« PARFOIS PIRE QU’EN AFRIQUE »

Pierre Bilic

Notre consultant profite de la Coupe pour penser aux petits clubs.

En France, St-Priest, modeste club de CFA, a éliminé l’AJ Auxerre en 32e de finale de la Coupe de France après les tirs au buts: chez nous, les giant-killers ont failli se distinguer…

Georges Heylens: Lokeren, Beveren et La Louvière sont passés par le chas de l’aiguille. Au Tivoli, Tubize a bien joué au foot. Sans un brillant Silvio Proto, l’équipe de D3 aurait marqué plusieurs fois en première mi-temps. Je me demande si les Loups auraient alors pu s’en sortir. Cet exemple, à ajouter à la vaillance d’Oud-Heverlee à Lokeren ou à la résistance de Turnhout face à Beveren, prouve que l’écart entre le bas de la D1 et la D2, ou le top de la D3, n’est pas immense. Anderlecht a placé un de ses joueurs, Kounenakis, aux Francs Borains. Les Bruxellois payeraient son salaire (700.000 francs par mois?) mais ne le feraient pas si la D3 n’était pas aussi un solide banc d’essai et une série de qualité. En France, l’exploit de St-Priest a fait la « une » des médias. C’est magique, c’est l’esprit de la Coupe de France dans le sens le plus noble du terme: un petit s’est payé le scalp d’un géant. Quand Calais et Beauvais atteignent la finale, on applaudit. En Belgique, on ne songe qu’à changer la formule de la Coupe de Belgique…

Ne le feriez-vous pas?

Certainement pas. Si les clubs pros veulent se retrouver uniquement entre eux, il y a la Coupe de la Ligue. Elle a été supprimée, c’est leur affaire. Ils ne doivent pas priver les « petits » de la possibilité d’entrer dans l’histoire du football via l’exploit d’un jour ou grâce à une épopée. Le principe de la coupe est d’une simplicité désarmante: pourquoi y toucher? Je me demande finalement pourquoi on a prévu deux manches (aller-retour) pour les demi-finales: c’était une première dérive. Le problème se situe plus autour de la communication qui entoure la Coupe de Belgique. Si les messages propres à la coupe étaient plus percutants, ça plairait aux sponsors et il y aurait plus d’argent sur la table. La coupe, jusqu’à un certain stade, est un hommage aux petits clubs. Ils en ont besoin et, pour pratiquer la P1 du Hainaut avec Ath, je peux vous dire que la situation est dramatique dans les caves de notre football.

Que voulez-vous dire?

Dans certaines régions du Hainaut, il est quasi impossible de bien jouer au foot. Les installations sont d’un autre âge, les terrains ne sont jamais roulés et les équipes se débattent dans des marécages. J’ai beaucoup voyagé mais le Hainaut, au niveau de certains de ses petits clubs de séries provinciales, c’est pire qu’en Afrique. En France, ce serait inimaginable. Les pouvoirs politiques doivent le savoir et réagir. L’Union Belge aussi: c’est bien de dire fièrement qu’il y a 2200 clubs chez nous mais si on doit se vautrer dans de la boue, c’est inutile. Autrement dit: il y a trop de clubs et pas mal d’énergies se perdent. Les clubs devraient s’unir, certainement en ce qui concerne la formation des jeunes. Le centre provincial de Blégny, orchestré par l’Union Belge, avec tout l’appui des autorités régionales liégeoises, est une bonne chose: il faut que les autres provinces wallonnes suivent. Pour les petits clubs, la coupe demeure le sel de la saison même s’ils ne vont pas loin.

Mouscron a retrouvé des couleurs en sortant le RWDM…

J’espère que ce sera le déclic des Hurlus. Genk est toujours là. Mais, pour moi, l’homme des 8e de finale n’est autre que Danny Boffin. St-Trond a eu de la chance au GBA mais Mobylette a animé son équipe, amenant le seul but du match. Boffin, c’est Monsieur St-Trond. Sans lui, ce club serait plongé dans le plus complet des anonymats. Danny Boffin est plus important que Jacky Mathijssen. Sans lui, les Canaris n’auraient pas gardé beaucoup de plumes la saison passée, seraient dans la zone rouge aujourd’hui et n’auraient pas éliminé le GBA: quelle mentalité exemplaire.

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Pierre Bilic

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