Quelle SORTIE DE ROUTE ?

Numéro 3 chez Minardi, notre compatriote découvre la F1 de l’intérieur.

Après bien des rebondissements, Bas Leinders a décroché la place de troisième pilote au sein du team Minardi F1. La mi-saison approche, l’heure est venue de dresser un premier bilan avec le Limbourgeois. D’abord, se sent-il définitivement dans la peau d’un pilote de F1.

Bas Leinders : à chaque week-end de course, je me sens mieux intégré dans ce petit monde. Je commence à bien connaître les gens, je multiplie les contacts, c’est tout bénéfice pour l’avenir.

Quels sont tes rapports avec les autres pilotes ?

Pour tout dire, je n’ai pas encore eu l’occasion de converser avec Michaël Schumacher ! Le champion du monde est tellement sollicité, il a autre chose à faire que de venir causer avec moi. Mais je suis sûr que si j’avais un conseil à lui demander, il ne me snoberait pas. Je rencontre le plus fréquemment les gars que j’ai connus auparavant dans d’autres compétitions, Mark Webber, Jenson Button ou Riccardo Zonta par exemple.

Quel est ton rôle exact au sein de l’équipe Minardi ?

Mon statut est clair, je suis numéro 3. A ce titre, je participe aux deux séances d’essais libres programmées le vendredi avec pour mission d’y récolter le maximum d’informations dont pourront profiter les titulaires, Gianmaria Bruni et Zsolt Baumgartner. J’accumule les tours sans chercher à faite péter un temps, ce qui explique que je dispose le plus souvent d’une voiture fort chargée en carburant. Par ailleurs, ma Minardi ne bénéficie pas des meilleures pièces û amortisseurs, suspensions, moteur, etc û attribuées en priorité à mes équipiers qui doivent traquer les derniers dixièmes de seconde. Au fil des épreuves, l’écart entre ma monoplace et les deux autres devrait cependant se réduire.

Tu testes parfois certaines nouveautés ?

Effectivement, je peux hériter d’évolutions qui n’ont pas encore été validées par les ingénieurs. Il faut savoir que l’écurie Minardi, contrairement à ses rivales, n’a pas de budget pour effectuer des tests entre les courses. Cependant, la cellule de développement propose sans cesse de nouvelles solutions techniques qui ne peuvent être évaluées qu’à l’occasion des essais libres. Elles sont d’abord montées sur ma voiture avant de bénéficier à mes équipiers si elles ont donné satisfaction. Cette situation n’est pas sans risques. Ainsi durant la seconde session d’essais au GP d’Europe, j’ai hérité de pièces qui n’apportaient rien, que du contraire, mais j’ai dû m’en contenter.

Le meilleur allié des ingénieurs

N’est-ce pas frustrant de ne jamais taquiner le chrono ?

Un pilote veut toujours être devant, il aime se montrer le plus rapide. Mais là, je sais pertinemment ce qu’on attend de moi. Je préfère recevoir les félicitations des ingénieurs pour l’efficacité de mon travail que voir mon nom devant ceux de Bruni et Baumgartner sur les écrans de contrôle au terme d’une séance où je n’aurai apporté aucune réponse aux questions des techniciens. Cela dit, je mentirais en affirmant que je ne ressens aucune satisfaction quand je soutiens la comparaison avec les deux autres sociétaires du team alors que je suis aux commandes d’une auto moins performante…

Existe-t-il une chance de te voir sur une grille de départ en F1 cette année ?

Sur le papier, la réponse est non. Maintenant, personne ne peut dire de quoi demain sera fait. Si l’un des titulaires connaît un souci et n’est pas en mesure de s’aligner en course, je prendrai sa place.

Et le GP de Belgique ?

J’en rêve, bien sûr, mais à l’heure actuelle, cela ne va pas plus loin. Rien ne permet d’affirmer que Bruni ou Baumgartner me céderait sa place pour la manche belge. Tous deux possèdent un contrat en bonne et due forme portant sur l’ensemble du championnat. Cependant, je le répète, il peut se passer bien des choses d’ici la fin août…

Et en 2005 ?

C’est autre chose. Là, je vise clairement un volant à temps plein chez Minardi. Même si je reste attentif à toutes les opportunités cette saison, je travaille avec mon manager Marc Guiot pour bétonner ma position l’an prochain.

Tu te sens soutenu dans ton pays ?

Le public est derrière moi, indiscutablement. J’en prends pour preuve les très nombreux messages de soutien arrivant sur mon site web ; ils sont le plus souvent signés de gens que ne connais absolument pas, des passionnés qui veulent vibrer à nouveau grâce à un pilote belge en F1. En ce qui concerne les sponsors, les sociétés qui pourraient m’aider, ça commence à bouger. Pendant un temps, les gens semblaient se dire qu’un troisième pilote était comme un réserviste en foot, celui qui ne monte jamais sur le terrain et végète dans l’ombre. Mais j’ai le sentiment que les opinions évoluent et que certains décideurs ne repoussent plus d’office l’idée de travailler avec moi.

La F1 ouvre donc des portes ?

Bien entendu. A tous les niveaux. Pilote de GP, cela marque sur une carte de visite. Il faut garder à l’esprit que 25 ou 30 personnes seulement dans le monde peuvent se targuer de ce statut. Personnellement, je ressens cela comme un privilège : j’ai la chance de faire partie de ce tout petit cercle et par la même occasion de vivre pleinement ma passion.

Toujours pas rentable !

Et ce privilège est rentable, au plan financier ?

Pour l’instant non. Je ne vis pas mieux que les saisons précédentes, au contraire, car les frais sont nettement plus élevés. Mais c’est un pari sur l’avenir.

Revenons au plan sportif. Ta Minardi est très différente des voitures que tu as pilotées précédemment ?

Je la comparerais à une F3000 ou à la Dallara-Nissan alignées dans les World Séries. Avec une F1, les lignes droites semblent courtes tant les accélérations sont plus fortes et les freins en carbone diaboliquement efficaces. Les appuis aérodynamiques permettent aussi des vitesses de passage en courbe largement supérieures, les pneus offrent un meilleur grip, bref c’est un tout. Mais sur les tracés que je connais bien comme Imola ou Barcelone, je n’ai pas été spécialement dépaysé par le niveau de performances de la F1.

A propos de Barcelone, la mésaventure survenue l’hiver dernier lors du test sur Jordan est définitivement oubliée ?

Plus personne ne m’a parlé de cette sortie de route et j’ai fait mon boulot tout à fait normalement lors du GP d’Espagne sur le circuit catalan…

Tu crains les épreuves outre-Atlantique ?

Non, pourquoi ? Je me réjouis en tout cas de découvrir Indianapolis, surtout pour l’ambiance assez spéciale qui doit y régner.

Aucun programme parallèle à la F1 n’est envisageable ?

En monoplace, pas question. Je suis juste tenté par les épreuves d’endurance au volant d’un prototype, les 1.000 km de Spa par exemple. Mais je disputerai au mois d’août une course d’un genre très particulier : Paul Stoddart, le patron de Minardi, a en effet mis sur pied une confrontation de F1… biplaces sur le circuit sud-africain de Kyalami. Je piloterai une des huit voitures au départ de cette épreuve unique en son genre. Les bénéfices de cette manifestation iront à la Fondation Nelson Mandela qui vient en aide aux enfants dans les pays du Tiers Monde.

Eric Faure

Constat 1 :  » Les lignes droites sont courtes du fait DES ACCéLéRATIONS ET DES FREINS EN CARBONE  »

Constat 2 :  » Les appuis aérodynamiques et les pneus permettent des PASSAGES EN COURBE SUPéRIEURS  »

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire