Ni Radja, ni Zlatan ?

Je n’aime pas les courses de bagnoles, elles font tout le contraire qu’inciter certains fanas du genre à rouler réglo dans la vie quotidienne. Et les accidents en compétition, fussent-ils tragiques, font sournoisement partie du spectacle : redoutés mais espérés en même temps, porteurs d’un plus malsain, dévorés des yeux comme la course elle-même. Et j’aime me convaincre que le foot n’est pas comme ça malgré ses gros défauts : une horrible fracture ouverte tibia/péroné, telle récemment celle de Federico Mattiello, vient gâcher le spectacle et non pas l’enrichir ! Je veux le croire mais il m’arrive de douter…comme quand j’apprends le nombre de visionnements sur Youtube de ce tackle sur le gars du Chievo Vérone par Radja Nainggolan !

Les avis belges sont gentils avec Radja… pas sûr qu’ils l’eussent été autant s’il avait été noir ou serbe, et que la victime se fût appelée Eden Hazard. C’est l’éternelle histoire triste de deux gars en course, debout et en lutte vers un ballon. L’un se sent arriver le premier et reste debout sans penser à autre chose : mais le second, sentant qu’il arrivera juste trop tard, pense à se jeter pied en avant pour priver le premier du ballon ! On se jette 10000 fois, on se cogne 1000 fois, ça fait mal 100 fois, c’est grave 10 fois et gravissime 1 fois : Mattiello est la dernière victime connue d’une loi statistique inhérente au foot, sport dit de contact. Il y en a déjà eu d’autres depuis de par le monde, à l’insu des médias que nous fréquentons.

Il faut marteler l’actuelle législation concernant le tackle, tant s’ânonnent encore des vieilleries périmées. Terminée (depuis 1995) la sanction par coup franc direct sur base d’un arbitrage ayant estimé une intentionnalité de faire mal. Terminé (depuis 2005) le carton rouge quand le tackle jugé fautif a eu lieu par derrière. Et terminée (depuis 2008) la sanction par coup franc direct si le tackleur a touché l’adversaire avant le ballon. D’où qu’il surgisse, le tackle actuel est pénalisé d’un coup franc direct si l’arbitre l’estime simplement commis avec imprudence ; il s’additionne d’un carton jaune s’il est plutôt commis avec témérité, et d’un carton rouge s’il y a eu excès d’engagement, danger pour l’intégrité physique de l’adversaire (texto).

Raisonnons donc. Vu que l’intégrité physique du pauvre Mattiello se retrouve fameusement entamée, ça doit être que Nainggolan s’est engagé excessivement et devrait au moins se ramasser la rouge, fût-ce a posteriori quand on comptabilise les morceaux de tibia et de péroné, non ? Cette ruée de Radja (dont il est coutumier, qui fait partie de son jeu), n’était-elle pas au moins aussi engagée que celle de Zlatan Ibrahimovic l’autre soir à Chelsea, ruée qui-aurait-pu-mais-qui-n’a-pas éclaté Oscar en morceaux, et qui fut pourtant motif d’exclusion ? Si. Mais il se fait qu’au foot, l’excès d’engagement se juge à l’aune du p’tit coeur de l’arbitre : un ref-poète impressionnable peut voir une agression sauvage, là où un ref-caïd sans états d’âme ne conclura qu’à un malheureux concours de circonstances… Alors, on fait quoi ?

Soit on ne fait rien, on aime le foot tel qu’actuellement, celui où mettre le pied est une vertu, ne pas le mettre étant le lot des trouillards : et une jambe pétée de-ci de-là, dans cet océan de tackles éblouissants, ce n’est pas cher payé pour que le spectacle conserve cette virilité grandiose qui lui va si bien. Pourquoi pas, même Mattiello adhère à cette thèse, il a tiré le mauvais numéro, mais il paraît qu’il n’en veut pas à Nainggolan… Pourquoi pas, mais on supporte alors ces sanctions arbitrales subjectives !

Soit on trouve barbares des accidents comme celui de Mattiello, fussent-ils rares, et l’on s’étonne que, dans ce monde qui légifère tant au nom du principe de précaution, le foot n’en ait rien à foutre ! Alors, on milite pour l’interdiction pure et simple du tackle glissé ! Sport de contact d’accord, mais DEBOUT, toujours debout : afin d’éradiquer certains carnages, interdiction formelle de se jeter à l’horizontale ! J’ai dit certains, pas tous, et ne croyez pas que ça deviendra un sport de ballerines : faudra s’attaquer ensuite au fléau plus vertical des semelles, imprimées sur chairs adverses ! A chaque jour suffit sa peine.

Après les tackles à l’horizontale, faudra s’attaquer au fléau plus vertical des semelles…

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