On change les habitudes!

Quand Mons porte l’étiquette de promu, cela lui réussit toujours. C’est ensuite que cela se complique. Comparaison entre les saisons 2002-2003, 2006-2007 et 2011-2012.

La rengaine semble connue et se répète après chaque montée. Du moins à Mons qui aimerait porter l’étiquette de promu plus longtemps qu’une saison. A chaque fois, cela s’est passé de la même façon. Une première saison en D1 exceptionnelle, une deuxième très difficile et une troisième catastrophique ponctuée par une relégation. Les Dragons sont partis pour vivre le même scénario. Du moins en ce qui concerne la première année. L’avenir nous dira si les Montois sauront éviter les précédents douloureux.

Peut-on vraiment comparer les premières saisons montoises ? Est-ce que le Mons 2002-2003 de Marc Grosjean ressemble à celui 2006-2007 de José Riga ou celui de cette saison version Dennis van Wijk ? Si, à certains niveaux, des similitudes apparaissent, de nombreuses différences affleurent également.

Toujours l’ enthousiasme de la montée

Ce n’est pas le propre de Mons mais cela s’est vérifié au Charles Tondreau après chaque montée : l’enthousiasme de la montée a été conservé durant la saison du retour en D1.  » Même si on s’était pris une raclée à Beveren (3-0) pour notre premier match de championnat, on a eu la chance de remporter la première rencontre à domicile et cela nous avait lancé. Cela nous a évité de gamberger « , se remémore l’entraîneur de l’époque, Grosjean.

 » Nous prenions match par match et nous faisions tout avec plaisir « , relate Thadée Gorniak, qui participa à l’aventure en 2002-2003 et qui termine actuellement sa carrière en P1, à Saint-Symphorien, tout en travaillant pour la Province de Hainaut et en préparant un master en politique économique et sociale.  » On était heureux de découvrir la D1, les grands stades, les affiches, la pression également. De plus, il y avait un bel équilibre et une réelle entente entre les joueurs issus des divisions inférieures et du cru qui voulaient prouver qu’ils avaient le niveau, et les transferts qui nous ont apporté leur expérience et qui sont vite entrés dans l’esprit du club.  »

En 2006-2007 aussi, malgré un noyau complètement remanié, l’équipe de Riga avait su conserver l’état d’esprit de la montée. Ce groupe, fait de bric et de broc, composé de grosses personnalités, prenait pourtant beaucoup de plaisir à évoluer ensemble.  » Le déclic ne fut pas sportif mais se passa en dehors du terrain « , se souvient Cédric Berthelin, déjà présent à l’époque.  » Cela s’est déroulé un mercredi. On s’était tous retrouvés pour manger un bout et boire un verre et le samedi suivant, on battait Bruges. C’était en février et après, on n’a plus perdu pendant cinq rencontres.  »

Cette saison encore, les hommes de van Wijk surfent sur la vague de la saison passée.

Toujours un vrai buteur

Autre similitude entre les trois époques, un buteur attitré. En 2002-2003, celui-ci s’appelait Cédric Roussel, qui coiffa le titre de meilleur buteur en juin 2003 avec 22 buts (ex-aequo avec Wesley Sonck). Arrivé d’Angleterre, le Hennuyer avait apporté son physique et son sens du but, offrant à ses partenaires un point d’ancrage permanent dans la surface.  » Quand on est promu ou qu’on joue la descente, avoir quelqu’un qui concrétise les occasions, c’est une bénédiction « , lâche Geo Van Pyperzeele, ancien président du comité sportif de l’Albert.  » On avait construit l’équipe autour d’un ou deux joueurs « , commente Grosjean.  » Roussel était un de ceux-là. L’animation offensive tournait autour de lui et lui a réussi à se remettre en question de façon magistrale.  »

Roussel était arrivé à Mons avec quelques kilos de trop et avait connu une préparation perturbée. Ce n’est que lors de son quatrième match, face au Standard, qu’il trouva les chemins des filets.  » A ce moment-là, on tirait déjà à boulets rouges sur lui car il ne marquait pas. Or, derrière lui, il y avait Tomasz Herman, notre meilleur buteur en D2, qui rongeait son frein. Mais j’ai tenu bon et je lui ai maintenu ma confiance car je voyais la quantité de travail qu’il abattait à l’entraînement. Je savais qu’il allait atteindre son objectif.  »

Même sens du but pour Momo Dahmane en 2006-2007. Acheté à la trêve hivernale au voisin des Francs Borains, il avait participé activement à la montée en plantant 11 buts en 13 matches. Lui aussi avait continué sur sa lancée.  » C’était un tueur devant le but « , se rappelle Berthelin.  » Ses qualités individuelles étaient indéniables même si ses choix de carrière n’ont pas été probants.  »

L’Algérien, chouchou du public et du président, pouvait également compter sur des passeurs quatre étoiles ( Benjamin Nicaise ou Alessandro Cordaro) comme Roussel avait pu compter sur les centres de Jean-Pierre La Placa et les caviars d’Eric Joly.

Cette année, c’est Jérémy Perbet qui score à quasiment chaque rencontre. Déjà 12 buts pour ce buteur atypique, ni grand, ni vif mais qui lit le jeu comme personne et qui est capable de marquer dans n’importe quelle position et de n’importe quelle façon.  » C’est évidemment une de nos forces même si il n’y a pas que Perbet à Mons ! « , nuance Berthelin.

Ces transferts-ci sont différents

Si les premières saisons se ressemblent, elles n’ont pas été construites de la même façon. En 2002-2003, alors que Mons n’a aucune expérience de la D1, Grosjean privilégie des joueurs expérimentés (Joly, Liviu Ciobotariu, Olivier Suray, Claude-Arnaud Rivenet) qu’il associe à des éléments qui ont réalisé la plus grande partie de leur carrière à Mons ( Olivier Berquemanne, Gorniak…). Mais cette politique n’avait pourtant pas été appréciée d’entrée par les supporters, choqués par la mise à l’écart de joueurs emblématiques comme Dimitri Mercier et Vincent Thoelen, atteints par la limite d’âge. Cela avait fait jaser tout Mons et une banderole rendait d’ailleurs hommage aux deux joueurs lors de l’entame de la saison à Beveren.  » Pour moi, ce fut un échec personnel de ne pas avoir su convaincre le comité sportif d’offrir un contrat à ces deux éléments « , explique Van Pyp’.  » Des garçons comme Thoelen et Mercier auraient dû profiter de la D1. Et même si on ne comptait plus sur eux comme titulaires, on aurait pu leur trouver une place dans le noyau.  »

Fort de son expérience louviéroise, Grosjean avait insisté pour transférer des anciens joueurs de D1.  » Nous avions, certes, une équipe performante en D2 mais pour ne pas revivre ce que j’avais vécu à La Louvière, il fallait enrôler des personnes qui connaissaient bien la D1 « , explique Grosjean.  » Ce fut une décision très dure à prendre mais pour le bien de l’Albert, il fallait le faire. Ce choix fut ressenti très négativement mais on était obligé : bien qu’on savait que Mons était susceptible de monter, personne n’avait construit le noyau pour la D1. On n’avait pas dégagé une ossature capable d’y vivre. On a dû transformer le noyau et cela a généré quelques dégâts collatéraux. « 

En 2006-2007, les dirigeants montois décident de ne pas prolonger la majeure partie du noyau ayant forcé la montée. Pendant la préparation, des dizaines et des dizaines de tests se succèdent et certains craignent même que Mons ne soit pas armé pour le début de championnat d’autant plus que les arrivées constituent toutes des inconnues. Mons a pris le pli de suivre l’exemple de Charleroi en se fournissant dans les divisions inférieures françaises.  » Il n’y avait plus que quatre joueurs champions en D2 dans le onze de base : Cordaro, Roberto Mirri, Daré Nibombéet moi « , explique Berthelin.  » Pendant des semaines, on avait vu défiler une ribambelle de tests. C’en était même risible. Si le voisin du stade s’était proposé, on l’aurait accepté ! Mais au final, cela a quand même débouché sur de belles surprises comme Frédéric Jay ou Wilfried Dalmat.  »

 » On s’était aperçu que ceux qui avaient participé à la montée étaient trop courts pour la D1 « , dit Van Pyp’.  » On avait recherché de la vivacité sur les flancs et une bonne assise défensive. Riga avait parfaitement construit son noyau. Il n’écoutait pas les sirènes des managers. Il voulait absolument voir sur le terrain ce que certains valaient avant de les faire signer. Et son jugement était souvent très bon. « 

Cette année, le RAEC Mons a préféré conserver sa confiance dans le noyau de D2, en lui ajoutant quelques tauliers de D1 comme Pieterjan Monteyne ou Nicaise.  » Tout le monde a été reconduit et les transferts furent particulièrement ciblés « , avoue Berthelin. Il faut dire que le noyau de van Wijk était loin d’être inexpérimenté avec des garçons comme Tim Matthys, Tom Van Imschoot ou Perbet, plus habitués à la D1 qu’à la D2.

Que ce soit le mélange entre noyau revu de fond en comble, assemblage entre D2-D1 et confiance dans le noyau de D2, les résultats sont donc les mêmes.

Le classement actuel est aussi différent

Si la première saison a débouché sur un excellent résultat, à chaque fois, le déroulement fut autre. Le Mons de Grosjean a commencé par une défaite et véritablement dû attendre la quatrième journée pour prendre son envol. Après 14 journées, l’Albert comptait 20 points en 2002.

Par contre, à cause des arrivées tardives, la sauce avait mis du temps à prendre en 2006. Et ce n’est qu’au deuxième tour que les hommes de Riga s’étaient révélés. Après 14 journées, ils ne comptaient que 13 points.

C’est à l’aune de ce bilan comptable qu’on peut mesurer le bon parcours actuel des Montois. Cette saison, ils ont pris confiance directement en arrachant un point contre le Standard et un à Anderlecht lors des quatre premières journées. On leur prédisait l’enfer à cause de leur calendrier mais ils l’ont particulièrement bien abordé et comptaient 20 points après 14 rencontres.

Le coaching a aussi changé

Autre différence : le style de l’entraîneur. Grosjean avait de l’expérience et du charisme mais jouait moins offensivement que ses deux successeurs. Il misait beaucoup sur la complicité avec ses joueurs.  » Il faisait confiance à ceux qui lui donnaient satisfaction « , se souvient Gorniak. Au niveau de l’envie offensive, Riga et van Wijk se ressemblent.  » Tous les deux sont également des entraîneurs exigeants. Ils ont horreur de l’amateurisme, van Wijk parfois un peu trop « , tente Berthelin.

L’équipe correspond bien également au visage du coach. Celle de Riga misait sur la technique avec un entrejeu performant (Nicaise, Hocine Ragued, Cordaro et Dalmat). Celle du Néerlandais a un jeu plus direct avec des arrières qui s’impliquent énormément.  » L’équipe actuelle ressemble à une BMW qui roule au diesel : elle joue toujours sur le même rythme et ne connaîtra jamais de problèmes. Mais elle manque parfois de reprises « , affirme Van Pyperzeele.

Les structures sont enfin dignes de la D1

Quand Mons est arrivé en D1, le Tondreau ressemblait à un stade de Promotion.  » Il était petit mais c’était un chaudron. On partait s’entraîner un peu partout « , dit Gorniak.  » Les vestiaires du stade étaient à ce point exigus qu’on avait peur de la réaction des grandes équipes « , se souvient Grosjean.  » Mais on sentait qu’on était la locomotive du club, les premiers à lancer Mons en D1. On galérait mais avec beaucoup de plaisir. « 

Tout cela s’est amélioré lors de la deuxième montée. Les terrains d’entraînement et le stade sont désormais dignes d’un vrai club de D1.

Même chose dans l’organigramme. La première et la deuxième expérience en D1 ont été plombées par des luttes internes et des magouilles de managers.  » Avant, on visait à chaque fois le court terme « , avoue Van Pyp’. Aujourd’hui, Dimitri Mbuyu, le directeur sportif, occupe un poste qui n’existait pas auparavant et fait l’interface entre l’entraîneur et le président.  » Aujourd’hui, les choix sont plus posés, plus réfléchis « , conclut Grosjean.

PAR STÉPHANE VANDE VELDE – photos: imageglobe

 » L’équipe actuelle ressemble à une BMW qui roule au diesel : elle joue toujours sur le même rythme, ne connaîtra jamais de problèmes. Mais elle manque parfois de reprises  » (Geo Van Pyperzeele)

 » A chaque fois, Mons a pu compter sur un vrai buteur : Roussel en 2002-2003, Dahmane en 2006-2007 et Perbet cette saison « 

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