Popeye, le Tahamata des années 50

Décédé le 23 octobre, à 83 ans, André  » Popeye « Piters restera pour l’éternité un des plus grands dribbleurs de l’histoire du Standard. Je l’ai rencontré deux fois pour les besoins d’un livre. Tiré à quatre épingles, il était fier de ses quatre enfants, Marina, Andy, Renaud et David qui l’aidaient à gérer ses trois magasins d’articles de sports répartis entre Liège, Herve et Fléron. Cet artiste qui se saoulait de crochets au point de confondre ses équipiers et les marchands d’eskimos, évoqua ses clubs (Herve, Standard 1951-1961, Olympic de Charleroi 1961-1963, Fortuna 54 Geleen 1963-1966, 23 fois Diable Rouge), son surnom et surtout deux de ses coaches : André Riou et Geza Kalocsay.

 » Au cours d’une tournée en Angleterre, mes équipiers m’ont signalé que les nouveaux payaient toujours une tournée générale. Je n’avais plus le moindre sou et je me suis adressé au président Léon Rassart afin qu’il me consente une avance. Il me toisa –Débrouille-toi, mon petit car tu as reçu ton dû et va manger tes épinards, Popeye. Nous avions justement des épinards dans nos assiettes. J’étais baptisé. Je n’ai rien offert à mes équipiers mais j’ai hérité d’un surnom que j’ai toujours aimé.  »

A propos de Riou, il nous confia :  » Nous étions de grands enfants. Des hôteliers se sont souvenus longtemps de notre passage chez eux car nous accumulions les gags en inversant les chaussures que les clients laissaient devant la porte de leur chambre. Riou avait compris qu’on ne devait pas brider mon tempérament. Tous les bons entraîneurs agissent de la sorte. Raymond Goethals ne donnait jamais de directives tactiques à Simon Tahamata. Ce joueur pouvait laisser parler son instinct. Moi, je devais garder tout mon influx pour faire la différence  » devant « . I1 y avait d’autres gars pour gérer la récupération du ballon.  »

S’il admirait Riou, Popeye détestait le rude Kalocsay. Un matin, à l’hôtel, le coach enfila des doubles cognacs à jeun avant un match aller de CE 1 contre Reims. Piters observa la scène tout en jouant aux cartes.  » Barman, encore oune « , répétait Kalocsai. Après le déjeuner, Kalocsai apostropha Popeye :  » Pas facile pour vous. Match pas pour artistes. Jouer cartes et jouer football Europe pas la même chose. Popeye toujours dribbler, encore oune, encore oune, pas ça contre Reims, vous compris ? » La réplique de Popeye fusa en faisant semblant de porter un verre à ses lèvres :  » Oui, moi compris car c’est comme vous ce matin avec quelques cognacs : encore oune, encore oune « . Popeye et Kalocsay venaient de déterrer la hache de guerre et ne se réconcilièrent jamais.

PAR PIERRE BILIC

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