Pas peur du Real !

Le capitaine du Barça sait que la confirmation d’un triplé historique passera par le Santiago Bernabeu.

Le 27 mai, à Rome, Carles Puyol est entré dans l’histoire en soulevant le trophée de la Ligue des Champions. A 31 ans, il a vécu l’événement pour la deuxième fois. Son nom est associé aux Blaugranas. Il sait que la saison à venir ne sera pas facile car le grand rival madrilène a fourni de gros efforts pour se renforcer. Il revient sur l’année magique du triplé et se projette dans le futur.

Quoi qu’il advienne, la saison 2008-2009 restera inoubliable pour le FC Barcelone…

Carles Puyol : Elle fut spectaculaire, assurément. Le jeu pratiqué a parfois frôlé la perfection, et depuis le début, on a pris beaucoup de plaisir. Les résultats ont été bons quasiment d’un bout à l’autre, si l’on excepte les deux premières journées de championnat où l’on n’avait pris qu’un point sur six. Et, ce qui ne gâte rien, l’ambiance dans l’équipe fut fantastique. Ce fut un triplé historique, qu’il faut savourer à sa juste valeur, en se disant que ce sera très difficile de faire aussi bien cette saison. Notre ambition est de continuer à travailler, et on verra où cela nous mènera. Le plus haut possible, j’espère.

Quelles furent les clefs du succès ?

Lorsqu’on forme un bon groupe, on est toujours enclin à fournir un petit effort supplémentaire pour son partenaire. Au-delà des qualités individuelles des joueurs, c’est un point sur lequel il faut insister. N’oublions pas qu’au deuxième tour, le Real Madrid a réalisé un parcours digne d’un candidat au titre, mais il est tombé sur un Barcelone qui n’a rien lâché.

 » Trois C1, c’est trop peu pour le Barça « 

Vous avez soulevé le trophée de la CL pour la deuxième fois de votre carrière…

C’était la troisième C1 de l’histoire du club, et j’en suis évidemment très heureux en tant que capitaine, mais c’est surtout l’équipe qui a réalisé l’exploit. Cela dit, on ne m’ôtera pas de l’idée qu’un club comme le FC Barcelone devrait avoir remporté le trophée plus souvent.

La prochaine finale de la CL aura lieu au stade Santiago Bernabeu. Si vous la disputez, ce sera très particulier, non ?

C’est sûr. Jouer une finale de Ligue des Champions est toujours un grand moment, et soulever le trophée est un accomplissement, mais le faire dans l’antre du grand rival madrilène ajoutera un peu de piment supplémentaire. Ce serait une jouissance pour les Catalans de triompher à Madrid.

A Rome, sept joueurs formés à La Masía étaient sur la pelouse. A Barcelone, la formation prend toute sa valeur, n’est-ce pas ?

C’est une grande fierté, car ce n’est pas évident d’introduire des jeunes du cru dans une équipe aux ambitions aussi grandes, et c’est encore moins évident de les faire jouer au niveau qui fut le nôtre la saison dernière. Les joueurs issus du centre de formation ne se sont pas contentés de participer à la finale, ils y ont joué un rôle fondamental.

La rénovation du contrat de Victor Valdés doit vous réjouir ?

Beaucoup. C’est une excellente nouvelle pour l’équipe. Et pour lui, c’est le mieux qui pouvait arriver.

Quel est votre défi personnel, désormais ?

Continuer à progresser, jour après jour, et donner le maximum pour l’équipe. Je pense traverser une bonne période de ma carrière et j’évolue dans une équipe fantastique, que demander de plus ?

En matière de rénovation de contrat, ce sera bientôt votre tour…

Effectivement, il me reste une année à prester. Je suis très serein face à cette échéance, je profite du moment présent et je ne me fais pas trop de soucis pour l’avenir. J’ai déjà dépassé la trentaine, mais mon souhait est toujours de continuer au FC Barcelone.

Envisagez-vous de terminer votre carrière chez les Blaugranas ?

Pourquoi pas ? Evidemment, en football, on ne sait jamais de quoi l’avenir sera fait. D’une année à l’autre, beaucoup de choses peuvent changer. Pour l’instant je suis bien, mais je sais que je ne rajeunirai pas. J’ignore jusqu’à quel âge je serai capable de jouer au plus haut niveau, et pour tout avouer, je ne me suis pas encore posé la question de mon avenir à long terme. Je vis au jour le jour.

L’image du petit baiser au brassard sur la pelouse du stade Santiago Bernabeu restera gravée dans beaucoup de mémoires. Que représentait-elle ?

Un moment d’euphorie, une célébration à laquelle j’ai goûté en mon for intérieur. J’étais fier de représenter Barcelone à Madrid, mais je n’ai voulu offenser personne. J’étais heureux pour moi et pour mes partenaires, c’est tout.

 » Les millions du Real doivent nous motiver « 

Le Real Madrid dépense des centaines de millions pour se renforcer. Cela vous effraie ?

Non. On ne doit avoir peur de personne. Le Real reste le Real, c’est normal qu’il engage de grands joueurs. A Barcelone aussi, on essaie toujours d’avoir les meilleurs, et je suis très confiant dans l’équipe qu’on possède. Les transferts réalisés à Madrid doivent contribuer à nous motiver. La Liga s’annonce passionnante et c’est très bien.

94 millions pour Cristiano Ronaldo, n’est-ce pas de la folie ?

Si certaines personnes ont déboursé cette somme, c’est qu’elles estimaient que le joueur la valait. Je n’ai pas d’avis là-dessus.

En ces temps de crise…

L’argent doit bien sortir de quelque part. Personnellement, je trouve effectivement que c’est exagéré, mais on entrerait alors dans un débat de société très compliqué. Je suppose qu’à Madrid, on est persuadé que l’investissement en valait la chandelle et qu’on récupérera cet argent d’une manière ou d’une autre.

Barcelone a-t-il besoin de se renforcer également ?

On possède déjà une bonne équipe, c’est sûr. Les résultats le prouvent. Mais on doit toujours essayer de s’améliorer. Le staff technique s’en charge, je lui fais confiance.

Les supporters catalans ne s’inquiètent-ils pas face à la fièvre acheteuse du Real, alors que leur club reste relativement discret ?

Il n’y a pas de quoi s’inquiéter. A l’une ou l’autre exception près, l’équipe sera la même que la saison dernière, et elle a fait ses preuves en réalisant un triplé historique. S’appuyer sur une bonne base, c’est aussi un atout.

L’écart entre les deux grands et les autres équipes ne risque-t-il pas d’encore s’accentuer ?

Il est certain que, sur papier, Barcelone et le Real possèdent des effectifs de qualité supérieure aux autres, mais il ne faut pas penser que la lutte pour le titre se limitera à deux équipes. Les expériences du passé l’ont déjà prouvé : des équipes comme Séville, Villarreal ou l’Atlético peuvent donner beaucoup de fil à retordre.

Dans l’immédiat, les prochains objectifs de Barcelone seront la Supercoupe d’Europe et la Coupe Intercontinentale ?

Les deux Supercoupes, je dirais. Il ne faut pas oublier la Supercoupe d’Espagne. En décembre, le rendez-vous du Championnat du Monde des clubs est souligné en rouge dans les agendas, car c’est un trophée qui manque encore au palmarès du club.

 » On retournera en Afrique du Sud pour gagner « 

Passons au chapitre de l’équipe nationale. Comment l’élimination en demi-finale de la Coupe des Confédérations, après 35 matches sans défaite, a-t-elle été accueillie ?

Il n’y a pas eu de tremblement de terre. Les plus belles séries ont une fin. C’est arrivé, voilà. Il faut maintenant retrouver le chemin de la victoire. Nous retournerons en Afrique du Sud en 2010 pour, espérons-le, remporter la Coupe du Monde.

Pas de raison de passer de l’euphorie au désenchantement, donc ?

En football, on peut être le meilleur un jour, et retomber le lendemain. On sait qu’en cas de défaite, on sera sujet à la critique. Cette expérience nous rendra plus fort.

Certes. Mais comment expliquer cette défaite contre les Etats-Unis ?

Il faut reconnaître que les Américains ont joué de manière très agressive dès le début. Ils avaient des joueurs très rapides. Ils ont tiré deux ou trois fois au but et leur pourcentage de réussite fut incroyable. Même si nous avons encaissé deux buts, je crois qu’il ne faut pas trop se préoccuper des erreurs défensives, car nous sommes très solides dans ce secteur.

D’un point de vue individuel, pensez-vous franchir le cap des 100 sélections ?

J’en suis actuellement à 76 et j’espère encore être sélectionné durant un bon moment, mais je ne me suis pas fixé d’objectif chiffré. Actuellement, l’Espagne joue beaucoup de matches, mon nombre de sélections a donc grimpé rapidement. C’est toujours un honneur de revêtir le maillot national et je continuerai à répondre avec beaucoup de plaisir aux convocations, jusqu’au jour où le sélectionneur me signifiera qu’il n’a plus besoin de moi.

Estimez-vous que l’Afrique du Sud soit prête à accueillir la Coupe du Monde dans un an ?

Pour tout avouer, on a vu peu de choses du pays. On a été bien accueilli et on n’a pas rencontré trop de problèmes, même si – et c’est un euphémisme – l’état des pelouses aurait pu être meilleur. Soit, c’était une première prise de contact et je suis sûr que les organisateurs fourniront les efforts requis pour améliorer ce qui doit l’être.

Le grand objectif, pour la génération actuelle, sera de clôturer le cycle par un succès en Coupe du Monde ?

C’est sûr qu’après avoir remporté le Championnat d’Europe, après 44 ans d’attente, on aimerait entrer dans l’histoire en inscrivant pour la première fois la Coupe du Monde au palmarès de l’Espagne. Si cela devait arriver, il faudra évaluer la situation : mettre un terme à ma carrière internationale, en partant en pleine gloire, ou continuer avec le risque de faire l’année de trop. Pour l’instant, j’espère continuer au minimum jusqu’à la Coupe du Monde.

Voyez-vous en Gérard Piqué votre successeur ?

Il a tout pour le devenir. C’est l’un des meilleurs arrières centraux du monde. Il s’est très bien adapté, a conquis ses galons de titulaire dès sa première saison à Barcelone et est devenu un joueur très important pour l’équipe. Selon moi, il restera le défenseur central du Barça et de la Selección pendant de nombreuses années.

On a l’impression que la concurrence devient de plus en plus rude…

C’est le cas. Il y a de très grands joueurs en Espagne et les nouvelles générations s’annoncent prometteuses également. Nous sommes dans une bonne période. Actuellement, un groupe a été formé et il subit très peu de modifications. Après la Coupe du Monde, il sera peut-être temps d’opérer un renouvellement des cadres.

A fait toute sa carrière au FC Barcelone, dont il est aujourd’hui le capitaine. A débuté en équipe Première en 1999-2000 et ne l’a plus quitté depuis. 76 fois international.

Palmarès : 3 titres (2005, 2006 et 2009), une Coupe du Roi (2009), deux Ligues des Champions (2006 et 2009). Champion d’Europe avec l’Espagne en 2008.

par alfredo martinez (esm)

« La prochaine finale de CL a lieu à Madrid : un piment supplémentaire. » »Je ne me suis pas encore posé la question de mon avenir à long terme.

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