PAS FOU !

Le jeune flanc gauche (20 ans) est le cinquième produit du Futurosport à avoir été titularisé cette saison.

2006 après Jésus Christ. Tout l’Empire de Romain est occupé. Tout ? Non. Une enclave hennuyère en territoire flandrien résiste à l’envahisseur…

 » Ce sont uniquement des manifestants extérieurs qui créent parfois des problèmes « , tempère FrancisHaghedooren, le père de Romain.  » Lorsque des gens du Taal Aktie Komitee viennent d’Anvers ou d’autres régions du pays. Mais, au sein de l’entité de Comines-Warneton, on vit en paix. Il y a certaines obligations, comme celle d’être bilingue pour exercer mon métier de facteur, mais il faut prendre le côté positif : on est de vrais Belges. Mon père est originaire de Torhout, près de Bruges, et mon grand-père a longtemps habité à Langemark, près d’Ypres. Romain est francophone, mais il a fréquenté une école néerlandophone, à Wervik. Il est bilingue, c’est un avantage « .

 » Dugardein et Besengez étaient mes idoles  »

Après PacoSanchez, JeanPhilippeCharlet, BastienChantry et DaanVanGijseghem, RomainHaghedooren (20 ans) est le cinquième produit du Futurosport à avoir été titularisé en équipe Première de Mouscron, cette saison. Et lui, c’est un vrai : il porte le maillot hurlu depuis 11 ans. Il n’avait que neuf printemps lorsqu’il a débarqué en provenance de Wervik et a même assisté à la… naissance du Futurosport.  » Au début, je m’entraînais encore sur les terrains de la rue de la Fraude « , se souvient-il.  » Lorsque le Futuro a été créé, on a bénéficié d’installations formidables, et avec la montée du club en D1, on a aussi rencontré des adversaires plus prestigieux. Au lieu d’affronter les petits clubs de la région, on a pu se mesurer à Anderlecht. Là, je me suis dit : – Waw ! J’ai fait partie de la génération de Jeanvion Yulu-Matondo (Bruges) et de Christian Kabeya (Aston Villa). J’ai aussi joué avec Jonathan Blondel, bien qu’il soit plus âgé que moi. A l’époque, j’étais surclassé, lui pas encore. Lorsque l’Excel a remporté le tour final de D2, en 1996, j’étais dans l’ Espaces Jeunes. Mes idoles s’appelaient SteveDugardein et OlivierBesengez. La première fois que j’ai partagé avec eux le vestiaire des grands, cela m’a fait tout drôle « .

Les débuts de Romain dans le noyau A ne datent pas de ce championnat-ci, mais de la saison dernière : GeertBroeckaert l’avait fait monter dans le dernier quart d’heure d’un match à Zulte Waregem qui tournait au vinaigre.  » Lorsque j’ai pénétré sur l’aire de jeu, en remplacement de Mustapha Oussalah, le marquoir affichait 4-0 « , se souvient Romain.  » Au coup de sifflet final, c’était 4-1. D’une certaine manière, je peux donc me vanter d’avoir gagné 0-1. Certains joueurs ne gardent pas un très bon souvenir de Broeckaert. Moi oui : c’est l’entraîneur qui m’a lancé et cela ne s’oublie pas. Je lui en serai éternellement reconnaissant. Pourtant, j’en ai bavé. Mes partenaires peuvent témoigner de tous les tours de terrain que j’ai accomplis à l’entraînement…  »

 » Heureusement, j’ai échappé au piano  »

 » Lorsque Romain a atteint l’équipe Première, il a réalisé son rêve « , témoigne Francis.  » Combien de fois ne m’a-t-il pas confié, lorsqu’il avait cinq ou six ans : -Plus tard, papa, je serai footballeur professionnel ! J’avoue que je n’y croyais pas. Je me souviens avoir glissé, un jour, à l’oreille de mon épouse : – Romain va être trop court ! Pourtant, je l’ai moi-même entraîné pendant deux ans, en Diablotins, et je voyais qu’il avait déjà certaines capacités. Mais footballistiquement, il n’est pas le fils de son père. J’étais un dur, je courais vite et longtemps ; Romain n’a jamais eu une bonne endurance. Et jadis, il était trop vite content de lui. Au foot comme à l’école. Son leitmotiv, c’était : pourquoi essayer d’avoir une grande dis lorsqu’on peut passer avec 60 % ? De ce point de vue-là, il a fort changé. Le travail a fini par payer. Je lui tire mon chapeau. Maintenant, j’espère qu’il ne s’arrêtera pas en si bon chemin. Heureusement qu’il ne s’est pas orienté vers le piano…  »

 » Ma maman, effectivement, aurait préféré que je suive des cours de musique « , rigole Romain.  » Cela ne m’enchantait pas outre mesure et je ne pense pas que j’aurais, un jour, participé au Concours Reine Elisabeth « .

 » Et moi, je ne pense pas que j’aurais été aussi assidu pour aller conduire mon fils au solfège « , renchérit Francis.  » En fait, Romain a eu la chance que je n’ai pas eue. Mon père était chauffeur routier : il partait tôt le matin et rentrait tard le soir. Je le voyais très peu. Lorsque je lui demandais si je pouvais aller m’entraîner, il me répondait : – D’accord, fiston, prendstonvélo ! Romain a toujours bénéficié de mon véhicule. Sous cet aspect-là, être facteur était un avantage : j’effectuais ma tournée le matin, et l’après-midi, j’étais libre pour conduire Romain à Mouscron. Mais, s’il a bénéficié de certaines facilités, Romain a aussi eu le mérite de mordre sur sa chique. Il est très bien revenu après une grave blessure « .

 » Une fracture de la malléole, lors d’un match de Juniors à Lokeren « , précise Romain.  » C’était la dernière journée de championnat. Au lieu de partir en vacances, je me suis rendu à l’hôpital. Mais ce n’est rien en regard de ce qu’a connu mon cousin MathieuDejonckheere : d’abord une fracture du tibia/péroné, puis un accident de voiture avec sa copine, et enfin le décès de son papa. J’ai essayé de le soutenir dans les moments difficiles qu’il a traversés. Après avoir également fréquenté le Futurosport, il joue aujourd’hui à Deinze, en D2 « .

 » Romain est un garçon très sociable « , souligne son père.  » Je crois qu’il est apprécié dans le groupe… mais pas de tous. Je me souviens d’un tacle très viril de Suad Filekovic, en début de saison dernière, à l’entraînement. Si mon fils n’avait pas sauté, il était bon pour un nouveau séjour à l’hôpital. J’ose espérer que ce n’était qu’une coïncidence s’il était, lui aussi, un arrière gauche « .

 » Ma maman est joueuse de foot  »

Lorsqu’il a signé son premier contrat pro, l’été dernier, Romain ne s’attendait pas à devenir titulaire aussi tôt. Au départ, il était la doublure de DavidGrondin pour le poste d’arrière gauche, mais c’est finalement au poste de milieu gauche qu’il a reçu sa chance.  » JonathanTohoua a traversé une période de méforme et GilVandenbrouck a fait appel à moi pour le déplacement à Charleroi « , explique-t-il.  » J’étais assez nerveux et j’ai dû chercher mes marques, mais depuis lors, je trouve que je progresse de match en match. L’entraîneur doit être satisfait également, puisqu’il continue à me faire confiance « .

 » Pour ce match à Charleroi, nous étions 11 membres de la famille à être allés l’encourager « , souligne Francis.  » Nous sommes très liés dans la famille, et nous essayons de se soutenir l’un, l’autre. Le destin de Romain était tout tracé. Savez-vous que sa… maman a elle aussi joué au football ? Elle était gardienne de but. Elle n’a pas joué à un très haut niveau, mais elle a tout de même affronté, un jour, l’équipe nationale belge de mini-foot en match amical « .

En parlant d’équipe nationale : Romain a été appelé dans celle des -20 ans qui s’est imposée en Italie, il y a 15 jours.  » Un souvenir formidable « , sourit-il.  » Le fait que je joue désormais en D1 n’y est sans doute pas étranger, car je n’ai jamais été un habitué des sélections nationales « .

DANIEL DEVOS

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