Portrait Mary Pierce

A 27 ans bien frappés, Mary Pierce est-elle plus une star déchue qu’une jeune fille qui disputa, voici huit ans déjà, sa première finale de Grand Chelem en Australie? A l’époque, le milieu du tennis assista à la montée en puissance de cette joueuse parlant le français avec un fort accent américain. Née à Montréal, Mary possède une mère française et un père américain qui joua un drôle de rôle dans sa vie.

On a dit que le paternel était cruel avec elle et qu’il n’hésitait pas à la frapper lorsqu’elle ne répondait pas à ses attentes. Même si personne ne se trouva jamais au bon endroit pour vérifier, pareilles affirmations trouvèrent un fond de vérité dans le comportement du paternel lorsque, insultant les adversaires de sa fille, il se fit expulser manu militari de différents tournois. Lors du divorce de ses parents, elle choisit sans hésiter le camp maternel pour s’installer en France avant d’émigrer ensuite vers la Floride où elle réside depuis de nombreuses années aujourd’hui.

C’est cette fuite aux USA qui fit de Mary Pierce une joueuse jamais réellement acceptée par les Français ainsi que le sujet d’une boutade devenue désormais célèbre sur le circuit. Sa nationalité change au gré de ses performances: elle est Française quand elle gagne et Américaine quand elle perd.

A ce jour, elle a atteint la troisième place mondiale à trois reprises, inscrit 15 titres à son palmarès et disputé trois finales de Grand Chelem, dont deux à Melbourne, la troisième s’étant transformée en triomphe. C’était au mois de juin de l’an 2000 devant « son » public de la porte d’Auteuil. Parce qu’elle était devenue la première Française à s’imposer à Roland Garros depuis Françoise Durr en 1967, la France entière n’eut d’yeux que pour la belle Mary.

Sa jeunesse tourmentée, les frasques de son père, ses changements répétés d’entraîneurs, les millions de dollars de gains récoltés depuis ses débuts sur le Tour sans parler de ses juteux contrats de sponsoring, la créatine qu’elle se procurait allègrement dans les supermarchés du Nouveau Monde, ses silences prolongés face aux journalistes français qu’elle considérait comme ses pires ennemis et, bien sûr, son départ pour les Etats-Unis: rien ne fut laissé au hasard.

Malgré une défaite précoce à Wimbledon la même année, on sentait la Franco-Canado-Américaine prête pour frapper un grand coup à l’US Open 2000. Las! C’est précisément dans la fournaise de Flushing Meadow que Mary Pierce se mit à glisser sur la mauvaise pente. Opposée à l’Allemande Anke Huber en huitièmes de finale, elle dut jeter l’éponge après la perte du premier set. Diagnostic: tendinite au poignet droit. Elle disparut de la circulation jusqu’à la fin de la saison.

Depuis ce jour de l’été 2000, qui restera à jamais gravé dans sa mémoire, la joueuse que l’on sait fiancée à une star de baseball américain – Roberto Alomar, le batteur des Cleveland Indians- n’a plus disputé que 17 misérables rencontres, dont une seule en janvier dernier à l’Open d’Australie.

Détruite par ce nouveau coup du sort, Pierce apparut dans la peau d’une fille résignée, comme si elle sentait au fond d’elle-même qu’après 12 années de pérégrinations à travers le monde, son corps refusait dorénavant toute surcharge de travail.

« Je ne sais pas ce qui m’arrive », bredouilla-t-elle. « Je suis sans doute victime du manque de compétition. Je me suis entraînée très fort pendant deux mois avant l’Australie mais le corps ne répond visiblement pas de la même manière à l’entraînement qu’en match. Le stress complique les choses ».

Mary se retrouve dans un long tunnel noir duquel elle ne ressortira peut-être jamais. Retombée aujourd’hui à la 291e place WTA, elle est face à une montagne dont elle n’aperçoit même plus la cîme. Pour la presse et le public français, qui ont trouvé en Amélie Mauresmo une remplaçante au physique tout aussi impressionnant, elle a cessé d’exister depuis longtemps. Purement et simplement.

Florient Etienne,

Elle n’a joué que 17 matches depuis l’US Open 2000 et ne sait pas ce qui lui arrive

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