Plus voyou que son père

Il vient de passer de Westerlo à Genkmais sait déjà ce qu’on attend de lui chez le champion en titre.

A son arrivée à Genk, Sef Vergoossen avait déclaré que Kevin Vandenbergh était un meilleur finisseur que Wesley Sonck, mais il en faut davantage pour s’imposer à Genk. Au lieu d’attendre le ballon, par exemple, il faut penser et courir. Toutefois, en un laps de temps relativement court, le jeune Vandenbergh s’est glissé dans l’équipe. Il a reçu sa chance de plus en plus souvent, notamment grâce à l’accès de malaria de Moumou Dagano.

Kevin Vandenbergh : J’ai dû m’adapter au 4-4-2 pratiqué ici. Ensuite, je n’ai cessé de progresser. Mais quand on évolue dans un système tactique fixe, on se voit assigner des tâches qu’on ne maîtrise qu’en les exerçant en match. Disputer des matches amicaux contre des équipes de moindre niveau n’est pas l’idéal: pour elles, c’est le match de l’année. Il n’est pas toujours aisé de bien exécuter sa tâche, quand on est le meilleur et qu’on n’a donc guère l’occasion de se consacrer à ses tâches défensives.

Je savais qu’on me demanderait d’assumer d’autres missions pour me faire progresser. éa me convient parfaitement et je me suis juré de tout mettre en oeuvre pour figurer le plus vite possible dans le noyau de base et essayer d’apporter quelque chose du banc. J’y suis parvenu chaque fois qu’on m’a fait entrer au jeu. C’est ainsi que j’ai été titularisé contre le Real, un match qui a été positif pour moi.

Vous avez haussé le ton quand vous n’étiez pas repris.

J’étais déçu de ne pas figurer parmi les 18. En juillet, à mon arrivée, je savais que deux bons attaquants, Moumou et Wesley, avaient priorité. Des attaquants qui m’ont beaucoup appris, d’ailleurs. Mais je voulais aussi faire mes preuves. J’étais d’autant plus déçu qu’en Réserves, je travaillais bien: j’ai marqué dix buts en sept matches, donc… Tout s’est bien déroulé mais je ne parvenais pas à franchir le dernier pas, quitter le banc et montrer ce que je valais. Faire banquette ne m’a pas causé de problème. Je sais qui est sur le terrain: Moumou et Wesley, un duo qui se connaît très bien.Trop statique au début

A Westerlo, quand vous n’étiez pas dans l’équipe, vous éleviez aussi le ton. Comment gérez-vous la critique?

Elle ne me cause aucun problème. Je sais si je suis bon ou mauvais et pourquoi. Mais quand on en remet une couche, c’est énervant. Là non plus, pas de problème. Tout simplement parce que je sais que ça doit être amélioré la semaine suivante. A Westerlo, la situation était différente. Durant le premier tour, j’ai disputé 13 matches de championnat et deux de Coupe. J’ai inscrit 13 buts, dont quatre contre le Lierse. Quand vous êtes écarté après la trêve à cause de l’arrivée de Thompson et de Karaca, vous êtes évidemment très déçu. C’est une claque. J’ai été écarté sans qu’il se soit produit d’incident. éa m’a fait très mal. Heureusement, en fin de saison, j’ai reçu une nouvelle chance et j’ai pu disputer quelques bons matches. Je me souviens du 3-3 à Anderlecht. Je jouais avec Vedran Pelic. Nous avions formé l’attaque du premier tour. J’aimais bien jouer avec Vedran car le courant passait bien, sur le terrain et en dehors. Nous nous complétions: il peut conserver le ballon, le prolonger, délivrer une passe. Je jouais plutôt derrière Vedran. Je devais rôder dans les parages.

A Genk, nous évoluons avec deux véritables attaquants et j’étais peut-être trop statique. On attendait davantage de moi, à juste titre. Je sais maintenant ce qu’on veut de moi: c’est le plus grand changement que j’ai dû affronter.

En l’absence de Dagano, Sonck et vous vous êtes trouvés facilement.

Nous avons tous les deux des qualités footballistiques, donc, nos combinaisons ont réussi. En plus, il sait conserver le ballon ou le prolonger de la tête. Nous sommes donc assez similaires. Sauf que Wesley est meilleur que moi, évidemment.

Que vous apprend-il?

Sa façon de protéger le ballon, son timing sur les headings, sa manière de réaliser une action. Quand vous êtes jeune, vous êtes attentif aux gens qui vous entourent. Je n’aurais pas appris tout ça à Westerlo, je pense, mais les Campinois n’en étaient pas responsables. Pour vous donner un exemple simple: ici, il y a cinq entraîneurs sur le terrain. Là, il y en a deux, trois si l’entraîneur des gardiens est là. C’est la différence entre un grand club et un pensionnaire du ventre mou. Ici, on vise un tel niveau que je ne peux que suivre le mouvement. Je me sentais prêt à passer ce cap et je pense avoir déjà prouvé être prêt quand on a besoin de moi. Je suis ambitieux. Je veux aller loin, plus loin encore. Qu’importe qu’on ait 18 ans, 24 ans, 37 ans ou 30 ans. Quand on se sent prêt, qu’on est bien dans sa tête, on veut jouer et montrer ce qu’on vaut.

Un garçon de 19 ans est-il à même d’estimer lui-même s’il est prêt?

A certains moments, je pense que je dois encore mieux connaître mon corps mais, en général, je pense le connaître très bien. Un joueur sent ça: maintenant, je suis prêt. Ou: je suis dans le creux de la vague. Mentalement, j’ai toujours été fort. Quand je jouais en équipes d’âge, j’entendais les réactions des parents, le long de la ligne. Ils ne pensaient pas à mal. Allez, tu joues contre le fils de… (il rit). Déjà à l’époque, j’étais fort mentalement. Beaucoup de jeunes planent après deux bons matches, à cause de leurs parents, déjà. A la maison, nous avons toujours été très réalistes. Nous faisons un bilan en fin de saison. Ce n’est qu’à ce moment qu’on peut juger ses prestations. Il faut ensuite s’attacher à améliorer ses points faibles. Des cuisses déjà impressionnantes

Vos cuisses ont pris du volume. Avez-vous beaucoup évolué physiquement?

J’ai progressé grâce au fitness et à l’intensité des entraînements. Sans oublier l’âge, évidemment. Je n’ai encore que 19 ans, donc je suppose que je vais devenir plus fort encore. Je vais continuer à me développer. Pour le moment, nous veillons à ce que le buste suive les jambes. Je ne peux plus me comparer à celui que j’étais il y a un an. Tout le monde a constaté que j’étais devenu un tout autre joueur. Je peux difficilement dire moi-même à quel point j’ai forci mais je me sens bien dans les matches car je réussis ce que je ratais peut-être l’année dernière. Alors que je loupais le ballon de justesse, je l’attrape. J’ai progressé.

Hierro en sait quelque chose: c’est à cause de vous qu’il a été remplacé à Genk-Real.

(Il rit). Il s’est dirigé sur moi et je l’ai repoussé. Bernd Thijs a surgi, sur ces entrefaites. J’ai toujours été comme ça mais avant, je n’aurais peut-être pas été capable de réagir. La saison passée, on m’a parfois poussé alors que je voulais contrôler le ballon mais maintenant, je le conserve.

Votre jeu de tête n’est pas votre principale qualité alors que votre père y excellait. Ne vous êtes-vous pas exercé à la maison?

Je peux et je veux améliorer mon jeu de tête mais ça ne sera jamais mon point fort. Je préfère avoir le ballon dans les pieds. Quand j’étais petit, mon père jouait toujours et je savais qu’en rentrant, il n’avait plus envie d’être confronté au football. Il préférait entreprendre d’autres activités avec sa famille et ses enfants. Ce n’est que lors de sa dernière année au RWDM et quand il est devenu entraîneur qu’il s’est occupé plus régulièrement de moi. Nous avons travaillé la finition au but et tout ça. Le travail de la tête aussi mais il trouvait qu’il valait mieux exercer d’abord mes deux pieds. Pas tirer en puissance mais dans le coin. On a un peu perdu de vue mon jeu de tête: alors que j’étais Scolaire, au lieu de passer en Juniors, j’ai été versé en Réserves. Puis je me suis retrouvé en équipe fanion et je n’ai plus eu assez de temps pour des entraînements supplémentaires.

Il y a un an, vous avez déclaré que votre père était très important pour votre progression. « Je ne peux pas me passer de lui ». Qu’en pensez-vous maintenant?

Depuis mes 16 ans, je vis avec des adultes. A Westerlo puis à Genk. En peu de temps, j’ai beaucoup mûri mais mon père reste indispensable à mon épanouissement. L’âge ne joue aucun rôle là-dedans. Il peut toujours m’apprendre quelque chose. Il conservera cette fonction, où que je sois. J’ai besoin de lui pour progresser, même si ça devient moins fréquent. Je suis plus occupé, donc moins souvent à la maison…

Sur le plan personnel, vous avez vécu une période difficile. Ceux qui vous connaissent disent que vous avez souffert.

Je préfère ne pas en parler. Sur le terrain, ça ne m’a causé aucun problème. Ma mère me soutient beaucoup et mon père aussi. De ce point de vue, rien n’a changé.

N’avez-vous pas trouvé dure la réaction de votre père après Genk-Malines, un match durant lequel vous avez marqué trois buts et délivré un assist? Il a déclaré: « Je ne vais pas le porter aux nues car il n’a encore rien prouvé ».

Mon père et moi sommes réalistes: au match suivant, je serai à nouveau jugé. Durant ma première saison en équipe fanion, je n’ai marqué que contre Genk en Coupe de la Ligue. La saison suivante, j’ai inscrit quatre ou cinq buts, contre 14 la saison passée. Je suis maintenant à cinq buts. Je pense avoir prouvé quelque chose et je veux accomplir un pas supplémentaire dans un grand club. J’ai prouvé ce dont j’étais capable mais je reste réaliste. En football, on peut être l’homme de la semaine puis passer à côté du match suivant. Il faut être bon chaque semaine pour pouvoir parler d’une saison réussie.

Vous faites preuve de la même modestie mais en quoi êtes-vous différent de votre père?

Je vais sans doute voler plus vite dans le tas que mon père. Même sur le terrain. Je ne laisse personne me marcher sur la tête. Lui non plus, pas du tout, mais je pense que je rends les coups plus vite ou que je me vengerai. Avant, on disait déjà que j’avais plus de tempérament. Si on me donne un ou deux coups, la fois suivante, je vais y mettre le holà. On ne peut pas frapper quelqu’un dans un duel mais il faut se faire respecter.

Raoul De Groote

« C’est vrai, sur le terrain, je rends les coups, je me venge »

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