On espère de l’intelligence. Et de l’art

John Baete

Y a rien à faire, un Mondial sans les Diables Rouges, ça fait très mal. On était tellement habitué. Et la dernière cavalcade, il y a quatre ans sous Robert Waseige, avait tout de même amené l’équipe aux portes des quarts de finale. Si l’arbitre Peter Prendergast n’avait pas annulé un but de la tête parfaitement valable de Marc Wilmots, qui sait si les Brésiliens se seraient finalement imposés ? Bref, il y a une justice. Qualifié pour le Mondial de cette année, le Jamaïcain s’est blessé juste avant la compétition et a dû rentrer chez lui. Bien fait pour lui ! (Mais quelle petite revanche…)

La campagne 2002 en Asie avait débuté de façon très chaotique (Waseige ayant annoncé sans ménagement qu’il acceptait un poste de coach au Standard pour la saison suivante) mais se termina quand même pas mal dans les résultats. La Belgique avait  » montré quelque chose « , comme on dit. Depuis, ce fut une traversée du désert sans nom et on passa à côté de la qualification pour l’EURO 2004 au Portugal et pour cette Coupe du Monde allemande. La faute à qui ?

L’homme que l’Union Belge maintint de façon acharnée et incompréhensible à la tête des Diables pendant une olympiade entière se fendit même un jour d’une excuse historique :  » Il faut sans doute admettre que nous n’avons pas assez de bons joueurs « …

Depuis que le contrat d’ Aimé Anthuenis n’a – enfin – pas été renouvelé, René Vandereycken fait souffler un vent nouveau sur les Diables. Vandereycken a été un joueur très intelligent et tâche toujours de faire de même depuis qu’il est coach. N’étant pas homme de compromis, il n’a pas toujours été populaire mais sa compétence ne fait aucun doute. Il a effectué un scouting approfondi et amené dans le noyau des jeunes que le public belge ne connaissait même pas. Il a procédé à beaucoup d’essais, même s’il a dû se passer de Daniel Van Buyten et Vincent Kompany. Les choses sérieuses, c’est pour la mi-août avec le début des qualifications pour l’EURO 2008 contre le Kazakhstan. Nul doute qu’il conservera les joueurs fit and well les plus doués… mais aussi les plus intelligents. Allez, il y a – contrairement à ce qu’on essayait de nous faire croire – un avenir pour la sélection.

On attend aussi de l’intelligence du Mondial. Pas nécessairement de l’intelligence à la grecque… qui avait réussi un exploit (sans lendemain ?) à l’EURO portugais. Attention, il n’y a pas de honte à être attentiste et à repartir en contres. Arsenal ne fait rien d’autre et cela ne l’empêche pas d’être populaire. Non, par intelligence, on veut parler de la juste exploitation du talent sur base d’une philosophie de jeu. Le Mondial a cela de génial qu’on peut jouir d’un panorama mondialiste total (sans les Diables…) des particularismes locaux. Car c’est vrai que les Anglais joueront toujours comme des Anglais, les Allemands comme des Allemands, les Brésiliens comme des Brésiliens, les Argentins comme des Argentins et les Italiens comme des Italiens. Ou bien pensons-nous comme cela tellement nous sommes conditionnés ? On rêve bien – par le truchement de Vandereycken – que le jeu  » à la belge  » retrouve ses lettres de noblesse…

Soyons objectifs : on aime retrouver certaines caractéristiques collées aux équipes nationales. Mais les choses évoluent et les coaches ne sont pas toujours de la même nationalité que leur sélection. Personnellement, on trouve absurde qu’un Suédois coache des Anglais, par exemple. Pas parce qu’on est contre la libre circulation des citoyens dans l’Union mais pour une simple raison de communication. Un non-Brésilien ne pourrait jamais gérer la Seleçao et Ronaldinho (voir ses racines p. 22 par Daniel Devos). Et ce n’est pas qu’une question de langue. Le Brésilien Felipe Scolari peut-il retirer autant de  » son  » Portugal qu’ Aimé Jacquet (voir son portrait p. 110 par Pierre Bilic) avec la France en 1998 ou Raymond Domenech maintenant ? Autant un coach national s’expose à plus de critiques, autant un coach étranger passera normalement à côté de tout ce qui est magique en sport. Raymond Goethals n’aurait jamais fait de l’OM un champion d’Europe sans parler français. Mais Otto Rehaghel a réussi en Grèce !

Le foot a aussi ça de – très – beau qu’on ne peut obtenir un résultat sans un individualiste au-dessus de la norme. Un artiste, un poète, un assassin ; peu importe. Celui qui conclut. Celui pour qui l’équipe a bossé et qui porte l’estocade. Comme Zizou en 98. Et comme Ronaldinho aujourd’hui ?

john baete

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