« Profitez du spectacle »

Le coach trudonnaire prévient que ça ne durera sans doute pas toute la saison… Monologue.

Jacky Mathijssen: « Nous avons poursuivi sur l’élan de la saison passée en déplaçant certains accents. Alors que deux hommes attaquaient, il y en a souvent trois, maintenant. Nous empêchons ainsi l’adversaire d’entrer dans le jeu. L’attaque n’est-elle pas la meilleure défense?… En Belgique, peu d’équipes peuvent compter sur leurs stoppeurs pour relancer le jeu. éa se passe généralement par les flancs. Si cette voie est coupée, il faut user de longs ballons. Or, nous avons des défenseurs qui maîtrisent bien ce registre. J’insiste sur le fait que c’est momentané. On ne peut jamais être certain de connaître la réussite toute une saison. Nos adversaires ne restent pas les bras croisés non plus: ils décortiquent notre jeu.

Un autre atout: tous les joueurs s’entraînent et courent pour les autres. Il faut conserver cette mentalité, typique du club ».

Du spectacle

« J’ai fait partie du noyau comme joueur, pendant sept ou huit mois. J’ai souvent pensé: – Ils peuvent mieux que ce qu’ils ne montrent. Une fois libérés, ils ont pris conscience de leurs qualités. Sur le plan défensif, nous assumons davantage de risques car nos arrières nous offrent des solutions offensives. Du coup, nous pouvons surprendre l’adversaire.

Bram Vangeel éclot. J’imagine que l’année dernière, lors de la théorie, son nom était rarement cité par mes collègues. éa a sûrement changé. Lommel et La Louvière ont mis un homme sur Danny Boffin. Quand ça réussit, comme dans notre derby face à Lommel, l’entraîneur a le droit de grossir l’événement mais si nous avions converti nos occasions, il aurait été réduit au silence. Neutraliser Danny ne suffit pas à paralyser St-Trond. Notez qu’aussi longtemps qu’il signera de telles performances, nous sommes prêts à exagérer son importance et à jouer en fonction de lui. Pourtant, au début de la saison, après le Mondial, d’aucuns se sont demandés s’il poursuivrait sur sa lancée. Dans le cas contraire, nous devons jouer autrement et d’autres doivent assumer leurs responsabilités.

Les buts sont bien répartis. Marcos Pereira connaît moins de réussite mais il y a une explication. La blessure de Thomas Caers, notre arrière gauche, déplace le jeu sur la droite, via Voets. La première passe arrive donc à Marcos, qui doit gagner son duel et relancer, ce qu’il fait à merveille. DésiréMbonabucya est un excellent avant. Il se démarque, sait jouer en profondeur, il a un bon bagage… Le tout est d’arriver près de lui avec le ballon car il n’aime pas être lancé. Je pense qu’il s’épanouirait mieux dans une équipe supérieure ».

L’euphorie

Nous n’avons pas encore affronté les équipes les plus difficiles mais que représentent-elles, en fait? L’année dernière, nous n’avons pas réussi à concrétiser notre suprématie. Face à des formations dans un bon jour, nous avons contré efficacement. Nous avons battu Bruges et Anderlecht et fait nul contre Genk.

Nous avons terminé huitièmes. Notre objectif? Je n’en ai pas. Un club comme le nôtre ne doit pas se focaliser sur une place bien déterminée. Notre président souhaite gagner un prix cette année. C’est son bon droit mais j’ai une autre approche, qui convient mieux au groupe. Chaque semaine, nous nous livrons à fond, en prenant ce qui est à prendre. Calculer est dangereux. L’année dernière, nous avons raté la finale, à un match près. Pareil pour l’Intertoto.

Cette huitième place reflétait notre valeur. Avec 53 points, nous avons établi un record de club. Durant la préparation, il a fallu trois semaines pour que tout se remette en place. C’est long. Je me suis demandé si j’avais encore de l’impact sur les joueurs, s’ils m’écoutaient encore mais tout est rentré dans l’ordre. J’ai quand même dû remettre les points sur les i, pendant la semaine consacrée aux matches internationaux: c’était l’occasion de rattraper son retard dans certains travaux à la maison mais pas de prendre trop de bon temps ».

Concurrence dans le but

« Je ne pense pas que le départ de Davy Schollen endorme Dusan Belic mais il a encaissé des buts évitables. A son âge, il doit pouvoir se livrer à fond sans être talonné par un concurrent.

Je n’ai pas été un grand gardien mais j’ai toujours essayé de dénouer les situations avant qu’elles ne soient dangereuses en anticipant, en dirigeant les autres. Je continue à voir le jeu depuis la cage. Par exemple, mon tableau est vertical et pas horizontal. Je me suis entraîné à part, comme gardien, mais je trouve que j’estime bien la lourdeur de mes séances. Sans doute mon régendat en éducation physique m’y aide-il. Je sais ce que représente une préparation physique et j’en ai eu la confirmation à l’école d’entraîneurs. Nous avons un professionnel en la matière, le lundi et le mardi: Eric Roeckx. Nous figurons parmi les équipes les plus costaudes.

Ce régendat m’est aussi utile en pédagogie: j’ai appris à faire face à un groupe. Enfants, joueurs, adultes, peu importe, j’ai appris à quoi faire attention, combien de temps parler à quelqu’un, comment se présenter à un groupe. Pourtant, passer d’un vestiaire à l’autre a été difficile, il y a deux ans. J’étais encore capable de jouer. J’ai eu de la malchance avec mon genou mais j’étais guéri. Je m’étais donné à fond pendant le stage, j’avais soif de jouer. Seulement, le club devait trouver une solution. Guy Mangelschots ne voulait plus entraîner, Jules Knaepen ne voulait pas assumer seul cette responsabilité et ils se sont demandés de qui ils pouvaient se passer. Peut-être mes qualités de gardien sont-elles venues en second lieu. C’est la seule explication possible. J’ai précisé que si je quittais le vestiaire, je n’y reviendrais plus ».

Pas de modèle

« Je ne copie personne. Je n’ai retenu que des choses qui m’énervaient et que je ne ferai jamais. Ainsi, à la fin du dernier entraînement, je n’affiche jamais un papier avec la sélection du week-end avant de filer. J’indique sa place à chacun. Peut-être finirai-je par coller ce papier en vitesse (il rit). Jusqu’à présent, en tout cas, j’ai toujours exposé mon point de vue. C’est ma vérité, pas la vérité. Il est tout à fait possible que d’autres aient un point de vue différent.

Tactiquement, il faut laisser chacun s’exprimer en fonction de ses qualités, en essayent d’être dominant. C’est tout. Pendant les examens, à l’école d’entraîneur, on m’a demandé d’expliquer mon système préféré au tableau. Je n’y ai rien inscrit. J’ignore le nombre de points que ça m’a coûté mais le style de jeu dépend du matériel -joueurs dont on dispose ».

Le moment le plus pénible

« La déception du club suite à notre nul blanc contre Lommel, lors de la deuxième journée a été pénible. éa m’a touché. A ce moment-là, la qualité du terrain d’entraînement laissait à désirer, les équipements sont arrivés en retard et les joueurs ont commencé à se plaindre: vous savez comment ça va. Des détails. Avant d’en arriver-là, la préparation en elle-même a été convenable, même si les résultats n’ont pas été terribles mais ça ne m’intéresse pas. Puis, malgré tout, lors de la première journée, nous disputons un superbe match au GBA. La première mi-temps a été vraiment bonne. Nous perdons 3-2 mais on nous complimente de partout, ce qui ne va pas de soi à Anvers. Ensuite, nous réalisons un nul contre Lommel et le club sombre dans la déception la plus totale. Pour certains, il s’agissait même d’un autre sentiment. A mes yeux, c’était incompréhensible. J’en ai été touché, comme mes joueurs. Heureusement, la suite a prouvé que ce n’était pas aussi dramatique qu’on l’avait imaginé.

Ensuite, nous nous sommes déplacés à La Louvière. Développer un beau jeu, c’est bien mais il fallait surtout prendre des points et si je sens qu’il faut changer mon fusil d’épaule, je le fais. Je l’admets, j’ai pensé: – Basta. A deux reprises, nous avions déjà perdu 1-0 là-bas. Cette fois, on a vu qui était le meilleur. Du football offensif, oui, mais pas au prix de la victoire. Aucun supporter ne peut nous en vouloir. S’ils doivent choisir entre 1-0 et 3-4, ils opteront tous pour le premier score – et la victoire ».

A 14

« Ce dont je suis le plus satisfait? Que plus tard, le club ne pourra jamais dire que l’entraîneur a freiné l’équipe, empêchant les autres cellules de le développer comme elles le souhaitaient. A mes yeux, c’est une des missions les plus importantes de mon travail. Nous vivons des moments cruciaux: il faut rester parmi les 14, adapter le stade aux normes et trouver des sponsors, malgré un climat économique difficile. Nous ne sommes pas un frein mais un moteur du club. J’en suis heureux ».

Peter T’Kint

« L’équipe est devenue un moteur du club »

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