PASSATION DE POUVOIR

C’était beau à voir. Au terme du match contre le Club, les supporters de Gand ont applaudi leur équipe, malgré sa lourde défaite 1-4. Les fans du champion sortant voulaient remercier une dernière fois leurs joueurs pour leur belle campagne et leur progression des deux dernières années. Leur geste venait du coeur. Pas d’agressivité, pas de concert de huées mais un football qui unit, comme il se doit : des clubs qui se muent en marque laissent libre cours à leurs émotions, conservent leur unité, ne se coupent pas de leurs racines et ne placent pas leur sort entre les mains de repreneurs étrangers.

Il en va de même au Club Bruges. Bien qu’il se soit professionnalisé et ait perdu une partie de son ancrage flandrien, il reste un club du peuple et pour le peuple. En toutes circonstances, il peut compter sur un public fidèle, qui est son patrimoine absolu. Le douzième homme a toujours typé le Club. Dans sa longue histoire, jamais le Club n’en a autant profité que cette saison. Il a disputé 18 matches à domicile et en a gagné 17, soit 51 points sur 54 ou un peu plus de 96 %.

Anderlecht fait nettement moins bien avec 47 points sur 59, soit moins de 80 %. Autre fait marquant chez les Mauves : il a gagné 8 de ses 19 matches à domicile par un seul but de différence. Et avec, souvent, un mauvais football. Comme dimanche contre Ostende. Entamer un match avec aussi peu d’enthousiasme à ce stade de la compétition est incompréhensible. Comment cette campagne va-t-elle être évaluée en interne ? Un changement d’entraîneur ne semble pas suffire, à lui seul, pour remettre cette équipe sur les bons rails.

C’est précisément contre Anderlecht que dimanche, le Club peut remporter le titre, dans une ambiance certainement très chaude. Le fait qu’Anderlecht soit le seul à s’être imposé au stade Jan Breydel en championnat (1-4) n’est qu’une parenthèse, pour l’heure. Le Club déborde d’assurance et compte sur ses supporters. La ferveur du public est imprimée dans l’histoire du Club. Y a-t-il eu temple plus bouillonnant que le Klokke ? Le public était si près de la ligne qu’il fallait tendre une corde pour l’écarter du terrain. Et pour botter un coup de coin, il fallait repousser plusieurs personnes. A cette époque, dans les années 60 et au début des années 70, le Club était un rouleau compresseur sur ses terres mais il perdait la moitié de ses moyens en déplacement.

La chaleur du public brugeois est aussi liée à l’attitude de Michel Preud’homme. Si le Liégeois est calme au moment d’analyser un match, il ne se contrôle pas toujours sur le terrain et sa passion gagne alors tout le banc. Les supporters adulent leur entraîneur. Preud’homme est encore plus admiré que Hein Vanhaezebrouck quand il a mené Gand au titre. Comme celui-ci, il détient la clef du succès. Le système de rotation de Preud’homme a fonctionné, l’équipe a atteint sa vitesse de croisière dans les PO1, avec les mêmes joueurs et le même système. Surtout, il n’a pas sombré dans la panique il y a trois semaines, quand Bruges a trébuché à Genk, s’exposant par là même aux pires scénarios.

Michel Preud’homme va bientôt délivrer le Club de onze ans de frustrations. Il ne lui a pas toujours été facile de faire conserver le bon cap aux joueurs mais depuis trois matches, le Club est une machine, une chaîne solide qui développe un football sidérant. Dimanche, à Gand, le Club a été dominé en première mi-temps et a pu s’estimer heureux que les Buffalos ratent plusieurs occasions, leur péché mignon, cette saison comme la précédente.

Mais le Club est efficace : 81 buts en 37 matches. Notre football vit une nouvelle passation de pouvoir. Il y a un an, les rapports de force semblaient changer, avec un nouveau club, Gand, dans les starting-blocks. L’épicentre se déplace maintenant vers Bruges. Remporter le championnat face à son plus grand rival, le Sporting, ne ferait que souligner cette passation de pouvoir.

PAR JACQUES SYS

A domicile, le Club a gagné 96 % des points.

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