Qui dit quoi ?

Le directeur général et le directeur sportif se défendent des critiques et donnent une idée des incompréhensions existant entre eux.

Mons est constamment mis sur le gril. Tellement que le président Dominique Leone a décidé de ne plus parler à la presse tant que son club n’est pas sauvé. Le directeur général Alain Lommers et le directeur sportif ad intérim et vice-président de l’ASBL, Geo Van Pyperzeele, ont, eux, accepté de jouer le jeu.

Lommers :  » Geo est le dépanneur de service « 

Comment expliquez-vous que Mons renvoie une image de cacophonie générale ?

Alain Lommers : Car, au lieu de s’adresser aux personnes compétentes, les gens préfèrent écouter les rumeurs de couloir. Ici, en interne, tout a toujours été très clair. Regardez l’organigramme du club ( NDLR : il sort une feuille de son bureau). Il y a un président de qui dépend un directeur général, de qui dépendent toute une série de personnes, dont la cellule sportive. Aucun document ne quitte le club sans que je ne le signe.

Sur papier, c’est bien beau mais comment expliquez-vous que dans ce club, on a l’impression que tout le monde donne son avis sur tout ?

C’est lié au système. Il y a un entraîneur mais dans la tribune, chaque spectateur donne son avis. Sans connaître les difficultés à acheter les joueurs. Nous, on a décidé de gérer le club comme une entreprise. C’est parfois difficile à comprendre pour certains. Tout rentre dans un budget et on fait en sorte de ne pas le dépasser.

Comment éviter que chaque membre du club ne donne son avis ? Comment faire en sorte que tout le monde respecte la même ligne directrice ?

Chacun doit se limiter à ses possibilités et à ses pouvoirs. Mais vous savez, il y aura toujours bien un entraîneur, un adjoint ou un recruteur qui croira qu’il peut donner son avis sur tout.

Parfois, même le directeur technique tient un autre discours que celui de la direction ?

J’ai expliqué à Geo qu’il était le dépanneur de service. Le fait qu’il intervienne est une bonne chose pour nous. Il connaît le football, il a son diplôme d’entraîneur et est de la région. Mais comme il n’est pas salarié, ni rémunéré, il n’est pas sous l’emprise de l’entreprise. Et c’est là qu’on risque des dérapages. Après certains matches, il pourrait répondre de manière disproportionnée. Car il est extérieur à la gestion journalière du club. Il est conscient de cela…

C’est pour cette raison qu’il conviendrait de nommer un directeur technique à temps plein…

Mais Jean-Paul Colonval était ici tous les jours. Et cela lui arrivait, sur le coup de l’émotion, de dévier dans la presse.

Et il ne vous arrive pas de recadrer les langues trop pendues ?

En période de transferts, nous avons une réunion du comité sportif chaque semaine. Et une réunion de la cellule administrative tous les jeudis. Et là, on recadre certains positionnements. Par exemple, pour le moment, on a un problème avec le nombre de gens qui ont accès aux couloirs des vestiaires après les matches. Contre Dender, on ne savait même plus où étaient les joueurs. Normalement, seule la presse télévisée a le droit de se trouver là mais tous les journalistes viennent dans les couloirs. (NDLR : Ainsi que des tas d’autres personnes comme des agents de joueurs et autres suiveurs plus ou moins bien introduits).

En limitant la présence des journalistes, c’est une façon d’éviter certains couacs et dérapages verbaux ?

Ce n’est pas une question de couac. Si le règlement était appliqué, on serait mis à l’amende. A la fin de l’ère Riga, il y avait des supporters qui clamaient sa démission. Il suffit qu’un de ceux-là suive un journaliste, et c’est la catastrophe.

Qui sera le prochain directeur technique ?

Nous ne savons pas encore. Si on se sauve, on prendra une décision vis-à-vis de Geo. Soit on le prolonge, soit on se passe de directeur technique en plaçant Albert Cartier dans une fonction de coach plus à l’anglaise. Ou alors on prend un nouveau directeur technique.

On a l’impression que le club a stagné ces derniers temps ?

Moi, je trouve qu’on a fait des avancées spectaculaires. Il y a six mois, nous avons attiré Christophe Dessy pour la formation des jeunes. C’est la première fois que le club emploie quelqu’un d’aussi compétent pour les jeunes à plein temps.

Sur le plan sportif, ce n’est pas le cas ?

José Riga a fait du bon boulot pendant deux ans. Après notre neuvième place, on a essayé de maintenir un noyau stable. On a fait des efforts mais on aurait dû revoir la position de l’entraîneur.

C’est-à-dire ?

Sans dénigrer le travail de Riga, l’entraîneur n’avait plus la mainmise sur le noyau.

Dès le mois de juin passé ?

Non. Cela a commencé avec la succession de mauvais résultats. Mais avec le recul, on a fait l’erreur de ne pas toucher au groupe sportif de la saison passée. Soit il fallait revoir davantage le noyau pour apporter du sang neuf, soit un nouvel entraîneur capable de proposer un autre discours.

Ne vous êtes vous pas laissé griser par cette neuvième place ?

Non. On connaissait les postes à renforcer mais les transferts n’ont rien apporté. On n’a pas su refaire le coup des transferts de janvier 2007. Mais le marché n’est pas évident et nos moyens sont limités. Anderlecht n’a pas fait de meilleurs achats que nous. Il y a eu aussi beaucoup de déchets là-bas.

Et pourquoi licencier Riga alors ?

Il n’arrivait plus à trouver la solution. Même si je pense que les joueurs conservaient toujours beaucoup de respect pour Riga.

Vous avez choisi Cartier pour lui succéder mais ce n’était pas la première fois que son nom circulait à Mons ?

Non. Lorsque nous sommes descendus en D2, nous l’avions approché mais ses prétentions financières ne répondaient pas à ce qu’un club de D2 pouvait offrir.

Il y a eu de la grogne dans le vestiaire. Le noyau ne comprend-il pas trop de grandes gueules ?

Il y a quatre coordinateurs pour 26 joueurs. Je me dis que c’est assez pour tenir ces fortes têtes. Moi, je préfère avoir 26 fortes têtes que des moutons. Je regarde d’abord les qualités sportives. Si Ahmed Hassan et Sergio Conceiçao avaient des prétentions financières adéquates pour un club comme Mons, je les engagerais.

Van Pyperzeele :  » Quand ça va mal, on vient toujours me rechercher « 

Pourquoi est-on venu vous chercher ?

Geo Van Pyperzeele : Pour deux raisons, pour suppléer Jean-Paul Colonval et parce que, ce n’est pas une première, quand le club va mal, on vient me rechercher.

Vous êtes le pompier de service ?

Pas un pompier de service mais un serviteur.

On a l’impression qu’on ne sait pas quoi faire de vous ?

Peut-être. Je représente une certaine réussite qui a peut-être dérangé.

Pourquoi réapparaissez-vous à chaque crise ?

C’est étrange. Quand il y a de l’euphorie sportive dans le club, on oublie ma présence avec une facilité déconcertante. Mais c’est bien connu : on reconnaît ses amis quand tout va mal.

Vous êtes directeur sportif ad intérim…

… (il coupe) le terme ad intérim ne me plaît pas. Ma position est délicate mais différente. Je suis bénévole. Je dois cibler mes actions sur mes affaires privées. Mais le football demeure ma passion et toute ma vie. Je consacre tous mes moments de liberté à l’Albert. Je ne suis pas professionnel mais j’estime être efficace.

Vous savez que ce n’est pas assez dans le foot pro. Etes-vous prêt à sacrifier vos affaires pour un poste de directeur technique à temps plein ?

Je vais avoir 60 ans et je suis à un tournant de ma vie. Oui, ce job de manager me tente. Mais je ne vais pas tout sacrifier : je peux m’accommoder et trouver des solutions à l’avenir.

Que vous a-t-on demandé après la démission de Colonval ?

On ne m’a donné aucune ligne directrice. Je devais simplement diriger le sportif. Ce qui sous-entendait une étroite collaboration avec le staff et Riga.

Vous êtes une sorte de relais entre la cellule sportive et la direction ?

Relais mais aussi décideur. Lorsqu’on arrive à une unité de jugement du point de vue sportif, je me dois de concrétiser ce jugement. J’estime faire partie de l’ultime comité de décision. Et c’est le président qui prend la décision finale.

Comment expliquez-vous la faillite sportive ?

Dès le mois d’août, j’ai tenu à signaler que le championnat allait s’avérer difficile et que les transferts effectués n’apportaient aucune plus value. On avait pourtant ciblé les postes à renforcer mais on a failli.

Qui a décidé de se séparer de Riga ?

C’est moi. Il faisait son travail avec grand professionnalisme mais j’ai voulu sauvegarder la personnalité d’un homme que je respecte. Il était cassé et on l’aurait abîmé, ce que je ne pouvais pas tolérer.

Pourquoi Riga a-t-il failli ?

Il a tiré le maximum de son groupe mais à un certain moment, il a dû s’occuper d’autres détails.

C’est-à-dire ?

Disons que je ressentais un manque de cohésion et de jugement entre lui et Colonval. Ce sont deux personnalités fortes qui ont une vision différente du football.

Quelle est la différence entre Cartier et Riga ?

Riga est un professeur dans son approche. Cartier un guerrier. Mais les deux approches peuvent être complémentaires. Riga ferait un magnifique manager à l’anglaise. Et Cartier est un homme de terrain extraordinaire.

Comment avez-vous pris les critiques sur la direction dans Sport/Foot Magazine ?

Très mal. Lorsque vous êtes conscients que vous faites le maximum et que vous êtes critiqués injustement, c’est difficile à avaler.

Pourtant, vous devez admettre que certaines critiques étaient justifiées…

Je reconnais les erreurs commises dues à notre inexpérience mais aussi à l’attitude malhonnête de certaines personnes.

De qui voulez-vous parler ?

Laissez-moi le soin de ne pas répondre.

Quelles leçons tirez-vous de cette saison ?

Qu’une saison se prépare longtemps à l’avance. Et qu’un transfert doit être acté après un examen physique, sportif et médical.

Vous voulez dire que certains transferts n’étaient pas en ordre de marche ?

Il y a eu des erreurs. On doit viser la qualité avant la quantité. En août, je pouvais déjà vous dire qui allait se casser la gueule.

On dit que vous êtes l’homme de la Ville ?

Je reconnais avoir des relations privilégiées avec certains responsables. Mais Dominique Leone a également d’excellents contacts. Mais peut-être qu’en unissant nos forces, on est plus fort. Mais vous ne pensez tout de même pas que c’est parce que j’ai des contacts qu’on m’a imposé à l’Albert ?

par stéphane vande velde – photos: reporters/ buissin

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