Partira, partira pas ?

L’avant égyptien s’amuse à faire paniquer ses dirigeants. C’est déjà la deuxième fois cette saison qu’il annonce vouloir s’en aller.

Quand l’international égyptien Ahmed Hassan s’était plaint après son arrivée dans le noyau, les dirigeants anderlechtois furent attentifs mais aussi rationnels. Le joueur souffrait dans son adaptation et il fallait l’aider. Certes. Mais il ne jouait pas tous ses matches et n’était pas titulaire, non plus… ceci pouvant sans doute expliquer cela.

Récemment, Hassan en a remis une couche dans ses complaintes. Et Anderlecht l’a encore mieux écouté. Car le bonhomme a sorti des matches dignes de sa réputation et est devenu l’un des pions essentiels au fonctionnement maximal des Mauves. C’est aussi simple que ça.

Son problème familial

 » Je suis extrêmement sensible aux efforts entrepris par la direction du Sporting, et le manager Herman Van Holsbeeck en particulier, pour la réunification de ma famille ici. Cela pourrait-il m’inciter à rester ? Le n£ud du problème dépasse le cadre strict de mon épouse et de mes trois enfants. Voilà près de dix ans que j’ai quitté l’Egypte, à destination de la Turquie d’abord, où j’ai joué tour à tour à Kocaelispor, Denizlispor, Genclerbirligi et Besiktas, puis de la Belgique, où j’ai abouti en début de saison au Parc Astrid. Je suis le seul fils d’une famille de sept enfants et je me sens investi de certaines responsabilités envers les miens. Non seulement dans le ménage mais aussi à plus vaste échelle. En 2005, alors que j’en étais à ma deuxième saison dans le club stambouliote, j’ai songé une première fois à retourner définitivement au pays. Mais la phase finale de la Coupe d’Afrique des Nations 2006, qui m’avait vu triompher à la tête des Pharaons ainsi que ma désignation de meilleur joueur du tournoi m’avaient finalement incité à différer ce come-back. D’un côté, je suis satisfait d’avoir pris cette décision car après une adaptation difficile, je pense avoir prouvé depuis l’entame du deuxième tour que je suis en mesure d’apporter quelque chose au RSCA. D’un autre côté, je dois bien avouer que ma famille, dans son sens large, me manque. Le Caire n’est situé qu’à une heure et demie d’avion d’Istanbul. De ce fait, ma femme et mes enfants me rendaient souvent visite là-bas. Moi-même, dès que l’occasion se présentait, je m’envolais en direction de l’Egypte. Parfois, pour une journée seulement. Je partais tôt le matin et je revenais tard dans la soirée. Ici, pareil arrangement n’est pas possible puisque plus de quatre heures de vol séparent Bruxelles de la capitale égyptienne. Je suis donc forcé de devoir composer sans les miens et, par moments, c’est dur. Il ne faut pas oublier que mon épouse était enceinte lors de mon arrivée en Belgique et que la naissance de ma petite fille s’est déroulée sans moi. Depuis la trêve, je n’ai plus vu la petite dernière ainsi que mes fils. Sans compter tous les autres membres de la famille. C’est pourquoi, je vais bien réfléchir dans les semaines à venir pour déterminer quelle orientation donner à ma carrière. Je ne suis pas le seul dont l’avenir est entouré d’un point d’interrogation au Parc Astrid. D’autres suscitent tout autant les convoitises. Qui peut garantir qu’ils seront toujours là dans quelques mois ? Si Nicolas Frutos, Mbark Boussoufa ou Mémé Tchité s’en vont, tout sera une nouvelle fois à refaire en matière d’automatismes. C’est probablement l’une des raisons pour lesquelles il est difficile d’en arriver à ce fameux football champagne dont beaucoup parlent ici « .

Les yeux doux de Galatasaray

 » Le Gala n’est pas le seul club à me faire un appel du pied. Depuis que j’ai manifesté l’intention de rentrer au Caire, d’autres se sont signalés, surtout dans la région du golfe Persique, à Dubaï et au Qatar notamment. A près de 32 ans, je veux toujours privilégier l’aspect sportif. En tant que footballeur, j’ai encore de grandes ambitions. Comme qualifier l’Egypte pour la phase finale de la Coupe du Monde 2010 qui se déroulera pour la première fois en Afrique. Si je veux matérialiser cet objectif, je dois bien sûr pouvoir continuer à évoluer dans une compétition de haut niveau. Je ne pense pas que les Emirats Arabes Unis répondent à ce critère. Il n’est pas impossible que j’aboutisse là-bas un jour. Mais ce ne sera sûrement pas dans l’immédiat. A choisir, je préfère de loin rester à Anderlecht. Quant à l’intérêt du Gala, c’est un honneur car il s’agit d’un des trois grands de la Turquie, avec le Besiktas et Genclerbirligi. La faisabilité me paraît toutefois peu probable, dans la mesure où il est toujours délicat, là-bas, de passer d’un club à l’autre en raison des rivalités. L’idéal, c’est un retour en Egypte. Des clubs comme Al Ahly ou le Zamalek du Caire y tiennent le haut du pavé chaque année, tant sur le plan national qu’international puisqu’ils sont tous deux multiples champion d’Afrique. La rivalité est grande entre les deux et si j’ose prendre position, c’est la révolution là-bas. Et puis, je suis plutôt pour Ismaïlia, le troisième grand club égyptien dont j’ai défendu les couleurs avant de mettre le cap sur la Turquie « .

Première expérience dans un pays non musulman

 » La Belgique, c’est un enrichissement. J’avais toujours été habitué à une seule foi. Ici, j’ai sympathisé avec des personnes qui ont un autre culte, voire pas de religion du tout. On m’a toujours respecté au Parc Astrid, même si je n’y avais pas les mêmes habitudes que certains de mes coéquipiers. Et moi-même, j’ai toujours adopté une attitude similaire envers eux. Il n’y a jamais eu le moindre problème. Au contraire, il y a eu énormément de compréhension mutuelle. Toutefois, lorsqu’on a invariablement baigné dans l’islam, comme moi, il est compréhensible d’avoir davantage de repères dans un pays musulman. Mais je ne suis pas trop dépaysé à Bruxelles. J’y ai même découvert un cercle égyptien. Istanbul, qui est quand même une ville beaucoup plus grande, ne possède pas cette richesse. Mais c’est vrai qu’après quelques semaines j’avais émis le désir de partir. Il y avait la barrière de la langue et le football. Dans ces deux domaines, j’avais l’impression d’être incompris. Pas mal de choses ont changé quand les dirigeants ont décidé de détacher Abdel Tantush auprès de moi. Il était important que j’aie quelqu’un qui me sert d’interprète et de guide dans la vie de tous les jours « .

Il s’estime à 70 %

 » Sur le terrain, tout a fini par s’arranger aussi. Au départ, je ne trouvais ni mes marques, ni mes partenaires. Après huit mois de vie commune, je sais parfaitement comment il faut alerter Boussoufa, Frutos ou Tchité. L’un aime être servi dans les pieds, l’autre dans les airs et le troisième en profondeur. Il m’a fallu du temps pour assimiler tout ça, c’est logique. Et je pense qu’on n’a pas encore vu le véritable Ahmed Hassan. Le meilleur est encore à venir. Certains se sont enthousiasmés après mon hat-trick contre Charleroi. Mais un jour, j’ai planté cinq buts au gardien adverse en Turquie. Je suis donc capable de faire à la fois mieux à la finition et aussi à la construction. Ce n’est que depuis le début du deuxième tour que j’ai le sentiment d’être enfin d’un apport précieux à l’équipe. Pour l’heure, il est de 70 %. J’espère augmenter sensiblement ce pourcentage d’ici la fin de la saison. L’entraîneur, Frankie Vercauteren, le répète souvent : il ne suffit pas d’avoir du talent, il faut surtout du rendement. Je pense que je mets mes aptitudes au service du collectif, comme on me le demande. On ne pourra jamais me reprocher de ne pas mouiller mon maillot ou de ne pas me défoncer pour les autres. Cette attitude-là, je l’ai toujours eue en moi. Pour faire la différence, il convient d’être supérieur aux autres en tous domaines. J’ai la chance d’avoir reçu des qualités à la naissance. Mais elles ne me serviraient pas à grand-chose si je n’avais pas le souffle et une bonne lecture du jeu. C’est grâce à la combinaison de ces trois facteurs que je suis devenu le footballeur que je suis aujourd’hui « .

Sa solution pour le foot belge

 » Je m’étais informé auprès de quelques compatriotes qui ont joué chez vous comme l’ex-gardien du Club Bruges Ibrahim Nader El Sayd, l’avant gantois Ahmed Mido Hossam et Tarek El Saïd, qui a d’ailleurs porté le maillot anderlechtois sans être parvenu à s’imposer. Tous m’ont encouragé à tenter l’aventure et, avec le recul, je ne m’en plains pas. Ici, tout est organisé, structuré. Il n’y a jamais de surprise de dernière minute. Les footballeurs sont payés à heure et à temps, ce qui ne se vérifie pas toujours en Turquie, loin s’en faut. C’est d’ailleurs l’un des motifs pour lesquels j’avais quitté Denizlispor à destination de Genclerbirligi. Je connaissais des grands joueurs d’ici comme les Standardmen Sergio Conceiçao ou Milan Rapaic mais j’en ai découvert d’autres : Steven Defour et Karel Geraerts dans l’équipe liégeoise, Patrick Ogunsoto à Westerlo, Thomas Chatelle et Tom Soetaers à Genk, François Sterchele au Germinal Beerschot. Il y a quand même une chose qui m’étonne : vous avez pas mal de bons joueurs mais l’ensemble manque de relief, aussi bien au niveau de l’équipe nationale que de la valeur du championnat. Je me demande dans quelle mesure les clubs belges ne devraient pas s’inspirer de ce que font les grands en Egypte. A Al Ahly ou au Zamalek, les dirigeants se donnent les moyens, chaque année, pour garder les meilleurs. C’est pourquoi ces deux clubs sont emblématiques, non seulement en Egypte mais aussi à l’échelon continental. Ici, manifestement, c’est différent. Au PSV et au Bayern, la Belgique a deux représentants dans les quarts de finale de la Ligue des Champions, Timmy Simons et Daniel Van Buyten. Et, si j’ai bien compris, des tas d’autres bons joueurs font le bonheur de clubs néerlandais actuellement. Ne vaudrait-il pas mieux retenir tout ce beau monde en Belgique ? Le football, ici, ne pourra que s’en porter mieux. Gardez les meilleurs et entourez-les d’étrangers de valeur et le football décollera ici comme il l’a fait en Turquie « .

Un championnat sans grand suspense

 » En Turquie, les trois grands clubs d’Istanbul bataillent chaque saison pour le titre et bien malin qui peut en prévoir l’issue. D’autant plus que, chaque année, une autre équipe joue toujours les trouble-fête. Comme Trabzonspor par exemple. Ici, je m’attendais à un même cas de figure avec les quatre équipes les plus emblématiques : Anderlecht, le Club Bruges, Genk ainsi que le Standard. Mais seuls le Sporting et le Racing tiennent la distance. C’est peu à un tiers de la fin de la compétition. Je m’attendais quand même à une lutte au finish « .

par bruno govers – photos : reporters/ schroeder

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