Nickel Ange

L’attaquant argentin n’a pas mis longtemps à prouver qu’il valait bien les 75 millions d’euros déboursés par Manchester United pour acquérir ses services. Mais qui est-il vraiment ?

Peu de joueurs de Manchester United répondent autant qu’Angel Di Maria (26) au profil d’homme complet exigé par Louis van Gaal. Elu Homme du Match de la finale de la Ligue des Champions entre le Real et l’Atletico Madrid, il a livré une toute grande Coupe du monde et est actuellement un des sauveurs d’Old Trafford. Mais tout cela n’est rien à côté de ce qu’il a vécu voici un an et demi.

 » Votre fille n’a que 30 % de chances de survie « , dirent alors les médecins à l’international argentin (55 sélections) lorsque sa femme connut des complications au cours de sa grossesse. En avril 2013, Mia naissait prématurément, à six mois.  » Elle était si petite qu’elle tenait dans une seule main « , dit-il.

 » Ma femme et moi avons vécu des moments très difficiles. Chaque jour, nous devions aller à l’hôpital. Mais nous avons décidé de nous battre et notre fille en a fait autant. A l’hôpital, nous rencontrions chaque jour d’autres parents d’enfants malades. La souffrance crée des liens.  »

Pendant deux mois, ce fut l’incertitude. Lorsqu’il s’est entendu dire que son bébé pouvait quitter les soins intensifs, Di Maria a changé. Aujourd’hui, son bonheur est total. Il affirme que le plus beau moment de l’année 2014 fut le premier anniversaire de sa fille, juste avant le début de la préparation pour la Coupe du monde. Sa femme avait même écrit une petite lettre pour l’occasion et l’Argentin, trop ému, n’a pu la lire jusqu’au bout.

 » Ma fille m’a appris que tout ce qui semblait très difficile était en réalité très facile « , dit-il.  » Elle me fournit une bonne partie de mon énergie et c’est ce qui m’a permis de livrer une saison aussi spectaculaire. J’ai appris à mordre sur ma chique, ça m’a rendu plus fort.  »

Le nouveau Giggs de Manchester United

Ce n’est pas seulement le joueur le plus cher de l’histoire de la Premier League qui parle mais aussi le transfert qui a rapporté le plus d’argent au Real Madrid. Pour bien jouer, un joueur doit avant tout se sentir entouré par ses proches. Di Maria en aura bien besoin pour mener à bien la mission que Van Gaal lui a confiée : tirer Manchester United vers le haut. Bien sûr, Robin van Persie, Wayne Rooney et Radamel Falcao ont un rôle important à jouer en front de bandière mais ce prix de 75 millions a quelque chose de magique.

Jusqu’ici, Van Gaal est plus que satisfait de son Argentin, qui apporte de la vitesse et de la profondeur. Nani, prêté au Sporting Lisbonne, était le dernier dribbleur de l’ancienne école à jouer à l’instinct. Di Maria lit beaucoup mieux le jeu, délivre de bien meilleures passes et beaucoup plus d’assists, les statistiques le prouvent.

Pour ManU, il est le Ryan Giggs des temps modernes. Dès son premier match, The Guardian fut élogieux à son sujet :  » Les problèmes actuels de Manchester se vérifièrent après la 69e minute, lorsque Di Maria fut remplacé par le Brésilien Anderson.  »

D’emblée, la direction des Red Devils plaça Di Maria sur un piédestal, n’hésitant pas à lui confier le numéro 7, porté avant lui par George Best, Eric Cantona, David Beckham ou Cristiano Ronaldo.  » Je sais ce que représente ce numéro « , dit Di Maria.  » Cristiano m’en a parlé. Je veux être fier de porter ce maillot et le club compte sur moi. Il m’appartient donc de répondre à l’attente.  »

 » Je suis très content de mes premières semaines à Manchester « , poursuit ce fils de mineur qui est né et a grandi à Rosario.  » J’ai tout de suite remarqué qu’en Premier League, le jeu était plus physique et plus agressif qu’en Primera División. J’ai dû m’habituer mais je pense que je me suis bien adapté. De nombreux joueurs de Premier League ont le même gabarit que moi. Eden Hazard et David Silva se sont également construit une carapace. Van Gaal a joué un rôle important dans mon arrivée au club. Il a tout de suite dit qu’il me voulait. Et ce qui ne gâche rien, c’est qu’il parle espagnol.  »

Les fans du Real le supplient de rester

On a souvent répété, ces derniers mois, que Manchester avait perdu son âme en se débarrassant de David Welbeck, formé au club, pour acheter des joueurs comme Falcao et Di Maria. D’anciennes icônes du club comme Bryan Robson, Gary Neville et Paul Scholes ont exprimé leurs doutes quant à ces choix, parlant également d’overspending, de dépenses exagérées. Les critiques plus nuancées diront en revanche que Manchester United aurait dû davantage planifier ce virage car cela faisait déjà des années que le staff technique ne pouvait plus s’appuyer sur des médians de classe internationale comme Scholes ou Giggs.

 » Angel est un talent pur de classe mondiale mais c’est surtout un joueur qui pense à l’équipe « , dit Van Gaal.  » Il est rapide, son pied gauche est fantastique. De plus, il peut jouer dans le système que je veux imposer, que ce soit sur l’aile ou au centre de l’entrejeu.  » L’arrivée de Di Maria et, dans une moindre mesure, celle du défenseur Marcos Rojo ont aussi permis à Manchester United de devenir un des clubs les plus populaires en Argentine. Un honneur qu’il dispute à Manchester City, son prochain adversaire, qui aligne Sergio Agüero, Pablo Zabaleta, Willy Caballero et Martin Demichelis.

On ne saura jamais exactement pourquoi, après quatre ans, le Real Madrid a laissé partir Angel Di Maria qui, avec ses 24 assists (17 en Primera Division, 5 en Ligue des Champions, 2 en Coupe du Roi) avait pris une part importante dans les victoires du club madrilène la saison dernière. Angel, quedate (Angel, reste !), clamèrent les fans du Real au cours des derniers matches. Mais on n’a jamais senti Di Maria très proche de ses dirigeants.

Il y a un an, malgré l’arrivée de Gareth Bale, il avait su se battre pour trouver grâce aux yeux de Carlo Ancelotti. Non plus en jouant sur le flanc mais en évoluant dans le triangle de l’entrejeu aux côtés de Xabi Alonso et Luka Modric. L’arrivée de nouveaux galactiques comme James Rodriguez et Toni Kroos obligeait le Real à vendre.

 » Soyons clairs : je ne voulais pas partir « , dit Di Maria.  » Après La Decima (la dixième victoire en Ligue des Champions/Coupe d’Europe des clubs champions, ndlr) et la Coupe du monde, j’ai attendu un signal de la direction qui n’est jamais venu. Le Real a choisi d’engager d’autres joueurs, j’ai donc dû partir.  »

Question d’argent

Ce qui lui fit le plus mal, c’est la lettre qu’il reçut le jour de la finale de la Coupe du monde. Il était blessé au fémur et le Real lui demandait de ne pas jouer.  » J’ai immédiatement déchiré cette lettre « , révèle-t-il.  » Elle m’a fait très mal, c’est la pire des choses qui me soit arrivée.  » Finalement, il prit place sur le banc pour le match contre l’Allemagne (0-1 après prolongations) mais n’entra pas au jeu. Pour Florentino Perez, le président du Real, Di Maria est un joueur à qui il manque un petit quelque chose pour être une véritable star mondiale.

C’est en partie dû au fait qu’il n’a coûté que 25 millions d’euros lorsqu’il est arrivé de Benfica en 2010. Le montant était sans doute encore imposant pour l’époque mais en 2014, il est tout à fait banal. Selon Marca, Ancelotti s’est battu jusqu’au bout pour conserver Di Maria tandis que Cristiano Ronaldo et Sergio Ramos se sont mouillés pour qu’il reste également.

A Madrid, on a laissé entendre qu’il s’agissait également d’une question d’argent. Le contrat de Di Maria avait été fortement revu à la hausse à deux reprises en trois ans. Une troisième augmentation aurait fait en sorte qu’il gagne autant que Cristiano Ronaldo, ce qui était impensable. Un sondage de Marca a également joué un mauvais rôle.

Il y a trois ans, l’Argentin avait été élu joueur le plus laid du championnat d’Espagne. Personne n’ose affirmer que Perez s’est laissé influencer par cela mais on sait que l’homme d’affaires accorde beaucoup d’importance aux apparences.

Certes, Di Maria n’a pas la babyface de James Rodriguez, il ne fait pas la une des magazines comme Cristiano Ronaldo et n’est pas aussi prestigieux que Gareth Bale. Mais, comme le dit Louis van Gaal, c’est un travailleur qui plaît au commun des supporters. Ce n’est pas pour rien qu’en équipe nationale d’Argentine, le flanc gauche a été rebaptisé Avenida Angel Di Maria : une voie rapide qu’il arpente 90 minutes durant.

 » Je ne dois pas m’arrêter de courir « , disait-il récemment.  » En travaillant, je soulage les défenseurs et les médians. L’équipe ne doit pas tourner autour de moi. Quand je n’arrive pas à faire ce que je veux du ballon, je le donne à quelqu’un d’autre.  »

Nouveau statut

Pour Di Maria, ce statut de star absolue de Manchester United est relativement nouveau car jusqu’ici, il a toujours dû composer avec un équipier plus fameux que lui, qu’il s’agisse de Cristiano Ronaldo au Real Madrid ou de Lionel Messi en équipe nationale d’Argentine.

 » Je suis surtout fier de pouvoir jouer avec des gens pareils. Plus tard, je raconterai à mes petits-enfants que j’ai remporté la Ligue des Champions aux côtés de Cristiano Ronaldo. Et Messi, c’est tout simplement le meilleur joueur du monde. A Manchester United, j’espère encore progresser, comme je l’ai fait à Madrid. Avec Louis van Gaal, ce doit être possible. Il veut toujours gagner, il veut ramener le club en Ligue des Champions le plus rapidement possible et c’est mon objectif également.  »

PAR VINCENT OKKER – PHOTOS: BELGAIMAGE

 » Ma fille, née à 6 mois, m’a appris que tout ce qui paraît difficile est en réalité très facile.  »

 » La lettre du Real, me demandant de ne pas disputer la finale du Mondial, est la pire des choses qui me soit jamais arrivée.  »

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