NOUVELLE PHILOSOPHIE ESPAGNOLE

Bruno Govers

La monopolisation du ballon, chère aux ténors espagnols, contraste avec le style des autres grands d’Europe.

Emilio Ferrera: Non, toutes ces équipes avaient déjà prouvé au cours du premier round ce qu’elles avaient dans le ventre: le Real Madrid, en survolant les débats contre Anderlecht et le Lokomotiv Moscou, mais aussi face à l’AS Roma; La Corogne en réalisant un match d’anthologie à Manchester United et le FC Barcelone qui, pour la première fois depuis très longtemps, a franchi le volet initial de l’épreuve. Le mérite du Barça est, assurément, le plus grand. Car il n’est manifestement pas à la portée du premier venu de s’imposer au FC Liverpool, 1 à 3, après avoir été mené au score. Je pointerai en second lieu la prestation du Depor qui, en l’espace d’une période, a renvoyé Arsenal à ses études. Et les footballeurs madrilènes ont fait joujou avec le Sparta Prague. Après chaque égalisation, Fernando Hierro et les siens se sont chaque fois plus à tuer le suspense en inscrivant un nouveau but comme à la parade.

Après la première journée du deuxième tour de la Ligue des Champions, trois équipes espagnoles occupent la tête de leur groupe respectif. Hasard?

Y a-t-il un dénominateur commun à ces équipes?

Ce qui caractérise de la même manière ces trois formations, malgré des spécificités propres sur le plan de la densité offensive -un seul homme en pointe au Deportivo La Corogne (Diego Tristan), pour deux au Real Madrid (Morientes et Raul) voire trois au FC Barcelone (Patrick Kluivert, Marc Overmars et Fabio Rochemback)-, c’est la tendance à monopoliser le ballon. Dans le match Liverpool-Barça, il y a eu 34% de possession du cuir du côté anglais, contre 66% dans le camp azulgrana. C’est invraisemblable, surtout à Anfield Road. Et ces chiffres étaient à peine moins disproportionnés dans les deux autres cas. Par là, les caïds de la Liga se distancient de la plupart des autres grands cercles européens. Au Bayern Munich ou à la Juventus, pour ne citer que ces deux cas, la propension consiste à évoluer de manière très groupée la plupart du temps, tout en essayant d’être percutant dans les quelques secondes qui suivent la conquête du ballon. Au Real, au Barça ou au Depor, on recense parfois vingt, trente ou même davantage de touches de balle avant de placer une accélération. Je n’en veux pour preuve que le deuxième but des Madrilènes au Parc Astrid, par Steve McManaman. C’est du grand art, assurément, qui se traduit, notamment, au niveau de la qualité des buts inscrits. Car à partir du moment où un ballon transite par des tas de pieds différents, de gauche à droite du terrain et vice-versa, la touche finale ne peut être que superbe. Le hic, c’est que lorsque la fluidité n’est pas au rendez-vous, la belle mécanique a immanquablement des ratés. Et c’est ce qui explique pourquoi ces phalanges, en dépit du fait qu’elles produisent à coup sûr le football le plus chatoyant d’Europe, peuvent, malgré tout, rester à la merci d’une équipe au jeu plus rigoureux et aux goals moins somptueux. S’il n’en était ainsi, le Real ou le Barça seraient inévitablement champions d’Europe chaque année.

Bruno Govers

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