NOUS, DES ENFANTS GÂTÉS ?

Bruno Govers

Deuxième rendez-vous avec l’arrière du Lierse qui nous écrira ses impressions tout au long de la saison.

Ça y est, notre saison tant aimée a repris, déjà quatre journées de championnat qui nous ont déjà fait le plein d’émotions. Pourtant, quelque chose a changé. Non pas chez vous, passionnés à petite ou grande échelle mais chez nous, les footballeurs, les enfants gâtés comme on nous qualifie souvent. Quelque chose qui fait que notre merveilleux métier est devenu un métier comme les autres, en Belgique ou ailleurs. La conjoncture économique a dicté sa dure loi aux employeurs, plus que jamais contraints de jouer la carte de la restriction budgétaire, de plus penser comptabilité qu’ambition sportive.

Etre footballeur, oui, mais à quel prix ? Partout en Europe, les écarts de salaires entre les stars et les autres sont devenus hallucinants. Et en Belgique, pour avoir connu la bonne période et l’actuelle, je peux vous assurer que les lendemains ne s’annoncent pas roses. Joueurs impayés pendant des mois, contrats non respectés ou rompus, mises à l’écart, chômage sportif… tout cela est bien réel. Beaucoup de joueurs sont très courageux face à une telle adversité, eux qui sont redescendus sur terre, avec des problèmes qu’ils n’avaient jamais connus ni même envisagés.

Et pourtant, ils continuent à s’entraîner durement, à souffrir, à se faire insulter par le public adverse, à se faire houspiller par leur entraîneur, à se faire buser par les médias. Mais ils ne peuvent pas protester ou encore moins faire la grève car s’arrêter est synonyme de désentraînement. Tous les joueurs sans club s’entraînent d’ailleurs ensemble pour garder la forme, pour ne pas déprimer en allant courir tout seul et parce que l’amour du ballon est trop présent. Aussi parce que beaucoup ont tout sacrifié pour lui, parce que c’est pratiquement la seule chose qu’ils savent faire, jouer au foot…

Et ils attendent un coup de téléphone, souvent de leur manager qui tient leur avenir entre ses mains, celui de leur famille et de leurs enfants. Dans leur tête, ils restent très fiers d’avoir été de bons ou très bons joueurs, toujours convaincus de l’être toujours. Ils gardent l’espoir de revivre ces sensations du samedi soir, de se retrouver sous les projecteurs, d’avoir à nouveau leur nom dans le journal.

Moi qui fus anderlechtois pendant 17 années, je me demande encore comment il est possible qu’un club comme le RWDM ait disparu. C’est intolérable ! Un scandale financier, une magouille bien de chez nous et ce sont mes potes Marka et Jean-Pierre qui sont désespérés, comme on les comprend, en même temps tous leurs fidèles supporters. Quoi de plus génial qu’un derby ? Cela faisait l’actualité, on jasait depuis les Marolles jusqu’au Fort Jaco.

Messieurs les dirigeants, avant de venir chercher la gloire dans le foot, sachez que vous mettez les pieds dans un engrenage très particulier où l’émotionnel et l’irrationnel prennent souvent une place importante. RWDM, Malines, Alost, Harelbeke, Lommel… Et Charleroi qui vient de suer sang et eau pour éviter la chute.. Mais qui est responsable ? Les dirigeants qui ont exagéré dans les salaires des joueurs ? Je me dis que les clubs qui payent le mieux en Belgique n’ont aucun problème à ce niveau. Etrange…

Quelque chose a changé, oui. Peut-être depuis cette carte de supporter, la fancard, qui a freiné tellement de gens désireux de voir de beaux matches, des familles qui ont renoncé car c’est trop compliqué. Mais lorsque je regarde le dernier match des Diables Rouges je vois que ce sont principalement des enfants qui garnissent les gradins du stade Roi Baudouin ! Eh oui, l’Union Belge se rattrape en distribuant des invitations à la pelle.

Que l’autorité est parfois difficile à cerner. Mais avant d’exiger des garanties bancaires et de jouer les huissiers, ne faudrait-il pas penser plus humainement,… alors que ceux-là même qui sont les gendarmes financiers n’ont pas toujours été aussi clairs dans leurs comptes ? La hiérarchie politique sportive nous impose des règlements, mais la beauté et la passion du foot ne devraient pas en pâtir. Car les gens ne viennent pas au stade pour les dirigeants ou sponsors, mais pour nous, les joueurs et que nous jouons pour le public.

Cela dit, quand je vois ce début de championnat, je me dis qu’il y aura toujours du monde dans les stades. Et si le club ne peut plus payer l’électricité, et bien c’est pas grave. On jouera l’après-midi.

A bientôt.

Bruno Govers

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