Où VONT les Rouches ?

Le 1er septembre a sonné la fin de la récréation. Rentrée des classes pour les enfants mais également pour le Standard qui a profité de la fin du mois d’août pour effectuer ses dernières emplettes. Un mois après le début de la compétition et pour la 3e année d’affilée, les Liégeois ont attendu le début septembre pour arriver à la configuration finale de leur noyau (en attendant janvier ?).

Avec pour résultat, un début de championnat raté. Pas dans les proportions de 2002 quand le club, avec un point sur 15, occupait la lanterne rouge, mais raté quand même. Avec huit points perdus en quatre rencontres et six points de retard sur le Club Bruges, le Standard se retrouve déjà dans une position délicate. Et ce avant deux matches de gala à Genk et contre Bochum en Coupe UEFA. Se situe-t-on déjà à un tournant de la saison et que peut espérer ce club cette saison ? Ces deux questions soulèvent toute une série d’interrogations auxquelles joueurs et entraîneurs ont tenté de répondre tout au long de la semaine.

1. Pourquoi un début de championnat manqué ?

 » J’avais dit qu’il fallait être prêt pour le premier match de championnat et on a bien abordé celui-ci. Face à une équipe difficile à manier, le Lierse, on a ramené un point « , explique l’entraîneur Dominique D’Onofrio.

La suite sera moins glorieuse. Deux défaites à domicile, entrecoupées d’une victoire de l’espoir au Cercle Bruges.  » Je pensais qu’après le Cercle, les choses avaient été remises au point « , explique EricDeflandre,  » J’avais organisé une petite réunion avant la rencontre et je pensais vraiment que le message était passé. Je reprendrai cette initiative avant le match de Genk « .

La défaite à Sclessin contre le Brussels a montré les limites du groupe actuel.  » Je n’ai pas compris ce qu’il se passait « , commente D’Onofrio,  » Il fallait continuer dans l’état d’esprit de révolte qui était le nôtre au Cercle après l’exclusion de Conceiçao mais j’ai vu une équipe sans plaisir. On a fait un non- match.  »

Sabotage ? Sans doute pas. Ce qui est cependant certain, c’est le manque flagrant de motivation de certains joueurs à l’approche de la dernière ligne droite des transferts. Sambegou Bangoura, Alexandros Kaklamanos, Roberto Bisconti, Almani Moreira (pas aligné contre le Brussels) et Ivica Dragutinovic étaient pressentis dans d’autres clubs. Finalement, seuls Bisconti et Moreira sont partis. De plus, d’autres joueurs ont pu être gênés par les rumeurs d’arrivée. Ainsi, on a longtemps parlé d’un grand attaquant, de quoi mettre de la pression sur des garçons réputés fragiles comme Bangoura et Kaklamanos.

 » Avec tous ces changements, il faut attendre que la sauce prenne « , avance Roberto Bisconti, parti à Nice.  » Mais honnêtement, entre joueurs, on avait certaines craintes avant le début de championnat car on avait vu durant la préparation qu’il nous manquait des automatismes « .

2. Comment gérer ceux qui ne sont pas partis ?

Bangoura et Kaklamanos ne sont finalement pas partis. Il faudra donc les re-motiver après les avoir presque contraints à partir. Bangoura s’est longtemps vu à Genk dans le cadre d’un échange avec Paul Kpaka et Kaklamanos a été cité dans un premier temps à Mons comme monnaie d’échange de Wamberto avant de traîner son blues sur les terrains d’entraînement.

 » Il faut continuer avec eux et leur redonner confiance « , précise D’Onofrio.  » Ils sont maintenant plus libres psychologiquement puisqu’ils savent qu’il sont au Standard pour plusieurs mois « .

Propos corroborés par Pierre François, le directeur général du club :  » On leur a beaucoup parlé cette semaine. On devait le faire. On continue à leur faire confiance. Bangoura est quand même titulaire depuis le début de l’année « .

Enfin, il faut également régler le cas Ivica Dragutinovic. Depuis qu’il a perdu son brassard de capitaine, le joueur de Serbie & Monténégro n’est pas encore apparu à son niveau, même si sa prestation contre le Brussels, loin d’être encore convaincante à 100 %, a déjà montré des signes de rétablissement. Mais, il y avait un transfert à la Lazio en jeu. Il faudra voir comment il a ressenti ce nouvel échec.

 » Il est assez grand « , estime D’Onofrio,  » Et il savait ce qu’il faisait quand il a signé un bail avec nous jusqu’en 2007. Il a certainement été perturbé par l’histoire du capitanat et par son transfert probable mais il m’a dit, avant de partir pour son équipe nationale, qu’il était désormais totalement concerné par le Standard « .

3. Pourquoi autant de transferts et pourquoi à cette époque ?

Cette année, le Standard a transféré 15 joueurs et en a vendu 20. Il y a pourtant un mois, Michel Preud’homme, le directeur sportif nous expliquait qu’il fallait  » stabiliser le club parce que les investisseurs ont fait assez d’efforts et se battre pour chaque contrat « . Mais peut-on croire à une stabilité quand on opère chaque année une véritable lessive du noyau ?

 » Le Standard possède une ligne de conduite « , ajoute Pierre François.  » Mais même si nous avons un sponsor fidèle, celui-ci n’est pas une des grandes banques belges. Le club a un budget qui n’est pas alimenté par la Ligue des Champions. On peut seulement tabler sur la moitié de ce que possèdent les autres grands clubs belges : 12,5 millions pour 25 à Anderlecht. Et malgré ce budget, on veut prétendre rivaliser avec les meilleurs. Pour atteindre cet objectif, il faut parfois prospecter de juin à la fin du mois d’août, pour, notamment grâce aux introductions de Luciano D’Onofrio dans les clubs européens et au talent de Michel Preud’homme, trouver au bout du compte un effectif pour ne pas vivre simplement dans le ventre mou du classement « .

Car le club réfute l’argument qui voudrait que les transferts ne servent les intérêts que d’une personne, en l’occurrence Luciano D’Onofrio qui vivait de son métier de manager. Pierre François :  » Pour faire taire la critique qui disait qu’il travaillait dans l’ombre à ses propres intérêts, Luciano D’Onofrio a accepté de lâcher ses activités de manager et a pris le poste de vice-président du club « .

Néanmoins, faut-il continuer dans cette voie ? Le Standard privilégie la qualité dans ses transferts en opérant des grands coups médiatiques comme le prouvent les dernières années. Le retour d’ André Cruz, de Régis Genaux, les transferts de Robert Spehar, Robert Prosinecki et d’ Emile Mpenza, ont trouvé leur suite cette saison avec la venue de Sergio Conceiçao et les retours de Vedran Runje et Philippe Léonard.

 » Il faut faire attention aux équilibres de budget mais qui aurait cru que Conceiçao et Runje allaient porter la vareuse rouge cette saison ? », interroge l’entraîneur.

Le club achète des noms qui parfois se refont une santé au club et cèdent ces joueurs un an plus tard. Soit pour effectuer une plus value, soit simplement parce que le salaire du joueur est devenu trop lourd à assumer. Ainsi, l’explication du transfert d’Emile Mpenza est éloquente. En vendant le joueur à Hambourg, le club s’est remboursé de l’investissement salarial consenti pour l’attirer une saison en bord de Meuse. Le Standard n’a rien gagné, n’a rien perdu mais, comme le disait Michel Preud’homme dans nos colonnes, il y a un mois,  » a pu utiliser durant un an les services d’un joueur de haut vol « .

Cependant, ces transferts servent d’arbres cachant la forêt. Pour montrer à long terme l’utilité de ces acquisitions de luxe, le club devrait se doter d’un noyau, d’une structure solide et constante capable d’intégrer ces grands joueurs. Ceux-ci ne seraient qu’en transit au club mais seraient à chaque fois remplacés par d’autres grands noms et s’imbriqueraient dans une équipe de base qui, elle, serait inchangée d’année en année. Or, le Standard ne possède pas de noyau fixe. Tout le monde part et tout le monde arrive tout le temps.

 » C’est vrai que l’on doit penser à une autre solution pour obtenir la qualité à moindre prix « , avoue Pierre François.  » Ces transferts du mois d’août constituent une solution mais une politique de jeunes accrue constituerait une autre solution « .

4. Les jeunes

Le club est conscient qu’il faut trouver une voie médiane qui allierait la qualité à la stabilité. Restera alors le temps de la prise de risque (limitée car un club qui vise l’Europe ne peut incorporer trop de jeunes à la fois), celle du choix de lancer un jeune à la place d’un joueur acheté à grands espoirs.

 » Il faut perpétuer cette tradition de qualité que nos équipes de jeunes possèdent déjà « , affirme Pierre François.  » On compte quand même dans le noyau A des garçons comme Laurent Gomez, Maxime Baijot, Gilles Colin ou Mémé Tchité. Mais on doit aller plus loin. Dans le courant 2005, les travaux du nouveau centre de formation au Bois Saint-Jean débuteront. Une fois ceux-ci terminés, nous posséderons un outil unique en Belgique « .

5. Fallait-il laisser partir tous ces joueurs ?

Le Standard a largement commenté le pourquoi d’une telle lessive tardive mais certains transferts auraient pu être évités. Ainsi, la venue d’Eric Deflandre a certainement poussé Onder Turaci à repenser à son avenir.

Pierre François :  » On avait anticipé les départs de Moreira et Turaci en faisant appel à Wamberto et Deflandre. On aurait bien voulu conserver Turaci mais il avait rempli sa mission au Standard pendant plusieurs saisons. On a donc décidé de donner suite à son envie de partir à Fenerbahçe « .

Dominique D’Onofrio :  » On avait de nombreux joueurs en fin de contrat et on savait qu’il serait impossible de garder des Fabian Carini, Lalo Sorondo ou Emile Mpenza « .

Quant à Roberto Bisconti, le divorce ne s’est pas vraiment fait à l’amiable.  » La page est tournée « , lance Pierre François,  » Il possédait au Standard un très bon contrat par rapport à celui qu’on lui proposait dans ses précédents clubs. Son salaire était même plus important que celui de l’année passée. Nous lui avons donné sa chance. Grâce à cela, il est devenu international et il tient malgré tout, en partant, des propos durs sur la direction. Ceci dit, je lui souhaite bonne chance à Nice « .

Pourtant, le médian défensif clame haut et fort (même sur le site de son nouveau club, l’OGC Nice) qu’il ne voulait pas quitter le Standard :  » Je ne voulais pas partir… mais je sortais d’une grande saison et j’espérais un geste de la part de la direction. Au lieu de cela, ils ont joué la montre en attendant la fin de la période des transferts. A Nice, je gagne beaucoup, beaucoup plus. Mais je ne demandais pas que le Standard s’aligne. Il n’aurait d’ailleurs pas pu et encore moins par rapport à ce que certains clubs turcs me proposaient. J’attendais simplement un peu plus de considération « .

6. 1er septembre : le vrai début du championnat ?

Le début de championnat est écorné mais comme le dit Pierre François :  » Il reste encore 30 journées « . Le noyau est désormais formé et même si le club a perdu des éléments-clés, il existe de la qualité dans le noyau.

L’entraîneur est soulagé d’être arrivé au 1er septembre :  » Voilà deux jours que je suis heureux de l’ambiance de travail qu’il y a dans le groupe. Tout le monde est fixé sur son sort. J’ai vraiment senti la différence d’un jour à l’autre. Je vois qu’il y a du vouloir dans ce groupe. Et la trêve internationale est tombée au bon moment pour intégrer les nouveaux joueurs. Il faut désormais repartir sur une nouvelle base. Il faut lier le jeu et retrouver un autre état d’esprit. Car il faut jouer avec l’envie, le plaisir et l’enthousiasme et alors les qualités individuelles s’exprimeront « .

Philippe Léonard :  » Je remarque qu’il y a beaucoup de plaisir à s’entraîner. Tous les joueurs sont conscients que ce n’est pas une fin en soi d’être au Standard. Il faut continuer à travailler. L’équipe sera la même jusque minimum fin décembre. On a donc quatre mois pour redresser la barre et prendre un maximum de points « .

Pourtant, si la trêve permet au Standard de souffler et de réfléchir sur son avenir, elle ne permet pas encore à l’entraîneur de tester la nouvelle dynamique qu’il veut insuffler au groupe. Ainsi, le capitaine Eric Deflandre n’était pas présent lors de la première semaine de ce qu’il convient d’appeler la reconstruction, tout comme Dragutinovic, un autre joueur de caractère, et Ogushi Onyewu, tous trois retenus par leurs devoirs internationaux. Soit trois quarts de la défense.

 » Il nous restera cependant une semaine pour travailler tous ensemble « , se persuade Deflandre.  » Et le reste du groupe aura certainement effectué du bon travail « .

De plus, certains nouveaux ne seront pas opérationnels tout de suite. Trois semaines seront nécessaires à Philippe Léonard pour se remettre à niveau :  » J’ai besoin de travailler et je dois encore emmagasiner du foncier. L’entraîneur a été clair : il ne m’enverra pas au casse-pipes « .

Il faudra donc encore patienter avant de voir un effectif complet, physiquement et tactiquement au point. Mais le club ne peut pas se permettre d’attendre car deux échéances importantes se profilent : Genk et Bochum.

Stéphane Vande Velde

 » Entre joueurs, on craignait LE MANQUE D’AUTOMATISMES  » (Roberto Bisconti)

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire