Paroles liégeoises

Un homme a eu plus de mérites que d’autres samedi passé dans le chaudron de Sclessin : Johny Ver Eecke. L’arbitre fut tout simplement le meilleur acteur d’un match que le vent, actif de la première à la dernière minute de jeu, tenta en vain de secouer. Pourtant, il y avait de l’électricité dans l’air après une semaine de folie où le Standard ne quitta jamais la Une de la presse nationale. Aucun club belge ne déclenche autant de décharges d’adrénaline que le Standard. Après les événements de Gand, et les deux penalties oubliés, cela frisa parfois la crise d’apoplexie. Suite à ce brouhaha, le Standard a bien communiqué afin de restaurer une image de marque écornée par les excès de langage et des attitudes condamnables.

Lundi dernier, le Standard expliqua sa rancune, effaça le mot corruption de ses pensées et le remplaça par  » manque de psychologie et d’autorité  » de l’arbitre, s’excusa auprès de Gand et de ses stewards, se désolidarisa de Gianni Calabrese (l’homme à l’imperméable noir dans les catacombes de Gand) qui n’est pas le chauffeur de Luciano D’Onofrio mais une de ses connaissances et le patron d’un restaurant à Liège. C’était un pas dans la bonne direction et PierreFrançois, le directeur du club, cerna bien l’importance des mots, des sentiments et des impressions à faire passer.

Trois jours plus tard, au Sart-Tilman, Luciano D’Onofrio rejoignait Pierre François dans cet exercice. Il le fit dans la magnifique demeure du Professeur Jean-Yves Roginster, membre du conseil d’administration du Standard, locomotive du CHU de Liège. Le choix de ce lieu permettait à Luciano D’Onofrio de prendre du recul par rapport à Sclessin où étaient restés Pierre François et Michel Preud’homme. Cette deuxième phase de l’offensive de charme concernait plus Luciano D’Onofrio que le club. De plus, la présence de Jean-Yves Roginster, tout comme celle de Louis Smal, symbolisait l’intérêt des forces vives liégeoises pour les Rouches.

Elles craignent que leurs problèmes ne lassent Robert Louis-Dreyfus et Luciano D’Onofrio.  » Sans eux, il y aurait Kinépolis à Sclessin « , affirma Jean-Yves Roginster. Louis Smal persévera même sur cette lancée :  » Pour que la région gagne, il faut que le Standard gagne « .

On en demande trop à un club de foot. Ne faut-il pas deviner là quelques raisons d’une pression infernale imposée au Standard ? C’est un étendard mais il ne peut porter le poids de la crise économique (même s’il n’y a pas que la sidérurgie à Liège) et d’étranges frustrations véhiculées par la presse régionale. On a lu, à tort, que Liège ne compte pas sur la scène nationale, ne possède plus de ministres en vue (qu’en pensent Michel Daerden, Robert Collignon, Laurette Onkelinkx et Didier Reynders ?), est négligé par les pontes hennuyers du PS, Elio Di Rupo et Jean-Claude Van Cauwenberghe. Et quand on mêle les soucis sportifs du Standard à ce maelström négatif, c’est l’explosion.

Cigare au bout des doigts, un verre de Château Canon à la main, Luciano D’Onofrio a expliqué que des mots ( voleur, etc.) avaient été prononcés dans le feu de l’action à Gand. Il les assume, les explique par sa révolte pour les Rouches, et rappelle n’avoir échangé aucun coup avec personne. Luciano D’Onofrio ne parla plus d’erreurs d’arbitrage intentionnelles, constata que l’homme en noir ne s’était pas excusé auprès du Standard mais qu’il serait toujours le bienvenu à Sclessin. Pour lui, les arbitres sont parfois victimes d’un conditionnement psychologique. Par qui ? Tente-t-il de contrecarrer l’influence de Michel D’Hooghe, personnalité la plus importante du football belge ?

Il ne cita pas de nom, préférant que la presse mène son enquête, mais il y avait des gondoles dans son regard, à moins que ce ne soit la robe du Château Canon. Il a proposé une professionnalisation des arbitres afin d’assurer, dit-il, leur indépendance. Luciano D’Onofrio a aussi évoqué son découragement mais pourrait accepter bientôt une fonction officielle au Standard. Ces mises au point n’ont pas eu de suite sur le terrain face à St-Trond.

Raymond Arets, notre regretté confrère liégeois, 75 ans, n’aura pu que le regretter en rejoignant le paradis des journalistes.

par Pierre Bilic

 » Aucun club belge ne déclenche autant de DéCHARGES D’ADRéNALINE que le Standard « 

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