Michaël Wiggers, Roméo Seka, Mohammed Aliyu Datti, Wansi Daniel et Ilija Stolica sont le plus souvent spectateurs passifs de la difficile saison des Dragons.

Leur univers, c’est le banc, voire la tribune. Et pourtant, ils avaient les crocs, leurs ambitions et leurs certitudes en commençant la saison. Parce qu’ils avaient prouvé certaines choses l’année dernière, avec Mons ou un autre club. Plongeons dans les pensées de bannis du stade Tondreau.

Wiggers :  » Parfois envie de tout plaquer « 

Le défenseur liégeois était incontournable la saison dernière : il avait joué 33 des 34 rencontres de championnat. Aujourd’hui, il doit souvent se contenter de bribes de matches.

Michaël Wiggers (27 ans) : J’avais atteint mes objectifs la saison passée. Je voulais devenir un titulaire régulier en D1 et Mons m’a permis d’y arriver. Toutes les conditions semblaient réunies pour que je continue sur ma lancée dans ce championnat. Mais une blessure a fait foirer mes plans. Lors de la première journée, à Bruges, je me suis blessé aux ischios et j’ai dû sortir après 20 minutes. La semaine suivante, j’ai de nouveau commencé contre Malines puis j’ai encore dû quitter le jeu pour la même raison. Après cela, j’ai pris deux semaines de repos. L’entraîneur a dû recomposer sa défense : Frédéric Jay a quitté le back gauche pour s’installer à ma place, à droite. Et Danijel Krivic s’est installé à gauche. Il m’a fallu du temps pour revenir à 100 % de mes possibilités car une période d’arrêt se paye toujours. Et je n’étais plus dans la peau d’un titulaire. Aujourd’hui, je suis à nouveau au top mais je suis condamné au régime des réservistes : à l’entraînement, il faut donner deux fois plus que les titulaires pour avoir une chance de retrouver une place dans l’équipe. C’est surtout un travail mental, parfois difficile. Quand on arrive au stade, on croise des titulaires souriants, des gars qui sont sûrs de jouer le week-end et ne se posent pas de questions. Le réserviste ne peut pas avoir la même joie de vivre. Parfois, je me dis : -Putain, je vais encore bosser comme un malade pour n’être que sur le banc samedi. Il m’arrive d’avoir envie de tout plaquer mais je me reprends vite parce que ce n’est pas dans mon caractère. Je ne lâcherai pas le morceau. Cette place en défense, je me défoncerai pour la récupérer.

Seka :  » Riga me voulait-il ? »

Le médian ivoirien de poche était pisté par Mons depuis un long moment quand il a été transféré de Beveren, en fin de saison dernière. On pensait donc qu’il avait le bon profil pour être un vrai renfort. Il est très loin du compte : depuis le début du championnat, il n’a pas joué l’équivalent d’une mi-temps complète !

Roméo Seka-Affessi (23 ans) : Quand on est transféré alors qu’on était titulaire indiscuté dans son ancien club, on s’attend automatiquement à jouer beaucoup. En arrivant à Mons, j’étais convaincu que José Riga comptait vraiment sur moi. Aujourd’hui, je me demande s’il souhaitait ma venue. Nous en avons discuté en tête-à-tête et il me conseille de continuer à bosser. C’est ce que j’ai fait depuis le début. Il ne faut surtout pas croire que je suis arrivé à Mons en sifflotant, avec les certitudes d’un gars qui n’aurait rien à craindre et deviendrait directement un pilier de l’équipe. Je sais me remettre en question. J’ai vite compris que j’avais débarqué dans un noyau où les gars ont plein de qualités. Je suis prêt à les affronter. Mais je n’ai pas encore eu l’occasion de démontrer ma valeur. Je suis entré trois fois au jeu, pour quelques minutes : il en faut plus pour montrer ce qu’on a dans le ventre. Me lancer tout en fin de match, au moment où il faut absolument forcer quelque chose, quand des ballons hauts surmontent l’entrejeu, ce ne sont évidemment pas les conditions dans lesquelles je peux m’exprimer. Pour le moment, je ne suis même plus sélectionnable à cause d’une blessure au genou. Personne ne peut me dire combien de temps il faudra pour que ça guérisse. Peut-être un mois, peut-être deux. Dès que je serai de retour, on fera le point. Je ne pense pas encore à un départ en janvier mais je n’écarte pas non plus cette idée. Je veux jouer.

Datti :  » Les galères minent la confiance « 

L’attaquant nigérian avait explosé à Mons en 2004-2005 : 30 matches, 14 buts. Depuis lors, ça ne veut plus rentrer : 2 buts avec La Gantoise en 2005-2006, un seul la saison dernière avec Zulte Waregem puis Mons. Aujourd’hui, il n’est plus que le quatrième, voire cinquième choix du coach.

Mohammed Aliyu Datti (25 ans) : Je vis mes moments les plus difficiles depuis que je suis arrivé en Belgique, en 2003. Quand j’avais quitté le Standard pour Mons, j’étais en pleine confiance. J’avais réussi de bonnes choses à Sclessin et ça s’est prolongé ici. J’ai franchi un palier lors de mon premier séjour à Mons, je suis devenu une valeur sûre du championnat. Au moment de mon transfert à Gand, j’ai senti qu’on comptait énormément sur moi. Pour la première fois, j’étais conscient que je n’avais pas droit à l’erreur. Je devais marquer, marquer, marquer. Cela m’a mis une grosse pression. Je l’ai mal vécue et c’est comme cela que j’explique mon échec à La Gantoise. Je suis ensuite parti à Zulte Waregem sur ce sentiment et cela compliquait les choses. Depuis lors, je me cherche, je sens toujours une grosse pression sur mes épaules et je la gère mal. Les galères minent la confiance, encore plus celle d’un attaquant que d’un médian ou un défenseur. Je ne parviens plus à faire ce qu’on me demande spécifiquement : marquer des goals. Forcément, je réfléchis de plus en plus. Or, c’est ce qu’un attaquant ne doit surtout pas faire. Il faudrait que je puisse rejouer à l’instinct, mais il y a plein de pensées qui se bousculent dans ma tête et me paralysent. Je ne sais pas ce que le club compte faire de moi. Quitter en janvier ? C’est peut-être le souhait de la direction. Moi, je pars en tout cas du principe que je suis à Mons jusqu’au terme de la saison et que je finirai par revenir dans l’équipe.

Daniel :  » On veut me tuer « 

Le Camerounais a joué 12 des 17 matches du premier tour en 2006-2007. Ensuite, le désert. Depuis janvier dernier, on ne l’a plus vu une seule fois dans l’équipe. L’attaquant rasta, qui est aussi un globe-trotter de notre football (Tunisie, Croatie, Emirats Arabes Unis, Allemagne, Chine), est amer.

Wansi Daniel (25 ans) : Du jour au lendemain, on a décidé de m’écarter. Pour seule explication, on m’a dit que je n’étais pas assez efficace. C’est vrai, je n’ai pas marqué, mais j’estimais ne pas avoir été si mauvais alors que je débarquais de Chine et que j’avais tout à apprendre du championnat de Belgique. Mons a réussi un très bon deuxième tour mais n’avait toujours pas un pur buteur, qui mettait 15 ou 20 goals par saison. Mohamed Dahmane en a mis 11, mais il y avait environ la moitié de penalties là-dedans. J’estime qu’on aurait encore pu me donner ma chance. Pendant l’été, j’ai reçu une offre d’un club tchèque. Je pensais que je pourrais partir gratuitement, qu’on ferait une croix sur ma dernière année de contrat. Mais quand les dirigeants de Mons m’ont dit qu’ils devaient d’abord parler avec les Tchèques, j’ai laissé tomber : j’ai compris qu’ils allaient demander une indemnité de transfert et je trouvais cela injuste.

Cette saison, je vois une équipe qui ne tourne pas et qui marque très peu. Des attaquants reçoivent leur chance semaine après semaine. Ils ne la saisissent pas mais on leur fait à nouveau confiance pour le match qui suit. C’est difficile à digérer. Et pourquoi pas moi ?

On m’a vite reproché de ne pas marquer mais on ne dit rien à ceux qui ont le même bilan aujourd’hui. Je continue à m’appliquer, je suis sérieux aux entraînements, je travaille plus que certains autres joueurs, je ne crée pas de problèmes dans le groupe, je ne suis pas blessé, mais ça ne suffit pas. Je perds beaucoup dans cette aventure car on m’a carrément oublié. Je considère que je ne suis plus crédible à partir du moment où je n’entre même pas dans une équipe dont l’attaque est gravement malade. Je suis persuadé qu’il y a des explications extra-sportives mais je ne les connais pas. Il y en a qui veulent me tuer mais ils n’y arriveront pas. Je patiente et je quitterai Mons au plus tôt en janvier, au plus tard en juin.

Stolica  » Je pensais être indispensable « 

L’attaquant serbe avait été un des héros du superbe deuxième tour de la saison dernière. Arrivé de St-Trond au mercato d’hiver, il avait joué tous les matches avec Mons et marqué 7 buts précieux. Aujourd’hui, il n’a plus rien d’une valeur sûre de l’effectif.

Ilija Stolica (28 ans) : Pour moi, c’est un choc car rien ne laissait prévoir ma situation actuelle. Je pensais m’être rendu indispensable, la saison passée : j’avais marqué mais aussi donné des assists. J’étais sûr que je pouvais faire encore mieux dans ce championnat, convaincu que j’avais franchi un palier et qu’on ne pourrait plus se passer de moi. Maintenant, tout ce que j’ai apporté à ce club semble oublié, comme si je devais repartir de zéro. C’est difficile à digérer. En fait, tout s’est compliqué pour moi dès le dernier match de la saison passée, quand je me suis blessé au mollet contre Anderlecht. J’ai dû consacrer une bonne partie de la préparation à soigner cette blessure, je me suis entraîné plusieurs semaines en solitaire. Et j’ai récemment souffert d’une grippe intestinale qui m’a fait perdre 5 kilos. Je n’avais pas besoin de ce nouveau pépin alors que ma situation était déjà compliquée. Le club a aussi transféré trois nouveaux attaquants : Mohamed Amroune, Cédric Roussel et Christian Landu-Tubi. Amroune est blessé mais les deux autres jouent. J’ai entendu que j’avais le même profil que Roussel et qu’on ne pouvait donc pas nous aligner ensemble : ça ne tient pas la route car deux bons joueurs peuvent toujours apporter quelque chose à une équipe, même s’ils ont des qualités similaires. Je pourrais citer des dizaines de grands clubs européens qui font jouer deux attaquants de pointe ayant le même style. Qu’on ne vienne pas me dire que c’est impossible à Mons. Tôt ou tard, je prouverai que je peux encore apporter quelque chose. Partout où je suis passé, j’ai marqué des buts. Je rame, c’est très dur à vivre mais je me raccroche à des choses positives. Je repense par exemple à ce que j’ai enduré à St-Trond : là-bas aussi, on m’avait mis sur une voie de garage mais il y avait en plus plein de problèmes extra-sportifs. Ce n’est pas le cas à Mons, où je peux me concentrer à 200 % sur mon retour dans l’équipe.

par pierre danvoye

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