« On ne me RATE PAS »

Bruno Govers

Le gardien tchèque est toujours ballotté entre le terrain et le banc.

Pour Daniel Zitka, (29 ans) l’entrée en matière en Ligue des Champions aura été aussi désastreuse que l’année passée. A l’époque, le gardien du RSCA avait précipité la défaite des siens, à Lyon, suite à une intervention aussi fautive qu’inutile, dans sa surface de préparation, face à l’international français Sydney Govou. A Valence, cette fois, le Tchèque s’est complètement blousé sur un centre de Francisco Rufete, offrant par là même le but d’ouverture à Rodriguez Vicente au bout d’un quart d’heure de jeu à peine.

Daniel Zitka : A partir du moment où je quitte mon goal pour couper la trajectoire du cuir, je dois le capter. Comme je n’y suis pas parvenu, je plaide coupable, en toute logique. A ma décharge, je dirai simplement que les ballons actuels ne sont nullement des cadeaux pour les gardiens. Au moindre rebond, comme ce fut le cas pour moi sur cette phase, ils prennent parfois des trajectoires très surprenantes. J’ai suivi à la télé tous les matches de cette première journée de la Ligue des Champions et je constate que je n’ai pas été le seul à éprouver des problèmes de jugement. Lors du match entre le Deportivo La Corogne et l’Olympiakos, le portier local, José Molina, a été décontenancé lui aussi par un rebond bizarre mais sans suite fâcheuse pour lui, heureusement. Et à l’occasion de la rencontre opposant Lyon à Manchester United, Tim Howard a laissé échapper la balle dans des circonstances analogues. Avec pertes et fracas, puisque cette scène permit aux Olympiens d’alourdir la marque à 2-0. Par rapport à nous, en 2003-04, les Anglais auront toutefois eu l’immense mérite de revenir au score. Nous-mêmes n’y étions pas parvenus à Gerland. Pas plus qu’au stade Mestalla d’ailleurs…

Au vu de la frilosité offensive affichée par l’équipe en Espagne, beaucoup estiment que le Sporting n’avait pas retenu la leçon de ses mièvres déplacements à l’OL et au Celtic, il y a un an. Abondez-vous dans le même sens ?

Oui. Je pensais très sincèrement qu’un déclic s’était produit, l’année passée, dans le cadre de notre troisième sortie européenne au Bayern Munich. Nous étions obligés de prendre au moins un point en Bavière si nous voulions passer l’hiver européen au chaud et, dans ces circonstances-là, nous avions livré une partie d’excellente facture. Sans un extraordinaire Oliver Kahn, tout porte d’ailleurs à croire que nous serions parvenus à nos fins ce soir-là. Au lieu de poursuivre sur cette lancée à Valence, nous sommes hélas retombés dans nos travers de l’année dernière en évoluant de manière beaucoup trop timorée. Manifestement, il existe toujours un décalage entre les prestations de haut vol que nous sommes capables de signer au Parc Astrid et notre manque de répondant dès que nous nous produisons à l’extérieur. Il en avait déjà été ainsi à Benfica cette saison. Mais cette fois-là, une certaine nervosité était bien compréhensible chez nous, dans la mesure où nous jouions notre qualification pour la Ligue des Champions. En Espagne, par contre, nous n’avions strictement rien à perdre et pouvions, de ce fait, complètement nous lâcher. Nous n’y sommes pas arrivés et c’est dommage. Tant pis, nous essayerons de faire mieux la fois prochaine, au Werder Brême. Et moi en particulier. Du moins, si on me donne l’opportunité de me racheter.

Après votre bévue à Valence, qui faisait suite elle-même à une prestation moins autoritaire à Ostende, Hugo Broos a choisi de titulariser à nouveau Tristan Peersman contre le Lierse. Vous attendiez-vous à ce passage de témoin ?

Oui et non. Car après avoir personnellement foiré à l’Excelsior Mouscron, lors de la journée d’ouverture, l’entraîneur m’avait malgré tout honoré de sa confiance pour les besoins du premier match vraiment crucial de la saison, à Benfica. Tant à Lisbonne que lors du retour au stade Constant Vanden Stock, je crois avoir prouvé que j’étais l’homme de la situation. Aussi, même si j’avais conscience de ne pas avoir répondu complètement à l’attente en Espagne, je pensais a priori qu’Hugo Broos ne modifierait pas ses plans avec moi. Mais à mesure que le match face au Lierse approchait, j’ai compris qu’il y aurait peut-être du changement dans l’air. Après notre sortie à Valence, la plupart des questions, dans la presse, concernaient comme par hasard le poste de gardien. Ce qui m’agace un peu, c’est qu’on ne met pour ainsi dire jamais en question, ici, la place d’un joueur de champ. Exception faite pour Walter Baseggio peut-être. Mais pour ce qui est du keeper, c’est manifestement différent. Je ne prétends pas que les journalistes poussent Tristan Peersman. Mais dès qu’il y a moyen de trouver quelque chose à redire sur moi, on ne me rate pas.

Hiérarchie

Vous avouerez que la situation, depuis le début de la saison, était un peu paradoxale entre un Tristan Peersman titulaire chez les Diables Rouges et réserviste au Sporting et vous-même, numéro 1 ici mais sixième seulement en Tchéquie.

On ne peut comparer que ce qui est comparable. Si le meilleur gardien de mon pays, Peter Cech, était belge, il jouerait chez les Diables Rouges, puisqu’il est tout simplement le meilleur. Il n’y a donc aucune honte, pour moi, de vivre dans son ombre. Pour ce qui est du problème de la hiérarchie, je constate qu’il se pose avec acuité, pour certaines personnes, à Anderlecht, alors que personne n’en pipait mot à Lokeren, par exemple. Là aussi, pour rappel, je prenais la place d’un titulaire en équipe nationale : celle du Slovène Mladen Dabanovic. Mais à Daknam, personne n’y a jamais trouvé à redire. Dès lors, pourquoi en faire un monde à Anderlecht ? Sans doute parce que c’est Anderlecht et que quand il n’y a pas d’histoires, on en crée. Ce n’est pas un reproche mais un constat.

Il n’y a pas que les journalistes qui suscitent l’événement. Les joueurs s’y entendent aussi. Au Sporting, il y a eu dernièrement l’affaire Iachtchouk, précédée de l’affaire Aruna, précédée elle-même de l’affaire Peersman. Qu’en pensez-vous ?

Quand Hugo Broos a fait savoir, en tout début de saison, qu’il comptait deux gardiens de valeur sensiblement égale, je me suis dit que je devrais peut-être vivre à l’un ou l’autre moment avec le statut de numéro 2. Et même pour entamer le championnat, qui sait ? Cette situation, je l’avais déjà connue à mon arrivée, lorsque Filip De Wilde était encore titulaire à part entière. A l’époque, il fallait bien que je m’en accommode car il y avait bel et bien un écart entre lui, qui avait déjà tout vécu, et moi qui avais encore tout à prouver. Cette fois, c’était tout de même différent car j’avais autant de planches, si pas davantage, que mon rival direct. Ce sentiment-là, je ne l’ai jamais ventilé. Tristan, au contraire, a choisi de ruer immédiatement dans les brancards en clamant que le statut de numéro 1 lui revenait, vu son accession au statut d’international entre-temps. Je comprends quelque peu sa frustration mais, dans l’autre cas de figure, n’aurais-je pas autant de raisons que lui de maugréer.

A Valence, vous partagiez la même chambre. Est-ce à dire qu’en dépit de la situation particulière que vous vivez, vous restez bons potes ?

Il y a quand même eu un petit concours de circonstances là-bas. En principe, mon compagnon lors des mises au vert ou des retraites européennes est Martin Kolar. Mais comme il se remet toujours de son opération au genou, le team manager, Pierre Leroy, m’a demandé si j’étais d’accord d’avoir Tristan comme compagnon. Pas de problème. A notre retour à l’hôtel, après le match, nous avons même regardé les images du match. Sans commentaires car nous avons décidé, dès la saison passée, de ne pas juger la prestation de l’autre. Sur le premier but, il s’est donc tu (il grimace). S’il y a des remarques à faire, nous laissons tous deux ce soin au staff technique. C’est beaucoup mieux ainsi.

Pourriez-vous accepter une situation comme celle qu’ont vécue Dany Verlinden et Tomislav Butina à Bruges, l’année passée, l’un relayant l’autre à la moindre errance ?

Je m’inclinerai toujours devant les décisions de l’entraîneur même si j’espère être le premier choix en toutes circonstances. Jusqu’à présent, je n’ai malheureusement jamais eu l’occasion d’être l’incontestable numéro 1 d’un bout à l’autre de la saison. A cet égard, une blessure est toujours survenue à un mauvais moment. Mais un jour, j’en suis sûr, je toucherai au but en étant indéboulonnable du premier match de préparation, au mois de juillet, jusqu’à la fin du championnat, au mois de juin. 50 matches d’affilée entre les perches, toutes compétitions confondues, c’est l’objectif que je veux atteindre. Pas dans une équipe de café en Tchéquie mais ici, au Parc Astrid.

Bruno Govers

 » A Lokeren, je prenais aussi LA PLACE D’UN INTERNATIONAL  »

 » A Anderlecht, quand il n’y a PAS D’HISTOIRES, ON EN CRéE  »

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire