Puff Daddy

Le Roumain évoque son arrivée à Chelsea, le championnat, la vie à Londres et les images de son coach.

En Italie, sa carrière s’étiolait. Le Roumain Adrian Mutu (8 janvier 1979) a effectué ses débuts à Arges Pitesti, avant d’être remarqué par le Dinamo Bucarest. C’est là que l’Inter l’a remarqué et l’a transféré. Ensuite, Mutu a glissé dans l’anonymat de la Serie A, à Vérone puis à Parme. Maintenant, il casse la baraque à Chelsea et en Ligue des Champions.

Comment êtes-vous arrivé à Chelsea ?

Adrian Mutu : Roman Abramovich, notre patron russe, a demandé à Claudio Ranieri une liste des joueurs qu’il aimerait. J’y figurais. Ranieri trouvait que j’avais effectué énormément de progrès en Europe. Il a de fait obtenu tous les joueurs qu’il avait couchés sur la liste, sauf Francesco Totti, Alessandro Nesta et Christian Vieri. Si j’ai bien compris, il a élaboré sa liste avec des joueurs dont le public raffole, sans croire un instant qu’Abramovich les transférerait vraiment.

Avez-vous accepté pour le seul argent ?

Non, je n’aurais pas accepté une offre du Japon ou du Qatar, au même tarif. En Italie, je n’avais guère de possibilités de jouer dans une grande équipe. L’AS Rome a Totti et Antonio Cassano, l’Inter a Alvaro Recoba, la Juventus Alessandro Del Piero et l’AC Milan a tout simplement trop de bons joueurs, puisque même Rivaldo est sur le banc. Sans l’offre de Chelsea, je serais resté à Parme, dont j’étais capitaine, mais je n’ai pas hésité, devant la perspective de gagner plus et de me produire en Ligue des Champions.

Les négociations ont-elles été teintées de nervosité ?

Il y a toujours des moments de tension. Parme pensait entamer la saison avec Adriano et moi et voilà que son duo était décapité à quelques semaines du coup d’envoi.

Qui a négocié ?

Chelsea a donné mandat à mon manager, Giovanni Becali, pour discuter directement avec Parme.

Vous sentez-vous apprécié à Chelsea ?

Oui, même si chaque joueur transféré pour une forte somme peut connaître des moments difficiles. Si vous ne marquez pas, on pense vite que vous ne valez pas votre argent. Après deux matches sans but, vous faites la une des journaux et ils passent même votre vie privée au crible. Les tabloïds anglais sont sans pitié. Ils peuvent être très embêtants.

Que pensez-vous des supporters ?

Ils sont incroyables. Il ne cessent de chanter, de vous encourager et ne sifflent pas quand vous commettez une erreur. C’est la grande différence entre l’Angleterre et l’Italie : là, on ne vous soutient que quand vous jouez bien et on fait beaucoup de foin autour des vedettes. Ici, on applaudit tous ceux qui se démènent.

Torero ou serpent ?

Quel est votre rôle de prédilection ?

A Chelsea, je suis le second avant. C’est ma place préférée. Je cours beaucoup. J’aime redescendre et donner un coup de main dans l’entrejeu.

Londres ne manque pas de tentations et la réputation des footballeurs anglais en matière de boisson n’est plus à faire. Comment résistez-vous ?

Londres n’a pas l’apanage des boîtes. Je suis professionnel, je veux me faire un nom, gagner des prix, être au centre d’un intérêt positif. Je veux qu’on raconte que je joue bien, que les supporters aient envie d’un autographe de moi. Bien sûr, il faut aussi se détendre, mais en choisissant ses moments.

Vous vous habituez donc à la vie londonienne ?

Progressivement, même si le style de conduite local me fait peur. Les gens sont agréables et je me débrouille en anglais. En plus, j’ai une belle maison dans un quartier calme.

Chelsea peut-il gagner le titre, est-il plus fort que Manchester United et Arsenal ?

Nous pouvons devenir champions mais il ne faut pas comparer Chelsea à d’autres équipes. Nous formons un nouveau groupe, nous ne nous connaissons pas encore alors que les footballeurs de United et d’Arsenal évoluent ensemble depuis des années. Ils ont aussi l’habitude de gagner des trophées. Toutefois, j’ai la conviction que notre jeu offensif nous rapportera toujours des buts alors que le style de jeu de Manchester United et d’Arsenal n’est pas nécessairement garant de résultats. United a moins de bons joueurs que la saison passée et son noyau me semble un peu étriqué pour faire face au championnat et à la Ligue des Champions. Sur quelle épreuve vont-ils miser ? Il est tout à fait possible qu’ils soient à nouveau champions mais je pense que nous sommes en mesure de réussir quelque chose cette saison.

Qu’attend Ranieri de vous ?

Que je marque. Il a travaillé de manière très intensive avec moi, tactiquement, et il emploie des images bizarres. Avant le match contre les Blackburn Rovers, il m’a dit que je devais me mouvoir comme un torero dans l’arène. Il voulait dire que je devais être particulièrement concentré. Après le match contre Leicester, il m’a comparé à un serpent. Il doit aimer les animaux.

Quel genre d’entraîneur est-il ?

Il comprend les joueurs, il est abordable. On remarque au moindre détail qu’il est un passionné de football. Il transmet parfaitement son amour du jeu. Je l’apprécie beaucoup.

Comment a-t-il réagi aux rumeurs de l’arrivée de Sven Goran Eriksson à Chelsea ?

C’est le foot… Hector Cuper a senti le souffle de Roberto Mancini, Vicente Del Bosque a vécu une situation similaire au Real et à Milan, Carlo Ancelotti sait qu’il ne peut se permettre le moindre faux-pas. Ranieri est Italien. Il sait de quoi le football est fait.

Pas de crise à Chelsea, au contraire

Et si Eriksson prenait effectivement la place de Ranieri ?

En football, on ne pense pas au lendemain.

Combien de buts voulez-vous marquer cette saison ?

Je souhaite en inscrire plus de dix.

Que pensez-vous de Claude Makelele ?

C’est un footballeur efficace, qui sait ce qu’il faut faire. J’ai disputé mon premier match européen avec Arges, contre le Celta Vigo, où il jouait alors. Il m’a rappelé ce match lorsque nous nous sommes revus à Londres. Il avait gagné 7-0 mais ce jour-là, le numéro dix d’Arges l’avait frappé. C’était moi.

Et de Herman Crespo ?

Il ne vit que pour marquer et il joue à merveille avec Jean Sebastian Veron.

De Marcel Desailly ?

Il est un exemple pour moi. Il est le joueur le plus populaire de l’équipe. On l’appelle le Commandant.

Quel est votre surnom ?

Puff Daddy, car j’aime la musique de R&B.

Quels conseils vous a donnés Dan Petrescu, votre compatriote, qui a lui-même joué à Chelsea ?

Il m’a dit de soigner ma relation avec le public et la presse. Ça a l’air évident mais beaucoup de footballleurs l’oublient.

Remarquez-vous des symptômes de crise en football ?

Non, pas à Chelsea.

Le fait que l’Inter vous a cédé à Vérone pour des motifs financiers a-t-il constitué un avantage ?

Au vu de la manière dont ma situation a évolué, je ne puis que répondre affirmativement.

Pensez-vous encore souvent à l’Inter ?

J’y ai vécu des moments fantastiques. C’est lui qui m’a donné ma chance. J’en serai toujours reconnaissant au président Massimo Moratti.

Selon vous, d’autres footballeurs roumains peuvent-ils réussir en Italie ?

Quelques-uns mais deux noms me viennent immédiatement à l’esprit : Florin Cerna, qui joue actuellement au Dynamo Kiev, et Marius Niculae, du Sporting Lisbonne.

Votre rêve ultime est-il toujours de défendre les couleurs de Barcelone ?

Oui. C’est là que Georghe Hagi, mon idole, a joué. Je suis sûr d’y arriver un jour mais enfiler le maillot du Real serait aussi magnifique.

Vous n’avez pas de raisons de vous plaindre, alors…

Certainement pas. Je me produis pour une excellente équipe, en Ligue des Champions. J’ai un superbe fils. Que puis-je demander de plus ?

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