» On est 2e mondial. Alors, que veut-on ? « 

L’affaire Wilmots, les Diables Rouges, la société Bonka Circus, les élections présidentielles, l’Euro-stadium, le président de la Commission technique n’élude aucun sujet.

Après Cardiff, Philippe Collin, rassuré d’avoir gardé Marc Wilmots, nous a reçus dans son bureau du centre d’entraînement de Neerpede pour balayer différents sujets.

Est-ce que l’Union Belge a bien géré l’éventuel départ de Wilmots ?

Je pense que oui. Au moment où ça sort dans la presse, on est devant un sujet très délicat. Je me suis dit qu’il valait mieux attendre l’issue négative ou positive plutôt qu’anticiper. Imaginons qu’on anticipe au niveau de son successeur et qu’il décide de rester, cela aurait posé un gros problème, notamment dans le noyau sur le plan de la crédibilité.

Pourquoi ?

Car si on avait dit que notre choix s’orientait autour de 2 ou 3 candidats, cela aurait mis en doute notre soutien envers Wilmots. Une certaine presse l’aurait interprété de la sorte. Vous savez bien que toute la presse ne réagit pas de la même façon vis-à-vis de Wilmots. Et je ne voulais pas mettre de l’eau au moulin de ceux qui voulaient foutre le bordel. Et la bonne surprise, c’est qu’il est resté. Je ne sais pas et ne veux pas savoir qui a dit oui et non de Schalke ou de Wilmots. Mais au final, il reste.

L’Union Belge n’a-t-elle pas donné l’image de généraux qui gagnent une bataille sans avoir mis les pieds sur le champ de bataille ?

Le temps te fait parfois gagner les choses. Si tu montes sur le champ de bataille sans solutions ni armes, tu risques de perdre. La décision de Wilmots n’était pas entre mes mains ; entamer le processus de succession ne venait pas à dix jours. Et je voulais préserver la sérénité avant le Pays de Galles.

Vous sembliez en plein désarroi…

Si l’entraîneur a la possibilité de renoncer à son contrat, on est tenu. On n’a pas d’alternatives.

 » Une clause, c’est une protection pour l’URBSFA  »

Avez-vous eu peur de perdre l’indemnité de départ en bougeant ?

On nous reproche d’avoir implanté une clause dans le contrat mais, même sans clause, quand quelqu’un veut partir, il y arrive toujours. Il crée des ennuis et tu dois presque le licencier. Pour nous, cette clause est une protection financière.

Donc, avec le recul, vous accepteriez encore cette clause ?

Bien sûr !

Mais c’est une épée de Damoclès…

Mais sans clause, Wilmots pourrait partir également à tout instant. Au moins, avec cette clause, on a une certaine protection puisque tout club désireux de s’attacher les services de Wilmots doit débourser une somme d’argent. Sans cette clause, le club peut offrir encore davantage de salaire à Wilmots, et donc de ce fait le convaincre encore plus. Selon moi, cette clause est parfaite, excellente. Dans le futur, il faudra toujours la mettre dans les contrats des entraîneurs. Advocaat n’a pas fait de sentiments, lui, et grâce à sa clause, on a touché. Avec Bruges et Leekens, on a touché aussi.

Est-ce que cette histoire ne vous a pas montré toute l’ambiguïté existante entre une génération qui doit désormais avoir les meilleurs entraîneurs et les limites financières de la fédération, incapable de se payer ces entraîneurs ?

Cette génération est habituée aux plus grands entraîneurs dans leurs clubs. On ne peut donc pas leur vendre n’importe qui. Au niveau belge, il y a peu de candidats mais il y a toute une série de candidats étrangers. Les grosses pointures sont-elles impayables ? Pas toujours. Certaines sont à la recherche d’un challenge pour se remettre en orbite. Et puis, tout entraîneur a rarement l’occasion d’avoir sous ses ordres une génération pareille. Ça doit pouvoir les convaincre. J’ai dit à Marc Wilmots avant qu’il ne prenne sa décision – tu sais que tu n’auras plus jamais dans ta carrière une pareille génération sous tes ordres… sauf si tu entraînes un jour la sélection allemande. Pour moi, c’est un argument qui est plus important que l’argent. Advocaat a bien été intéressé…

Vous ne vous dites pas qu’il va falloir thésauriser pour pouvoir offrir un plus gros salaire au moment où Wilmots partira ?

Non. Le salaire de Marc est déjà important, même s’il n’est pas en rapport avec les salaires des grands clubs. De toute façon, même si j’augmente de 20 à 30 % le salaire du prochain coach, il ne sera toujours pas en rapport avec ceux des grands clubs. Comment voulez-vous être en concurrence avec des salaires de 6, 7 ou 9 millions d’euros ?

 » Hazard est un capitaine moins formaliste que Kompany  »

Etes-vous satisfait de la campagne de qualification actuelle ?

C’est moyen. Les résultats sont favorables, on est toujours dans le  » running  » même si on reste sur un scénario malheureux au Pays de Galles. Mais ce groupe va se relever ; je n’ai pas beaucoup de souci.

Pensez-vous que la saga Wilmots a eu des répercussions sur le match à Cardiff ?

Non ! J’ai vécu les six derniers jours avec l’équipe et je n’ai rien vu. Pas de types qui tirent la gueule et un Eden Hazard qui met toujours de l’ambiance et dégèle les situations par ses remarques. Lui, il gère son rôle de capitaine à sa manière…

C’est-à-dire ?

Il va chez le coach en rigolant. Et finalement, il obtient ce qu’il veut. Entre le coach et lui, il y a toujours cet échange sympathique. C’est moins formaliste qu’avec Vincent Kompany qui est plus sérieux et structuré.

Vous comprenez les attentes des gens depuis la Coupe du Monde ?

On n’a raté qu’un match ! Par contre, en France, on a été exceptionnel.

C’était un match amical…

On a toujours dit que la France était une référence européenne et on les a dominés de la tête et des épaules. Un match splendide.

Mais citez-moi un match de la campagne qui fut enthousiasmant du début à la fin au-delà de Chypre et Andorre ?

Dans l’ensemble, je trouve que l’équipe ne tourne pas mal.

Vous trouvez donc les critiques autour de Wilmots exagérées ?

J’ai lu dans la presse que Wilmots avait obtenu les meilleurs résultats de tous les temps en équipe nationale. Je ne pense pas qu’il ait atteint ses limites. C’est un homme beaucoup plus consciencieux qu’on le pense. Il va dans les détails et s’attache à plein de choses au niveau psychologique. Il essaie de garder l’esprit de groupe en se déplaçant beaucoup. Psychologiquement et tactiquement, je le trouve très bon. Il n’y a pas un moment où, le concernant, une lampe rouge s’est allumée dans ma tête. On est 2e mondial. Alors, que veut-on ? On n’est quand même qu’un pays de 11 millions d’habitants.

Les gens se disent que cette équipe peut décrocher un titre…

Oui… L’Allemagne est top-favorite. Et sans doute se situe-t-on juste derrière avec deux ou trois outsiders comme les Pays-Bas, l’Espagne ou l’Italie. Mais toutes ces équipes n’ont pas des générations exceptionnelles.

 » Je n’ai pas à avoir de sentiments sur le candidat de la Ligue Pro  »

Pourtant, on n’a pas un jeu de favori pour l’EURO…

Mais tu ne dois pas penser que tu vas gagner l’EURO en dominant tous les matches, comme l’Allemagne pourrait le faire. On n’a pas un noyau aussi large ; on reste tributaire de 6 ou 7 joueurs. Si ces joueurs descendent leur niveau ou sont blessés, on n’a plus la même équipe. Heureusement qu’on a encore découvert cette année Radja Nainggolan, Yannick Ferreira-Carrasco et Jason Denayer.

Il y a un an vous déclariez dans Sport/Foot Magazine ne voir aucun conflit d’intérêt ni problèmes dans la présence de Bonka Circus au sein des Diables. Un an plus tard, avez-vous changé d’avis ?

C’est un problème ! Il aurait mieux valu ne pas accepter…mais le groupe n’avait pas réagi à l’époque.

Parce qu’il n’était pas au courant de tous les tenants et aboutissants…

OK, ce genre de situation n’aura plus lieu. C’est du passé et ce n’est plus d’actualité. Aujourd’hui, on a remplacé Steven Martens par une main de fer, Gérard Linard… qui va peut-être serrer trop fort d’ailleurs.

Finalement, vous serez candidat pour un nouveau mandat au Comité exécutif…

Oui. Mais si je ne suis pas élu, je n’en ferai pas un caca nerveux. Je pense que je peux encore donner quelque chose mais si je dois prendre un peu de recul, je m’occuperai alors de ma famille. OK, je n’aime pas me lever le matin et ne pas savoir ce que je vais faire mais d’un autre côté, le physique suit moins bien, l’âge et ses petits bobos arrivent, la récupération est moins rapide. Si un jour, j’ai une alerte cardiaque et que je dois me faire opérer du coeur, je ne serai plus Philippe Collin mais serai devenu un vieux monsieur. C’est comme cela que ça va.

Vous n’imaginez pas ne pas être élu quand même ?

Parfois, tout le monde dit qu’il vote pour vous mais vous vous demandez comment vous vous retrouvez avec si peu de voix. Anderlecht a de l’influence mais est beaucoup jalousé également.

Comment voyez-vous les élections à l’Union Belge ?

La Ligue Pro a choisi son candidat, monsieur Allijns, et tous les membres de la Ligue Pro sont tenus à voter pour le candidat. Moi, je suis les instructions reçues car nonobstant qu’on l’aime ou pas, quand on reçoit une décision d’un groupement, il faut suivre cette décision. Je n’ai pas à avoir de sentiments.

C’est une réponse qui signifie que ce n’est pas le candidat idéal ?

Je n’ai pas à avoir d’opinion là-dessus. Allijns va devoir convaincre des amateurs et s’il n’y arrive pas, il ne passera pas. ?

PAR STÉPHANE VANDE VELDE – PHOTOS : BELGAIMAGE

 » Je ne sais pas et ne veux pas savoir qui a dit oui et non de Schalke ou de Wilmots.  »

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