« Pfaff veut ma peau »

Malgré un début de championnat catastrophique, l’entraîneur conserve la confiance de la direction du RWDM

De mal en pis. Après avoir perdu quatre des cinq premières rencontres sur un petit but d’écart, le RWDM a explosé, samedi dernier, à l’Excelsior Mouscron, auteur d’un début de championnat encore plus catastrophique…

La lanterne rouge a désormais été refilée aux Molenbeekois en partage avec La Louvière. Au sein du club, cela commence à gronder. La tête de Patrick Thairet est mise à prix, mais le principal intéressé sort les griffes.

L’enfant de la maison n’avait pas caché, dès sa prise de pouvoir en mai dernier avant de mener le club à la victoire au tour final, son extrême lucidité quant à la versatilité du métier d’entraîneur.

« Je suis déjà en sursis », nous avait-il affirmé au lendemain d’une montée en D1 et d’une fête bien arrosée au stade Machtens. Appelé à rejoindre l’élite fort tard, le club a tenté d’embaucher des renforts en déboursant le moins d’argent possible. Ce fut la tâche de Freddy Smets qui, l’année précédente, avait pleinement réussi dans une entreprise identique en rassemblant des éléments issus de D3 pour tenter de revenir parmi l’élite. Aujourd’hui, cette campagne des transferts est montrée du doigt. Il est évident que le noyau est trop large. 27 à 30 joueurs, en comptant les jeunes espoirs du club que le RWDM a protégé par un contrat en bonne et due forme, c’est trop. D’autant que certains arrivés durant l’entresaison n’ont pas encore apporté ce que l’on est en droit d’attendre d’eux. Pire, certains paraissent même un peu courts.

« Il n’est au RWDM que depuis trois mois »

Le premier départ ne sera-t-il pas celui de Patrick Thairet? C’est en tout cas ce que suppute une partie de la presse néerlandophone tuyautée par une taupe dans la maison. Het Nieuwsblad insinuait à l’issue de la défaite contre St-Trond il y a dix jours qu’une réunion couperet devait avoir lieu quelques jours plus tard et que le président Erik De Prins était prêt à remercier celui qui a fait monter le club.

« C’est complètement faux », rétorque Thairet. « Il ne pouvait pas y avoir de réunion décisive puisque Freddy Smets était en mission de repérage et de scouting en Guinée. Je sais d’où viennent les coups et qui lance de tels propos dans la presse. Ce n’est pas un hasard si ce sont des journaux du nord du pays qui relaient ces fausses infos. Cela vient de Jean-Marie Pfaff. Après la deuxième journée de championnat, la présence de Stéphane Demol dans les tribunes avait déjà intrigué des habitués du club… Pfaff était directeur technique à Turnhout et avait amené Demol comme entraîneur. Il est évident que Pfaff tente de scier les pieds de mon siège pour y placer son ami. Pfaff a été engagé pour s’occuper du secteur commercial du club. Qu’il se charge de faire venir des sponsors au club. Entre nous, c’est bonjour, au revoir pas plus. Surtout depuis qu’il distille ses infos. Il sait ce que je pense et n’est pas venu me demander des explications ou même infirmer mes propos. Mais je n’ai pas besoin de dépenser mon énergie à régler des comptes au sein du club. Néanmoins, il doit savoir et mes détracteurs aussi, que je ne vais pas me laisser faire par un homme qui n’est que depuis trois mois au RWDM. Moi, cela fait vingt ans que je vis et je travaille ici ».

Les luttes d’influence, il en existe dans tous les clubs de la planète. Le président préfère un tel, le sponsor un autre et le public encore un troisième. En effectuant des déclarations en public, Thairet dévoile le dessous des cartes. Celui qui, en principe, reste toujours secret. Non seulement il se protège et annonce la couleur mais il suscite des réactions.

Soutenu par De Prins

Un entraîneur sans résultats est inévitablement fragilisé. Mais la semaine dernière, Thairet a été rassuré quant au soutien incondionnel de l’unique décideur du club, le président De Prins: « Il faut rester calme et tenter de trouver des solutions en commun pour s’en sortir. Pour l’heure, je veux être très clair, Patrick n’est pas menacé. Je ne pense pas que les résultats actuels soient essentiellement dus à notre entraîneur. Il y a des joueurs qui doivent effectuer leur autocritique. L’arrivée de Mike Origi devrait permettre de rééquilibrer l’équipe. Mais il n’y a pas que le sportif en jeu. Ces derniers temps, je suis le seul à payer au sein du club. Alors, si certains veulent soutenir le RWDM, c’est le moment de venir et de mettre la main au portefeuille ».

Thairet est aussi très proche de Smets: « Nous travaillons main dans la main. Il a un passé d’entraîneur en D1 que je n’ai pas. Nous nous concertons régulièrement. Je connais Freddy depuis vingt ans. C’est un plus. Ce n’est pas une complicité récente et fabriquée. En ce qui concerne les transferts, j’avoue m’en être totalement remis à lui. Il savait ce qu’il nous fallait et il connaît les moyens financiers du club ».

En coulisses, le travail du très médiatique et coloré Pfaff ne semble pas faire l’unanimité. Commercialement parlant, ce n’est pas le flux de sponsors. Mais est-ce Pfaff qui ne vend pas bien ou le RWDM qui est difficile à vendre? Néanmoins, il a déjà entamé une série de travaux, notamment dans l’ancienne tribune L’Ecluse, qui n’ont pas obtenu l’approbation et pour lesquels les factures risquent de tomber sous peu. Il a également amené au club un soi-disant attaché de presse Richard Kawa, qui éprouve des difficultés à se fondre dans les méthodes de travail en vigueur depuis des années au club. Le RWDM est et doit rester un club familial et non un régiment de l’armée avec des règles strictes et le garde-à-vous permanent.

Un affrontement Smets-Pfaff?

Que Jean-Marie Pfaff joue les VRP du club et amuse la galerie dans les réceptions, c’est en partie son rôle. Il est toutefois responsable commercial et non sportif. Lui dont la carrière d’entraîneur s’est limitée à quelques apparitions furtives semble vouloir trop souvent se projeter dans le training de Thairet. Il se murmure au sein du club que l’échec de l’engagement de l’attaquant alostois Damir Stojak a été précipité par une indiscrétion dans la presse néerlandophone signée… Pfaff.

Erik De Prins va devoir rapidement redéfinir les zones d’influences car il existe un vrai danger de clash entre Freddy Smets, qui chapeaute l’ensemble de la politique sportive du club, et Jean-Marie Pfaff, censé s’occuper exclusivement du chapitre commercial.

Evidemment, Thairet n’est pas naïf au point de croire qu’il est indéboulonnable: « Mon travail ne peut jusqu’à présent pas être jugé. J’ai accueilli des renforts sur le tard et il en manque encore. Certains n’ont pas encore atteint le niveau requis mais si les résultats continuent à piquer du nez, je serai en danger. Car il arrive un moment où la direction se demande si c’est l’équipe qui n’est pas assez forte ou si c’est l’entraîneur qui n’en tire pas le maximum. Mais l’étude hollandaise publiée l’an dernier par Sport-Foot Magazine démontre que 80% des changements d’entraîneur n’amélioraient en rien les résultats de l’équipe. J’en ai connu en tant que joueur des limogeages… Seuls deux ont réellement fonctionné mais la réaction émanait directement des joueurs. C’était lors du renvoi de Philippe Garot et de Ladislav Novak remplacé par Smets. J’ai toujours été très philosophe par rapport à ce métier. Aujourd’hui, je reste convaincu d’avoir des solutions. Le jour où je n’en percevrais plus, ce sera autre chose. J’ai récemment lu une interview de Regi Van Acker, mon collègue du Lierse, qui disait qu’il n’avait que le foot dans la vie. Sans émettre un jugement, je trouve cela triste. Moi, j’ai d’autres pôles d’intérêt. Je donne le maximum que je peux pour le foot et j’ai envie de m’accrocher à ce métier mais j’ai traversé ces derniers temps des épreuves dans ma vie personnelle qui me renforcent dans l’idée que le foot n’est pas tout ».

Jean-Marc Ghéraille

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