Produit d’exportation

Le nouvel attaquant de Charleroi est une référence dans les pays du Golfe.

Il est arrivé sur la pointe des pieds, le mercato fini. A peine un peu de publicité autour de sa nationalité. Car en signant à Charleroi, Amad Al Hosni devenait le premier Omanais à jouer dans le championnat de Belgique. Le dernier Charleroi-Malines valait déjà le coup d’£il, juste pour la confrontation entre le premier Jordanien de notre compétition, Abdallah Salim et le premier Omanais. Quelques minutes suffirent pour attirer l’attention. Un premier penalty concédé mais une défaite au bout du chemin. Pas de quoi créer un buzz. Dix jours plus tard, c’est la confirmation. Entré à la mi-temps contre Courtrai, c’est lui qui sonna le réveil des Carolos avec ses dribbles et un deuxième penalty (litigieux) concédé. Alors qu’on croyait que l’Omanais constituait un pari, ses deux rentrées pourraient bien le conduire vers une place de titulaire.

 » Il ne s’agissait pas d’un pari « , explique l’entraîneur carolo Stéphane Demol.  » Avant la fin du mercato, le président m’avait demandé si j’avais encore des souhaits. Je lui avais répondu qu’il me manquait un défenseur et un attaquant. Mais on avait convenu très clairement qu’on allait prendre des joueurs candidats au onze de base. On a mis un peu de temps avant de les trouver.  »

Pas question donc d’aller chercher un élément pour faire nombre dans le noyau. Les réseaux de Mogi Bayat furent activés mais c’est grâce au président lui-même qu’Al Hosni débarqua au Mambourg. Abbas Bayat :  » Un agent d’Arabie Saoudite s’est adressé à moi via l’AWEX, l’agence wallonne à l’exportation. Nous avons discuté et nous avons vu le joueur. L’affaire s’est réglée très rapidement.  » C’est en effet, Jacques Lambert, attaché économique et commercial à Riyad, qui fut approché à l’ambassade de Belgique par le manager d’Al Hosni, Abdullah Al Mukairin Turki, désireux de placer son joueur en Belgique. Et comme Lambert connaissait Abbas Bayat, il le renseigna auprès du manager.

Un test fut prévu mais il ne fallut pas plus de quelques jours pour que tout le staff soit convaincu du potentiel de l’attaquant de 25 ans.  » C’est lors du match amical à Lens que tout fut réglé « , explique Demol.  » Malade. Je n’y étais pas mais d’après ce que j’en avais entendu, je ne pouvais que le prendre.  »  » Sur place, on a tous été impressionnés « , ajoute son adjoint Michel De Wolf.  » Que ce soit le staff ou le président, on n’imaginait pas un truc pareil. C’était comme s’il jouait avec l’équipe depuis longtemps. Notre réaction après le match : un dossier à ne surtout pas laisser tomber.  »

Mi-septembre, le deal était conclu : un contrat de deux ans (assorti d’une option d’un an). Et une fois les papiers faxés par Al-Rayyan, son ancien club, Al Hosni pouvait prendre place sur le banc.  » Le joueur a été convaincu par le projet qu’on voulait mettre en place à Charleroi « , précise Abbas Bayat.  » Son but est de progresser dans le monde du foot. Il a pu se rendre compte qu’il y avait d’autres joueurs qui parlaient arabe dans le groupe. C’était important pour lui. « 

Pourtant, jusqu’à présent, son séjour carolo n’aura pas été de tout repos. Entre Malines et Courtrai, Al Hosni faisait un détour par l’hôpital.  » Son bras avait doublé de volume « , explique Demol. En cause une infection, un staphylocoque combattu à coups d’antibiotiques.  » On a été convaincu dès la première minute « , continue Demol.  » Vous aussi ? Et encore, il n’a montré qu’une infime partie de son talent. Rendez-vous compte : il arrive, il joue 20 minutes, il va à l’hôpital cinq jours, il s’entraîne deux jours et il joue une mi-temps. Puis il est parti en Australie avec son équipe nationale. C’est un peu difficile mais on y croit. « 

Une idole à Oman

Si Al Hosni constitue une découverte, son CV est cependant impressionnant. A Oman, c’est une vedette. Le seul joueur, avec le gardien Ali al Habsi (aujourd’hui à Bolton), qui évolue à l’étranger.  » C’est un phénomène « , explique un journaliste d’ Oman Daily Observer, un des rares journaux locaux paraissant en anglais.  » Il supportait le poids de l’attaque à lui tout seul. Nos adversaires savaient que le danger ne pouvait venir que de lui. Il est déroutant et a du caractère. Il aime sentir l’équipe derrière lui. Pour passer un palier et prouver à lui-même qu’il avait le niveau international, il devait quitter les pays du Golfe. C’est pour cette raison qu’il cherchait un point de chute en Europe. Il n’a toujours pas rejoué avec l’équipe nationale, à domicile depuis son départ mais sa cote de popularité n’a fait que grimper depuis l’annonce de son transfert. Je pense qu’il sera reçu comme un prince !  »

Il faut dire que ses statistiques parlent pour lui. 32 buts en 54 sélections avec l’équipe d’Oman, aujourd’hui dirigée par le Français Claude Le Roy.  » Il a marqué les esprits d’emblée « , explique le journaliste d’ Oman Daily Observer.  » Dès sa deuxième sélection, il inscrivait un doublé.  » C’était en 2004, lors de la Coupe d’Asie des Nations face à l’Iran.  » La même année, il était également élu meilleur joueur de la Gulf Cup. Il n’avait que 20 ans mais avait inscrit 4 buts. On le voyait déjà évoluer à l’époque dans les meilleurs championnats étrangers.  »

Cependant sa notoriété n’a jamais dépassé les limites des pays du Golfe, la plupart de ses buts étant inscrits contre des pays asiatiques et Oman ne bénéficiant pas d’une sélection capable de rivaliser avec les meilleurs pays de la zone asiatique. Dans les qualifications pour le prochain Mondial, Oman a terminé 3e de son groupe lors de la troisième des quatre phases asiatiques, derrière le Japon et le Bahreïn. Al Hosni a d’ailleurs marqué deux buts dans ces qualifications (contre la Thaïlande).

Outre l’équipe nationale, sa carrière s’est concentrée sur les pays du Golfe. Après des débuts à Al Khaburah (un club omanais), il passa en 2004 à Al-Riyad en Arabie Saoudite. 16 buts et une saison plus tard, il était transféré au Qatar SC, dans l’émirat voisin où il resta trois saisons avant d’obtenir son meilleur contrat la saison dernière, dans l’ancien club d’ Emile Mpenza, Al-Rayyan, toujours au Qatar.  » C’était un peu mon concurrent direct. Du moins, lui le voyait comme ça « , explique le footballeur guinéen, Pascal Feindouno (ex-Saint-Etienne et Bordeaux), arrivé à Al-Rayyan cet été.  » C’est pour cette raison qu’il a voulu partir : on a un peu le même profil. Lui est peut-être plus dribbleur et moi plus physique mais on est tous les deux des amoureux du ballon.  »

par stéphane vande velde – photos: belga

« Que ce soit le staff ou le président. On n’imaginait pas un truc pareil. (De Wolf) »

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