» On sera visés « 

Deux coureurs du team Landbouwkrediet-Colnago peuvent espérer la victoire au championnat de Belgique à Vilvorde, dimanche.

Peu de directeurs sportifs ou de managers récoltent autant de louanges de la part des coureurs que Gérard Bulens, manager du team Landbouwkrediet-Colnago. Ludo Dierckxsens le considère même comme un second père. Avec Tom Steels, tenant du titre, Bulens aligne le grandissime favori du Championnat de Belgique, ainsi qu’ un outsider : Ludovic Capelle.

Deux vainqueurs potentiels : quel luxe !

Gérard Bulens : Je considère ça comme un poids. Notre équipe va être visée alors que nous n’avons pas les meilleurs valets. Il est très aléatoire de contrôler le championnat. Je ne vais pas vous exposer ma tactique mais nous enverrons un de nos candidats à la victoire dans chaque attaque significative.

A quelle course vous attendez-vous ?

Tout professionnel digne de ce nom est susceptible de gagner sur ce parcours. Je ne m’attends pas à une course très ouverte.

Quels sont les principaux rivaux de Steels et Capelle ?

Il ne faut sous-estimer personne dans un championnat, surtout sur ce parcours. Chez nous, il y a aussi deux coureurs rapides, Wesley Van Speybroeck et Marc Streel. Lotto-Domo est surmotivé et aligne plusieurs candidats à la victoire. Quick Step aura concocté une belle tactique. Chez Vlaanderen, je pointerais James Vanlandschoot, Matthew Gilmore et Nico Sijmens, sans oublier Michel Vanhaecke. Andy Cappelle est aussi un tout bon coureur, susceptible d’être dangereux.

 » Dierckxsens est un point d’interrogation  »

Ludo Dierckxsens s’est déjà imposé deux fois sur ce parcours. Mais il a dû déclarer forfait in extremis.

Ludo est un point d’interrogation pour le moment. Il souffre du genou et n’a pas été convaincant depuis qu’il a repris la compétition, après sa maladie et une fracture de la clavicule. Il n’a pas pris le départ de la dernière étape du Tour de Picardie. Idem au Luxembourg et en Autriche. Pourtant, il n’aime pas abandonner. On n’abandonne pas à la fin d’un tour. Je ne supporte pas les coureurs qui estiment n’avoir plus rien à gagner ou à perdre. Il faut défendre son image et ses sponsors. Mes hommes le savent. Ludo n’est pas bien et ça a une influence sur son moral. Cette année, il est plus nerveux, peut-être parce qu’il roule pour une formation belge et qu’il n’est pas à 100 %. Il a besoin qu’on parle de lui, ce qui n’est pas le cas actuellement. Cela dit, Lampre lui a accordé trop de liberté. Il a un potentiel physique incroyable, qu’il a trop peu montré ces dernières années.

Sa réserve, inhabituelle, a-t-elle d’autres causes ?

On paie parfois pour des fautes qu’on n’a pas commises. Comme ce qui s’est passé après sa victoire d’étape à Saint-Etienne en 1999. La suspension de six mois qui a suivi l’a changé. Quand on fait quelque chose avec beaucoup de coeur et de motivation mais qu’on est blessé dans sa motivation, ça laisse toujours des traces. Je suis convaincu qu’un bon résultat peut le relancer.

Ludovic Capelle est aussi un candidat sérieux, non ?

Il est très costaud et presque aussi rapide que Steels. Il doit viser plus haut. S’il n’obtient pas plus de résultats, c’est parce qu’il manque d’assurance. Il a beaucoup plus de qualités qu’il ne le pense. Un autre problème : ce championnat est un objectif majeur pour lui mais il s’en fixe trop peu. Après, il veut se concentrer sur Paris-Bruxelles. Pourtant, avant ça, d’autres courses peuvent lui apporter des points et améliorer son statut. Il est trop vite content.

Tom Steels est l’homme à battre à Vilvorde. Est-il capable d’assumer ce rôle ?

Oui. Ce parcours plat lui convient, même si les conditions de course peuvent tout changer. Cela dit, mentalement, il est blindé.

Dans quelle mesure les problèmes de sa fille, handicapée, influencent-ils ses performances ?

Il faut évidemment tenir compte de cette situation. Alors qu’il n’en parlait pas en octobre, il commence à s’épancher. Grâce au soutien de sa femme et de sa famille, il reste bien dans ses pompes. Je ne pense donc pas que ce drame influence vraiment ses prestations.

Pourquoi a-t-il connu une saison si mitigée ?

Il a eu une mononucléose. Cette maladie vous contraint au repos jusqu’à la guérison complète. Il a voulu reprendre trop vite, ce qui a eu des répercussions sur cette saison. Il est toutefois en progrès. En début d’année, il roulait difficilement plus de quatre jours de suite. Or, il a remporté la dernière étape du Tour d’Autriche, plus long et plus dur que l’Etoile de Bessèges.

 » Steels redeviendra lui-même  »

En début de saison, vous nous aviez confié que vous l’attendiez au top après trois semaines.

Je me suis trompé mais je reste persuadé qu’il redeviendra lui-même. Avec un programme à sa mesure, il peut gagner une vingtaine de courses par saison et retrouver une équipe où il sera suffisamment entouré.

Vous sera-t-il difficile de conserver Jaroslav Popovitch ?

Il a rempilé pour deux ans, à de meilleures conditions, mais il n’a pas été trop gourmand, quand je vois ce que gagne un coureur de Lotto-Domo. Mais que vaut encore un contrat ? Après trois mois dans le peloton pro, ce coureur a voulu arrêter, craignant de ne pas avoir le niveau. Il s’est ressaisi en courant des épreuves moins importantes puis il a terminé 12e de son premier Giro, l’année dernière. Cette saison, nous avons élaboré son programme en fonction du Giro. Un problème au genou l’a contraint à faire l’impasse sur les classiques wallonnes mais il a retrouvé ses sensations au Tour de Romandie. Chaque fois qu’il est en difficulté, il parvient à puiser en lui une énergie mentale et physique incroyable, et il se reprend. Un peu comme Armstrong, sans vouloir les comparer ! S’il reste réaliste, il pourra gagner un grand tour dans quelques années et devenir un des porte-drapeaux du cyclisme international.

Il sait ce qu’il veut. La jalousie et l’argent peuvent vous démolir mais les coureurs de l’ancien bloc de l’Est savent d’où ils viennent. Ils ont commencé avec un vélo dont un débutant d’ici ne voudrait pas. Ils sont heureux de tenter leur chance pour 30.000 euros par an alors qu’en septembre, des jeunes Belges vous disent : -Je suis bourré de qualités, j’ai été troisième de cette kermesse… Je ne veux pas commencer au salaire minimum. Ça me fait rire.

Evidemment, devant l’afflux de l’argent, on peut… perdre les pédales. Cependant, toute la famille de Popovitch dépend de lui. Son père est gravement malade, sa mère ne peut pas travailler, il a des frères et des s£urs.

Il est privé de son homme de confiance, Olivano Locatelli, inquiété pour administration de produits interdits.

Comme tout le monde, il est déçu de Locatelli. Il a signé une charte antidopage. Rien n’indique l’implication de l’équipe. Il travaille aussi pour quelques équipes d’Espoirs. On parle de contrôles antidopage dans les conversations téléphoniques enregistrées mais on n’a retrouvé aucun produit interdit chez lui. Ce qu’il raconte ne va pas plus loin que : -Cipollini est époustouflant aujourd’hui, j’ai l’impression qu’il va se faire pincer. Des discussions de café, quoi. Il n’a pas été arrêté mais mis aux arrêts chez lui. Il a proposé sa démission. Nous ne l’avons pas refusée mais le pire est qu’on associe notre équipe au dopage, dans une certaine presse. Certains quotidiens se battent pour augmenter leur tirage et ne demandent qu’une chose à leurs journalistes : du sensationnalisme, qui n’a plus rien à voir avec le sport.

Vous ne regrettez pas de n’être pas repris pour le Tour de France ?

Il ne faut pas en prendre le départ pour l’achever avec deux coureurs. Nous émargeons à la D1, officiellement, mais ça ne compte pas pour moi. 13 de nos 24 coureurs sont jeunes. Ils ont prouvé leurs qualités au Giro mais c’est le tour le plus accessible des trois grands pour les jeunes. Ils ont besoin d’apprendre. Nous voulons former des jeunes, pas les démolir.

Peu de directeurs sportifs sont autant appréciés par les coureurs que Bulens

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