Pas à l’aise au 10

Souvent malmené comme le Sporting, cette saison, le Clabecquois répond aux critiques dont il fait l’objet.

Au-delà du 3 à 0 sévère qui a scellé le match aller des huitièmes de finale de la Coupe de l’UEFA entre le Panathinaïkos Athènes et le RSCA, jeudi passé, comment ne pas mettre en exergue, également, le sentiment général d’impuissance des Sportingmen à cette occasion? Rarement dans sa longue histoire européenne, le club bruxellois nous parut aussi démuni, sur tous les tableaux, que ce soir-là. Au plan individuel d’abord, chacun des Mauves, sans exception, aura dû reconnaître son maître dans son homologue grec. Et contrairement à ce qui s’était produit au tour précédent de l’épreuve, face à Bordeaux, le collectif ne se révéla d’aucun secours. C’est qu’il n’y avait pas la moindre unité de pensée dans cette phalange anderlechtoise, incapable de défendre, comme l’atteste éloquemment le score final, et inapte à créer le moindre danger devant le but adverse. Une seule opportunité réelle, en l’espace de 90 minutes, sur un coup franc de Walter Baseggio, suffit amplement à traduire l’étendue de cette misère.

Walter Baseggio: D’un bout à l’autre de la rencontre, nous n’avons malheureusement jamais su trouver la parade face à l’opposant. Il n’y a pas grand-chose à redire, selon moi, sur notre conception de jeu, dans la mesure où la même tactique nous avait permis de signer une prestation de choix face aux Girondins. Sur le papier, tout avait été élaboré de manière aussi minutieuse. En ce qui concerne la ligne médiane, nous savions que dans un système à trois, nous risquions de nous trouver en infériorité numérique face à un entrejeu fort de quatre éléments. Pour y remédier, nos propres arrières latéraux avaient pour mission de presser haut les hommes de couloir, afin de pouvoir lutter, en définitive, à cinq contre quatre sur cette portion du terrain. Mais de la théorie à la pratique, la marge était énorme. Les deux flancs athéniens étaient non seulement bien inspirés mais aussi idéalement secondés par leurs backs. Pour les contrer, Lovré et moi-même avons dû quitter souvent l’axe central et, de ce fait, la paire centrale Basinas-Karagounis a bénéficié d’une grande liberté de manoeuvre, avec le résultat final que l’on sait. Même si un miracle n’est pas à exclure, tout porte à croire que notre aventure européenne s’arrêtera. Il faudra alors mettre tout en oeuvre pour accrocher la deuxième place…

N’est-ce pas une maigre consolation pour un club qui était donné favori par la plupart des observateurs?

On vit une campagne décevante, c’est sûr. Mais si elle débouche sur une participation aux qualifications pour la plus prestigieuse épreuve européenne, le Sporting aura réussi à préserver l’essentiel. A choisir, mieux vaut être éliminé en Coupe de Belgique et terminer deuxième du championnat qu’être toujours en lice dans cette épreuve et mettre le grappin sur la troisième place du tableau final comme nous l’avions fait la saison passée avec, à la clé, un ticket en UEFA. Pour le club et les joueurs, il est plus intéressant, évidemment, de se produire en Ligue des Champions. Nous allons mettre tout en oeuvre pour y parvenir, même si la lutte s’annonce ardue, jusqu’au bout, face à ceux qui nous talonnent et plus particulièrement le Lierse et Lokeren, à mon sens. En valeur individuelle, nous n’avons strictement rien à envier à ces deux équipes. Mais en matière de cohésion, elles présentent peut-être un ensemble mieux huilé que nous. Au Sporting, bon nombre de joueurs se sont relayés dans plusieurs systèmes depuis le début de la saison alors que ces teams-là, justement, ont le plus souvent pu tabler jusqu’ici sur les mêmes joueurs et approche. »Le 4-4-2 me convient mieux »

En Runar Kristinsson et Marius Mitu, ces deux phalanges possèdent aussi un véritable régisseur. Vous n’avez pas la même efficacité, au grand dam de votre coach qui n’a pas hésité, à plusieurs reprises, à stigmatiser ce manque d’envergure depuis son arrivée au Parc Astrid l’été dernier.

D’abord, je ne pense pas avoir l’étoffe d’un véritable numéro 10. Ensuite, je ne vois vraiment pas comment, dans la conception actuelle, je pourrais m’ériger en plaque tournante. L’entraîneur me demande de remplir trois rôles à la fois: celui de pare-chocs devant la défense, d’agent de liaison et de distributeur. Désolé, mais aucun joueur n’est capable d’assumer toutes ces fonctions en même temps. Et c’est probablement la raison pour laquelle mes prestations laissent parfois à désirer. Depuis qu’Anderlecht joue en 4-3-3, j’éprouve des difficultés à donner le meilleur de moi-même. Mes meilleures performances remontent au début de la saison, au moment où l’équipe jouait encore en 4-4-2. Dans cette configuration et en soutien de Gilles De Bilde, je pense avoir livré plusieurs matches de bonne facture. En y regardant de plus près, c’est ce système-là, aussi, qui m’avait permis de m’exprimer à bon escient dans le passé. C’est dans le dos de Pär Zetterberg d’abord, puis d’Alin Stoica, que j’ai disputé mes meilleures rencontres. En revanche, chaque fois que l’équipe a joué sans meneur de jeu spécifique, j’ai eu beaucoup plus de difficultés à me situer. C’est pourquoi je ne serais pas opposé au retour de Zet ou à l’acquisition d’un joueur de la même trempe. Dans ce cas, je pourrais occuper ma place de prédilection: relais entre la défense et le milieu offensif.

D’aucuns estiment que vous manquez d’abattage pour remplir cette mission?

Foutaises. Au moment de débarquer au Parc Astrid, pendant l’été ’99, Aimé Anthuenis avait été l’un des premiers à dire que j’avais toutes les qualités pour me tirer d’affaire dans cette attribution. Sans quoi, je ne me serais sans doute pas vu décerner tour à tour les titres de Jeune Pro de l’Année en 2000 et de Footballeur Pro de l’Année en 2001. D’accord, au même titre que le Sporting, je n’ai plus rien gagné dans l’intervalle. Mais de là à m’accabler de tous les maux, il y a une marge. Je m’insurge contre ceux qui ont affirmé que j’avais livré une saison catastrophique l’année passée. Les chiffres l’attestent puisque j’avais inscrit dix buts et délivré huit passes décisives rien qu’en championnat. Aussi loin que je me souvienne, jamais encore je n’avais eu des statistiques aussi favorables. Cette saison encore, j’avais bien entamé la compétition, au même titre que l’équipe d’ailleurs, avant que l’entraîneur ne chamboule subitement tout suite à la perte de quatre points contre La Gantoise et l’Antwerp. Depuis lors, pour les raisons évoquées plus haut, j’ai eu quelquefois de la peine à m’exprimer dans le nouveau schéma tactique. Mais de là à me montrer toujours du doigt, et rien que moi, c’est trop facile. »J’aurai ma revanche chez les Diables »

Entre les matches contre les Buffalos et les Anversois, début septembre, les Diables Rouges disputèrent leur première rencontre qualificative pour l’EURO 2004 contre la Bulgarie. Ce jour-là, vous n’aviez pas été à la hauteur. Pourtant l’équipe nationale jouait en 4-4-2, votre système de prédilection.

C’est vrai, j’étais passé à côté de mon match ce soir-là. Je ne cherche pas d’excuse, même si j’avais déjà joué dans un climat plus favorable qu’en cette occasion précise. Pour ne pas avoir brillé face aux Buffalos, j’en avais pris pour mon grade dans une certaine presse. Le quotidien néerlandophone Het Laatste Nieuws avait d’ailleurs titré « Baseggio à défaut de mieux » dans l’optique de cette joute. C’était quand même limite, non? Je ne prétends pas que cette phrase m’a perturbé. Elle est tout de même lourde de signification. Les victoires face à Andorre et l’Estonie ont, certes, contribué à calmer les esprits. Mais il a suffi que la Belgique l’emporte sans moi en Algérie, pour que quelques-uns s’interrogent à nouveau sur mon avenir en sélection, entendu que Thomas Buffel s’impose comme une valeur sûre. A ceux-là j’aimerais simplement répondre ceci: je brûle d’impatience de pouvoir jouer au côté d’Yves Vanderhaeghe en soutien du maître à jouer de Feyenoord. Cette configuration-là, avec Bart Goor à ma gauche, ne serait pas sans rappeler les tout bons matches livrés par Anderlecht en Ligue des Champions, quand j’étais entouré des mêmes hommes et derrière un trio offensif composé de Jan Koller, Tomasz Radzinski et Alin Stoica. Et j’espère bien pouvoir le démontrer dès le 29 mars prochain en Croatie. Pour ce faire, il faut toutefois que je ne joue plus de malchance. Comme contre l’Algérie, lorsqu’une stupide blessure m’avait contraint de déclarer forfait in extremis. Mais j’aurai de toute façon ma revanche.

Il n’y a pas qu’une certaine presse ou Hugo Broos qui ont tiré à boulets rouges sur vous. Même le président d’honneur, Constant Vanden Stock, estime que vous n’avez pas répondu à l’attente?

Je peux mieux faire, j’en suis conscient. Mais encore faut-il que le cadre d’expression soit idéal. Et le 4-3-3 actuel, où je figure au sommet du triangle, au milieu, en lieu et place de la base, ne sert pas mes intérêts, voilà tout.

Une autre critique, récurrente, concerne votre poids: ne vous simplifieriez-vous pas la vie, une fois pour toutes, en accusant quelques kilos de moins?

Je pèse 82 kilos pour 1 mètre 84. Exactement comme Ronaldo, dont le tour de taille fait autant jaser que le mien apparemment (il rit). Ce qui ne l’empêche pas de marquer des buts précieux, comme contre le Borussia Dortmund récemment. Une fois, dans le passé, je me suis situé sous la barre des 80 kilos. Et je n’ai absolument rien réussi de bon durant cette période. Dès lors, je préfère rester comme je suis, même si ça… alimente la polémique. Tant pis, on ne peut pas plaire à tout le monde.

Bruno Govers

« 10 buts et huit assists en championnat l’an passé! Une saison catastrophique? »

« Broos me demande de remplir trois rôles à la fois »

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