NO RESPECT

Le meilleur élément de la saison écoulée rejoindra Gand dès le mois de janvier.

Que fait un magasin en faillite ? Il liquide tout. C’est un peu ce qu’a fait Charleroi cette semaine. 50 % sur le stade, 75 % sur l’entraîneur (mais promis la nouvelle collection va arriver), une équipe au rabais (à Genk, Charleroi comptait trois suspendus et six blessés et a dû lancer deux jeunes, Joris Jehan et Gregory Lazitch) et une direction qui décline toute responsabilité sur la qualité de ses produits. Mais il n’y en aura pas pour tout le monde. Les premiers arrivés seront les premiers servis et à ce petit jeu-là, c’est Gand qui a peut-être réalisé la meilleure affaire en s’attachant les services de Tim Smolders, le meilleur élément carolo de la saison dernière. Après deux ans et demi de bons et loyaux services, Smolders quitte la maison zébrée sur un sentiment mitigé.

Pourquoi quittez-vous Charleroi ?

Tim Smolders : D’abord, je dois dire que je me suis toujours senti heureux à Charleroi et dans le groupe. J’aimais l’ambiance, la ville. Je me sentais bien.

Ce n’est pas ce que vous avez déclaré à la Gazet van Antwerpen.

C’est pour cela que je veux mettre les choses au point. On a mis des mots dans ma bouche. Le journaliste m’a demandé ce qui manquait à Charleroi, j’ai répondu que c’était une question de bonne mentalité, qu’il fallait l’avoir contre les grandes équipes mais aussi contre les petites. Et c’est devenu – Heureusement, je ne serai plus là en janvier pour voir cette mentalité. J’ai toujours été heureux ici.

Pourquoi partez-vous alors ?

La question est : pourquoi je ne veux pas rester ? Et cela me paraît évident. Je n’ai pas voulu prolonger car on ne m’a pas montré de respect en début de saison. La première proposition de prolongation manquait totalement de correction, je trouve. Et puis la direction m’obligeait à signer en me menaçant de ne plus m’aligner et là, je me suis dit – Pour moi, c’est terminé ! Et j’ai commencé à chercher un nouveau club.

Ces trois derniers mois, avez-vous pensé rester à Charleroi ?

Non.

Vous étiez sûr de partir en janvier ?

Oui, je connais un peu la maison…

… ce qui signifie ?

Je savais que les dirigeants préféreraient prendre leur argent en janvier plutôt que de me laisser partir gratuitement en juin. Mais il fallait encore trouver un club intéressé en janvier et capable de payer une somme de transfert pour six mois. Ce n’est pas évident.

D’autant plus qu’Abbas Bayat avait fixé le prix à 400.000 euros et qu’il en faisait une question de principe…

Je ne connais pas la somme mais je ne pense pas que Gand a déboursé autant !

Donc le prix est inférieur ?

Oui, mais à Charleroi, ils doivent être satisfaits puisqu’ils ont accepté la transaction. Dans la position dans laquelle le club se trouve au classement, il aurait peut-être eu besoin de moi au second tour.

Et le second tour de Charleroi, ce n’est plus votre problème ?

Mais si ! Je souhaite que Charleroi fasse un bon deuxième tour. Pour mes amis encore présents au club. Pour les supporters.

Comment avez-vous vécu les premiers mois de l’année ?

Difficilement. Quand tu passes tous les jours dans les journaux pour des raisons extra-sportives, que tu sais que tu dois chercher un autre club, que tu ne joues plus, ce n’est plus avec la même conviction que tu vas au stade. Aux entraînements, aux matches, tu te donnes à fond mais il te manque quelque chose, une ambition à long terme.

En affirmant cela, n’apportez-vous pas de l’eau au moulin des Bayat qui peuvent toujours dire que vous n’étiez plus assez motivé ?

J’étais toujours motivé. C’est quand tu rentres du football que tu penses sans cesse à cela. Quand j’ai été rassuré sur mon avenir, les dirigeants m’ont laissé tranquille et j’ai pu à nouveau jouer. La vie quotidienne a alors repris.

 » J’avais de bons contacts avec la direction sauf quand on parlait d’argent « 

Est-ce que l’instabilité du club vous a également convaincu de partir ?

Quand je ne jouais pas, oui.

Est-ce que votre départ vous laisse un peu un goût amer ?

Je pense que je suis arrivé par la petite porte. Personne ne me connaissait. Sauf Jacky Mathijssen et Raymond Mommens. Et j’ai l’impression finalement que je pars par la même porte. J’ai grandi comme joueur mais mon départ aurait pu être différent.

Partir par la grande porte ?

Oui. J’ai le respect de mes collègues et des supporters et cela me donne beaucoup de satisfaction mais je ne pars pas comme Joseph Akpala qui a fêté son titre de meilleur buteur lors du dernier match.

Vous vous attendez à quelque chose pour le dernier match contre Dender ?

Je ne sais déjà pas si je pourrai jouer puisque mon genou me fait souffrir. Je sais que les supporters m’aiment bien et les joueurs aussi mais ce n’est pas la même chose que de s’entendre avec tout le monde au club.

Pouvez-vous comprendre que le joueur de l’année ne commence pas la saison suivante ?

A Charleroi, non. Dans un autre club oui, s’il y a beaucoup de concurrence. Moi, j’avais la même motivation. J’ai même terminé parmi les meilleurs buteurs de la préparation sans avoir beaucoup joué. La décision de m’écarter a étonné tout le monde.

Dans cette histoire, qu’est-ce qui vous a le plus déçu ?

Le fait que les dirigeants n’aient pas tenté, du moins au début, de garder leur Zèbre d’or.

Quelles ont été vos relations avec les dirigeants, ces trois derniers mois : difficiles, inexistantes ?

Comme avant. On se disait bonjour. On avait de bons contacts sauf quand on parlait argent.

En définitive, Smolders n’est-il pas trop cher pour un club comme Charleroi ?

C’est toujours hautain de dire cela. Sportivement non. Dans ce contexte-là, à savoir que j’étais fin de contrat, que je restais sur deux saisons, que j’étais Zèbre d’or, je pense que Charleroi était capable de payer plus que ce qu’il m’offrait.

Vous voulez dire que Charleroi doit être capable de faire quelques écarts à son échelle salariale ?

Charleroi doit avoir cinq ou six joueurs de base ayant quelque chose à dire dans le vestiaire. Bref, des valeurs sûres…

 » Je ne vais jamais rapporter trois millions au club « 

… auxquelles il faut offrir un salaire digne de leur statut ?

Oui, je pense. Toutefois, le problème se situe à un autre niveau. Je ne vais jamais rapporter trois millions au club et donc, on peut se dire que je n’ai pas le droit de gagner davantage mais moi, je ne réfléchis pas comme cela. Tu ne vas jamais vendre Defays à 2 millions d’euros, pourtant s’il n’était pas là aujourd’hui…

Gagnerez-vous beaucoup plus à Gand ?

On va dire que j’améliore ma situation sur les trois fronts : financier, sportif et familial puisque je me rapproche de la famille de ma femme.

Qu’est-ce que vous retenez de Charleroi ?

Que c’est le club qui m’a fait évoluer. Enfin, c’est surtout Mathijssen qui m’a fait revivre. Sans lui, je n’aurais jamais abouti à Charleroi.

A-t-il essayé de vous faire venir à Bruges ?

Non. Et puis, ce n’est pas mon rêve de retourner à Bruges. Je suis satisfait avec mon transfert à Gand.

Quelle est la valeur de Charleroi ?

La vérité se situe toujours dans les classements. Et pas dans la vérité d’une saison. Je dirais que l’équipe doit se situer entre la 5e et la 8e place. Charleroi n’a pas les moyens de Bruges, Standard, Anderlecht, Genk, Gand, voire même du Germinal Beerschot.

Le Sporting fait-il quelque chose pour grandir ?

Le club essaie. En tablant sur la stabilité. En essayant d’être plus professionnel : ils ont rénové les vestiaires, ils ont mis une nouvelle pelouse.

Mais est-ce assez pour être ambitieux ?

Il faut avant tout investir dans les infrastructures. Si un entraîneur français vient voir les terrains d’entraînement, il ne restera pas. Avec une bonne infrastructure, tu crées une image positive et tu attires plus facilement de bons joueurs. Si moi je parle par exemple avec Geraerts et que je lui dis – Les terrains d’entraînement, c’est de la m… , tu crois que cela lui donne envie de venir à Charleroi ? Donc, pour attirer cette gamme de joueurs, tu dois compenser par le salaire et là, cela devient compliqué.

Charleroi vit une crise : le vestiaire est-il divisé ?

Il n’y a pas de clans. Tout le monde s’entend bien mais certaines mentalités ne vont pas avec d’autres. Il ne faut pas posséder les mêmes caractères dans un groupe mais il faut vouloir gagner ensemble.

N’y a-t-il pas trop de joueurs qui prennent Charleroi comme un tremplin ?

Si. Certains ne se rendent pas compte que c’est en jouant en équipe qu’ils pourront aller dans un autre club.

N’est-ce pas un peu cocasse d’annoncer le limogeage de Siquet mais de le garder encore un peu ?

Je pense que les dirigeants n’auraient rien dû dire jusqu’à l’arrivée du nouvel entraîneur. Cela aurait eu moins d’impact sur le groupe.

Reviendrez-vous voir un match à Charleroi ?

J’aimerais bien. Mais je ne vais pas appeler la direction pour avoir des places. Je passerai par Laquait.

par stéphane vande velde

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