le même sérieux qu’habituellement et avec, en plus, l’envie de démontrer que l’on pouvait toujours compter sur moi. Cette situation de remplaçant n’est pas facile à vivre. J’estime encore que ma place est toujours sur le terrain, pas sur le banc, mais je respecte la décision du coach. On n’avait pas décidé volontairement de mettre la pression sur Charleroi, en se faisant passer pour les outsiders. C’était simplement le reflet du classement. Cela ne nous a pas empêchés de jouer crânement notre chance. On aurait pu l’emporter 0-3 et on craignait de regretter ce gaspillage d’occasions trois semaines plus tard. Heureusement, il n’en fut rien. Depuis quelques semaines, on a retrouvé une grande solidarité. Désormais, tout le monde défend, y compris les attaquants et les milieux de terrain, et cela soulage énormément le travail des défenseurs. Ce sera ma quatrième finale. Malheureusement, j’ai perdu les trois premières. J’ai bon espoir d’enfin vaincre le signe indien : l’adage jamais deux sans trois est dépassé, dans mon cas « .

11.04.06 : Mouscron-Charleroi 1-1

Les rôles étaient inversés. Dans ce match où Mouscron avait cette fois tout à perdre, Besengez abandonnait ses partenaires à 20 minutes de la fin… sur un malentendu.

Olivier Besengez : » J’avais signalé au banc que je ressentais une gêne aux adducteurs. GilVandenbrouck a compris que mon remplacement s’imposait de manière urgente. J’aurais encore pu tenir le coup, mais finalement, c’est peut-être mieux ainsi : je n’ai pas hypothéqué ma fin de saison. On a parfaitement respecté les consignes durant le match. On a bien cadenassé l’accès à notre but, tant dans l’axe que sur les flancs. JeanPhilippeCharlet, par exemple, a fait un travail remarquable face à Orlando. Si on a laissé la possession du ballon aux visiteurs, ceux-ci se sont créé très peu d’occasions. Il fallait aussi essayer de faire diversion en recherchant la profondeur. Là aussi, on a parfaitement joué le coup, puisque PatrickDimbala a ouvert la marque. On a peut-être, inconsciemment, reculé un peu trop, et on a tremblé pendant dix minutes en fin de match, mais sans conséquence néfaste. Pour moi, disputer une deuxième finale à 34 ans est inespéré. Surtout compte tenu des circonstances : voilà deux saisons que l’on doit lutter contre la relégation. Au bout du compte, 2006 pourrait se révéler un excellent cru malgré tous les problèmes rencontrés : en championnat, une 10e place demeure tout à fait à notre portée.

DANIEL DEVOS

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