Oris building

L’ancien attaquant de Roulers aime construire des bâtiments et détruire les murs défensifs.

Il est des ombres qu’on ne parvient pas à éviter. Sans doute parce qu’elles sont plus grandes que les autres. Celle de Cédric Roussel plane encore sur le Tondreau. On se souvient de cette fabuleuse première année en D1 et de ce titre de meilleur buteur. Alors, on tente de reproduire la potion magique. Dans le rôle de Roussel, on a choisi un Campinois. Kevin Oris vient à peine de débarquer qu’il se voit déjà comparé à celui qui fait cependant encore partie du noyau montois.  » On m’a souvent parlé de lui depuis que je suis arrivé ici « , sourit ce grand attaquant (1,92m).  » Et je le prends comme un compliment. Il a réalisé une grande carrière et si on veut que je sois le nouveau Roussel, je ferai en sorte de l’être.  »

Et pourtant, à part sa taille, rien ne prédisposait Oris à une telle comparaison. Ah si, le nombre de clubs déjà visités. 12 clubs visités pour 15 à Roussel. Mais avantage Oris qui ne compte que 23 ans : Zwanenven, Turnhout, Tielen, Lierse, Westerlo, Tongerlo, Olen, Lyra, Nieuwkerken, Meerhout, Roulers, KVSK United et Mons, la plupart de ces entités situées en Campine.

 » Mes parents ont beaucoup déménagé car mon père avait un hobby particulier. Il construisait une maison pierre par pierre, il la revendait et recommençait dans le patelin suivant. Comme il était agent de quartier, il n’aimait pas habiter dans la ville où il travaillait. Moi, je l’ai aidé pour les quatre dernières maisons. J’ai pris le virus et je rénove d’ailleurs pour le moment un ancien bâtiment. « 

Et puis, il y a la taille.  » C’est vrai qu’il s’agit du même profil « , reconnaît le directeur général, Alain Lommers,  » mais Oris est plus qu’un avant statique. Il bouge, se bat énormément, il revient en défense, arrache des ballons, bref soulage son équipe tant offensivement que défensivement. Roussel est davantage un pivot traditionnel et à sa belle époque, sa force consistait surtout à exploiter les centres de Jean-Pierre Laplaca. Il était toujours bien placé.  »

La comparaison s’arrête là. Car Roussel est l’homme du coin : vous sortez de Mons, vous allez tout droit, puis au carrefour, vous prenez la première à gauche. Vous êtes à Bray, chez Roussel. Pour Oris, c’est plus compliqué et quasi aberrant. Vous vous levez à 6 h 15, vous quittez Geel, vous passez les embouteillages de Bruxelles et vous arrivez à 8 h 40 au stade Tondreau. Soit 260 kilomètres plus loin.

 » Je suis un vrai Campinois. Ces déplacements ne me dérangent pas. Et les jours de match, je reste à Mons « , explique le joueur. Car, on peut désormais dormir dans le stade, un dortoir de 40 lits se trouvant sous la nouvelle tribune.

Lommers :  » Normalement, on met dans le contrat que le joueur doit habiter dans un rayon de 25 kilomètres autour du stade. Mais Oris m’a dit qu’il venait de faire construire et je me voyais mal lui dire de tout abandonner. Tant que cela fonctionne, on n’a rien à lui reprocher. Si un jour, on constate que les voyages le fatiguent, on reverra le problème. « 

En attendant, il se farcit la route, en faisant halte à Louvain (pour prendre Steven De Pauw), à Waterloo (pour Anti Okkonen) et à Nivelles (pour Mustapha Jarju).

Quatre buts contre le Tubize de Saint-Jean

Mais cela ne nous explique pas comment on passe de Lommel à Mons.  » Notre cellule de scouting avait soulevé le nom d’Oris à plusieurs reprises « , ajoute Lommers.  » Mais cela n’avait pas convaincu les prédécesseurs de Philippe Saint-Jean et de Thierry Pister. Quand Saint-Jean est arrivé, la piste a été réactivée. Oris lui plaisait car il était belge, encore jeune et qu’il avait de la présence. Pour nos deux entraîneurs qui l’avaient rencontré, tant avec Tubize que Tournai, il avait constitué un des adversaires les plus dangereux de D2.  »

 » Le président Dominique Leone avait injecté beaucoup d’argent pour que le club se sauve « , corrobore Saint-Jean.  » Et nous nous sommes donc tournés vers la D2 par nécessité financière. On voulait prendre des éléments belges et moi, je ne voulais pas me tourner vers Tubize. Je connaissais Oris depuis un certain temps. Je l’avais vu jouer en D3 à Olen. Il se débrouillait déjà pas mal à 17 ans. Avec KVSK Overpelt-Lommel, en fin de saison, il était au dessus du lot et il a fait des dégâts dans la défense de Tubize, pourtant réputée comme étant notre point fort.  »

 » Je pense que j’avais tapé dans l’£il de Saint-Jean « , avoue Oris,  » car j’avais inscrit quatre buts contre Tubize, dont trois lors du tour final « . Le sourire revenait sur le visage d’un garçon qui, un an plus tôt, avait connu l’élite avec Roulers :  » J’ai joué deux ou trois bons matches mais je ne fus titulaire que quatre fois. Et j’ai marqué deux buts. Je n’arrivais pas à convaincre l’entraîneur Dirk Geeraerd. Je ne débutais que quand il y avait un blessé. Un an plus tard, j’ai donc dû passer par la D2, à KVSK United. Ce n’est jamais facile car les gens se souviennent que tu restes sur un échec. Moi, je savais que j’avais le niveau de la D1 mais je n’avais pas pu le prouver.  »

Et pourtant, tout semblait réuni pour que l’expérience roularienne marque ses grands débuts dans le monde du football pro :  » Je restais sur une grande saison avec Meerhout, en Promotion. J’avais marqué 35 buts en 29 matches, ce qui m’avait valu le zilver bal, une distinction flamande qui sacre le meilleur buteur toutes divisions confondues. Je n’oublierai jamais mon passage là-bas. Tout était parfait. Le groupe était excellent, l’entraîneur Johan Houben voulait un jeu offensif. On avait été très régulier et finalement, on avait décroché le titre lors de la dernière journée contre Mol-Wezel.  » Pour lui, il s’agissait de son deuxième titre.  » Le premier, c’était avec Tongerlo, en 2e Provinciale « , rigole-t-il.

Deux ans plus tard, le voilà confronté à une nouvelle expérience :  » Mon manager Guy Dejaeghere avait joué avec Pister et Saint-Jean était convaincu. Tout cela a facilité les contacts avec Mons.  »

Voilà comment un club qui avait misé principalement sur des joueurs français techniques voit débarquer un grand gaillard flamand :  » Je ne parle pas le français. Je comprends un petit peu mais je serais incapable de mener une conversation. Mais ce n’est pas un problème. Je compte bientôt prendre des cours. Avec notamment Okkonen, Jarju et Ivica Dzidic. Quant au style de jeu, je ne pense pas que cela soit un problème. Je pourrais vous citer huit noms de joueurs montois capables de disputer un tournoi de foot en salle. Ce qui m’a frappé en Wallonie, c’est la différence de conception du football… Ici, on privilégie le côté technique. En Flandre, on met l’accent sur le travail et sur les duels. Si à Mons, on arrive à mixer les deux mentalités, on peut réussir de belles choses. Moi, j’ai besoin d’espace et de travail. Ce n’est pas mon style de jouer de façon élégante. J’ai davantage une mentalité de travailleur. Je cours beaucoup pour l’équipe. C’est comme ça… « .

par stéphane vande velde – photos: belga

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire