Objectif Mondial

Bruno Govers

La Tunisie entend profiter de la prochaine phase finale de la Coupe d’Afrique des Nations pour obtenir le droit d’organiser le Mondial 2010.

Samedi dernier, pour la deuxième fois en l’espace d’une décennie, Tunis était le théâtre du tirage au sort d’une phase finale de la CAN, la Coupe d’Afrique des Nations. A l’automne 1993, la cérémonie avait eu lieu à l’Abou Nawass, le plus prestigieux hôtel de l’endroit. Cette fois, elle avait pour cadre le Renaissance, l’un des nombreux lieux de séjour qui se sont ajoutés, dans l’intervalle, au sein de la capitale et de sa proche périphérie, à Gammarth. Un boom perceptible aussi, au demeurant, à l’échelon des infrastructures sportives puisque le complexe d’El Menzah, véritable joyau de l’épreuve, en 1994, avec sa structure en forme d’orange éclatée, doit composer aujourd’hui avec une enceinte plus somptueuse encore : le stade du 7 mars de Radès, calqué sur le modèle de l’Arena d’Amsterdam, avec ses 50.000 places assises couvertes. Non loin de là, toujours en banlieue, Sousse s’est dotée d’un anneau olympique, tandis que Bizerte et Monastir se sont également greffées comme villes-hôtes sur Sfax, déjà à l’honneur par le passé.

Toutes ces transformations répondent à une double réalité économique et sportive. D’un côté, jamais le plus petit représentant du Maghreb n’a été aussi populaire auprès des grands voyageurs, au point de devoir doper tant et plus ses capacités d’accueil. De l’autre, jamais le football tunisien, non plus, n’a eu autant le vent en poupe au cours des dix dernières années. Avec deux participations en apothéose de la Coupe du Monde, en 1998 et 2002, cinq présences parmi le gratin africain (1994, 1996, 2000, 2002 et 2004), une participation aux J.O. de 1996 ainsi qu’une médaille d’or aux Jeux Méditerranéens en 2001, il a tellement bien mérité du pays que celui-ci s’est mis en tête, conjointement avec la Libye, de poser sa candidature à l’organisation de la Coupe du Monde 2010. Les deux pays ont d’ailleurs profité de l’occasion pour annoncer leur candidature commune. La Tunisie n’est toutefois pas la seule, avec son voisin, à vouloir entrer en ligne de compte pour la mise sur pied d’une compétition qui, en vertu du système de la rotation des continents, sera attribuée à un sociétaire africain le 21 mai prochain. Car l’Afrique du Sud, le Maroc, l’Egypte et le Nigeria nourrissent exactement le même dessein.

 » Par rapport à la concurrence, qui s’appuie essentiellement sur des projets, les nôtres ont d’ores et déjà été mis à exécution pour les besoins de cette Coupe d’Afrique des Nations 2004 « , observe Slim Chiboub, président du Comité d’organisation de l’épreuve (COCAN) et homme fort du club le plus emblématique de Tunisie, l’Espérance Sportive de Tunis.  » Si nous sommes parés à tous points de vue au plan logistique, il nous incombe de faire nos preuves à d’autres niveaux afin de mettre tous les atouts de notre côté pour convaincre les décideurs du bien-fondé de notre candidature. A cet effet, nous avons tiré les leçons de notre entreprise malheureuse en 1994. Cette année-là, pour ne pas avoir franchi le premier tour de l’épreuve, nous avions dû faire face à une désertion du public. Grâce à des prix nettement plus démocratiques et à la participation de nos amis égyptiens, marocains et algériens, je ne doute pas du succès de l’entreprise, cette fois.. D’autant plus que notre propre équipe nationale semble autrement plus compétitive aujourd’hui qu’il y a une décade « . Rappelons quand même que la Tunisie avait remplacé au pied levé le Zimbabwe, qui avait reçu l’organisation de la CAN 94.

En quête de rachat

Tête de série, au même titre que le Cameroun, champion sortant, le Nigeria et le Sénégal, la Tunisie dirigée par l’ex-coach de la France, Roger Lemerre, a eu la chance de pouvoir compter sur un tirage des plus cléments, puisqu’elle est amenée à devoir en découdre avec un néophyte, le Rwanda, un revenant, la Guinée, et une équipe de la République Démocratique du Congo en pleine phase de reconstruction. Dans ces conditions, on ne comprendrait pas qu’une place en quarts lui échappe. A ce stade, elle devrait logiquement se mesurer avec le Sénégal ou le Mali qui, selon toute vraisemblance, détermineront la hiérarchie de leur poule devant le Burkina Faso et le Kenya, absent de la scène continentale depuis 12 ans.

Au sein du groupe C, le Cameroun, finaliste de la récente Coupe des Confédérations, a une fois de plus la faveur des pronostics devant un autre habitué aux honneurs sur la scène africaine : l’Egypte. Entre ces deux nations et la concurrence, formée d’une équipe d’Algérie peu consistante, comme on l’a vu face aux Diables Rouges, et le Zimbabwe, que bien peu attendaient à ce niveau, le décalage semble important, en tout cas. Favori, le Cameroun devrait croiser le fer en quarts avec le deuxième de la poule D. Mais quelle sera son identité ? A ce niveau, c’est un peu la bouteille à l’encre car le Nigeria, le Maroc et l’Afrique du Sud se tiennent manifestement de près. Sans compter que de tous les petits poucets, le Bénin possède la sélection la plus forte. De quoi augurer de belles batailles !

On notera, en guise d’épilogue, que deux géants du football africain manquent dans ce plateau final : le Ghana, quadruple vainqueur de l’événement et la Côte-d’Ivoire, champion d’Afrique en 1992. Un autre habitué à ce stade de la compétition, la Zambie, s’est effacée pour sa part, en qualifications, au profit du Zimbabwe en tant que deuxième représentant de l’Afrique australe au côté de l’Afrique du Sud. En revanche, l’Afrique de l’Est, aux abonnés absents depuis de nombreuses années, signe un formidable retour à l’avant-plan grâce à la participation du Kenya et du Rwanda. Ce dernier, à l’instar du Bénin et du Zimbabwe fait partie des invités surprises car jamais depuis 1957, année de création de la CAN, ces trois nations n’avaient participé à une phase finale.  » C’est la preuve que le football bouge sur notre continent « , remarque le président de la Confédération Africaine de Football (CAF), Issa Hayatou.  » D’un point de vue purement footballistique, nous sommes capables de rivaliser avec les meilleurs. Le seul domaine où nous accusons encore du retard, ce sont les infrastructures. Mais nous y travaillons « .

Le grand manitou du football africain sait d’autant plus de quoi il retourne que son propre pays, le Cameroun, n’a plus été l’hôte d’une phase finale depuis 30 ans, faute de stades adéquats à Yaoundé et Douala. Ce qui est quand même un comble quand, avec les Lions Indomptables, on dispose sur le terrain de la plus belle vitrine du continent !

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